De : Anne-Sophie Bailly
Avec Laure Calamy, Charles Peccia-Galletto, Julie Froger, Geert Van Rampelberg
Année : 2024
Pays : France
Genre : Drame
Résumé :
Mona vit avec son fils trentenaire, Joël, qui est « en retard ». Il travaille dans un établissement spécialisé, un ESAT, et aime passionnément sa collègue Océane, elle aussi en situation de handicap. Alors que Mona ignore tout de cette relation, elle apprend qu’Océane est enceinte. La relation fusionnelle entre mère et fils vacille.
Avis :
Originaire de Franche-Comté, Anne-Sophie Bailly est une jeune cinéaste qui a commencé sa carrière en tant que comédienne de théâtre puis de cinéma, avant d’entrer à la Fémis en 2017. Entre 2018 et 2021, elle réalise plusieurs courts-métrages dans lesquels se dégagent son envie de cinéma, ses thématiques et l’idée de travailler en groupe. Fille issue d’une famille de soignants, c’est en suivant sa mère lors de son travail dans une maison de retraite qu’elle fait la rencontre d’une femme d’une soixantaine d’années ayant un retard intellectuel, qui a vécu toute sa vie avec sa mère, au point que lorsque sa mère est entrée en maison de retraite, sa fille l’a suivie.
Pour son premier long-métrage, Anne-Sophie Bailly a donc choisi de nous entraîner dans le quotidien d’une mère de famille et celle de son fils, Joël, une vingtaine d’années, ayant un retard intellectuel. Drame dans la pure tradition de ce que le cinéma français sait faire de plus touchant, « Mon inséparable » est un film bien loin de ce qu’il laisse imaginer, car s’il parle bel et bien du handicap et la difficulté qu’il impose dans une vie, « Mon inséparable« , c’est surtout et avant tout un film qui parle d’une relation mère/fils, et d’un cordon ombilical qu’il va falloir couper à un moment donné. Et le tout est emmené par une Laure Calamy incroyable, flamboyante, et parfaite dans la peau de cette mère pleine de craintes et d’envies.
« »Mon inséparable« , un premier film très riche et très touchant »
Mona vit avec son fils Joël, qui a un retard intellectuel. Joël, la vingtaine, travaille dans un établissement spécialisé qui s’occupe de « gens comme lui ». Sur son lieu de travail, il y a Océane, une jeune femme comme Joël, et ils sont amoureux. On peut même dire qu’ils sont intimes. Une intimité si proche qu’Océane tombe enceinte, à la très grande surprise des parents de ces deux « enfants ». Du côté de Mona, cette annonce est un choc, et surtout, elle fait peur, car comment Joël, qui a du mal à s’occuper de lui-même, pourrait-il devenir père ?
Décidément, cette dernière semaine de décembre 2024 est pleine de surprises, et dans ces rayons-là, on trouve « Mon inséparable« , un premier film très riche et très touchant dans ce qu’il traite. Sur une idée d’Anne-Sophie Bailly, qui en a écrit seule le scénario, « Mon Inséparable » est un film se pose comme surprenant, car là où on avait une idée presque toute fait de ce dont allait nous parler du film, avec le traditionnel drame déprimant que le cinéma français sait si bien nous servir, « Mon inséparable » se pose tout autrement.
Comme je le disais, le scénario est riche et plus que le handicap finalement, le film d’Anne-Sophie Bailly, c’est surtout un film qui parle d’amour. L’amour d’une mère pour son fils, et inversement, et comment cet amour fusionnel peut finalement « freiner » une vie. Avoir un enfant handicapé est difficile, c’est tout un plan de bataille qui résonne comme une habitude, et lorsqu’un événement s’impose et qu’il apporte avec lui un changement, comme ici, un amour, un couple, et l’arrivée d’un enfant, « Mon inséparable » va questionner le fait de laisser cet enfant vivre sa vie. Toutes les craintes d’une mère pour laisser partir ce fils, qu’elle a presque surprotégé pendant toutes ces années, n’est pas chose aisée face à un tel attachement.
« Laure Calamy est passionnante dans la peau de cette femme qui s’est oubliée »
Avec ça, le film questionne aussi la vie de femme, car cette mère s’est mise entre parenthèses, faisant de son fils, son monde, son univers, au point de s’oublier, et l’idée de revenir à une vie « normale », de lâcher prise, là encore, n’est pas chose aisée. Puis, toujours dans ce scénario, « Mon inséparable » est aussi un film qui parle d’amour, décrivant avec beaucoup de pudeur l’histoire d’amour de Joël et Océane. L’écriture est subtile, tout en ayant de la force, Anne-Sophie Bailly sachant nous tenir d’un bout à l’autre de son film avec émotions.
Des émotions qui naissent aussi grâce à une mise en scène intelligente, pudique, qui évite le misérabilisme, tout en offrant de magnifiques moments de drame qui sont portés par une Laure Calamy incroyable. Laure Calamy est passionnante dans la peau de cette femme qui s’est oubliée et qui doit apprendre à couper le cordon, au moment même où un autre cordon se crée. Franchement, Calamy est tellement naturelle, tellement spontanée, ça a l’air tellement simple et vrai pour elle, qu’elle bouleverse et bouscule encore une fois, démontrant qu’elle est une immense actrice.
Puis face à elle, dans son premier rôle, un Charles Peccia-Galletto plus vrai que nature, d’une grande justesse et d’une grande sensibilité. Ce duo de cinéma est magique. Il ne faudrait pas non plus oublier l’amoureuse incarnée par Julie Froger ou encore l’amant, qui arrive comme ça, sans que l’on s’y attente, sans qu’on ne l’ait cherché. Un amant joliment joué Geert van Rampleberg.
Ce premier film d’Anne-Sophie Bailly est une belle surprise. C’est le petit film qu’on n’attendait pas, et qui s’impose grâce à ses personnages, grâce aux sujets qu’il aborde avec finesse et simplicité, grâce à son duo d’acteurs, ou encore sa mise en scène qui offre des émotions et une réflexion… Bref, grâce à tout cela, Anne-Sophie Bailly se présente comme une cinéaste qu’on a très envie de survivre.
Note : 17/20
Par Cinéted