Avis :
Il nous arrive, de temps à autre, de rechercher des groupes inconnus sur le web, et de tenter de voir si ça vous le coup ou pas. Bien évidemment, on trifouille dans des méandres tortueux où l’excellence côtoie la médiocrité, où les groupes avec des moyens conséquents se juxtaposent avec des types qui ont uniquement leur salaire de manutentionnaire pour enregistrer un petit skeud. Néanmoins, il y a toujours des choses à prendre, et même pour les petits groupes, il y a cette volonté de courage et de générosité qui transpire tout le temps. Raptorgeist en est un exemple parmi d’autres. Considéré comme une bande de Heavy originaire de Derby en Angleterre, il suffit d’écouter leur seul et unique album à ce jour (sorti en 2017) pour comprendre que ce n’est pas que du Heavy, mais que c’est aussi un groupe fauché.
Bon, pour ce dernier point, il suffit aussi de jeter un œil à la pochette, qui est une photo en noir et blanc d’une campagne anglaise, avec l’incrustation du nom du groupe et de l’album avec une police par forcément optimale. Bref, Raptorgeist, ça respire le pognon, et Within the Fury est totalement autoproduit et ne possède aucun label. C’est certainement pour cela que les informations concernant le groupe sont si sporadiques sur le web, et qu’hormis avoir mis trois ans pour pondre ce gros bébé, on ne sait rien du groupe. Ah si, le guitariste joue aussi dans le groupe de rock prog Saracen, qui existe depuis les années 80, mais qu’il a intégré en 2008. Néanmoins, tout cela ne nous dit pas la qualité dudit skeud, ni même dans quel genre on se jette. Et pour faire simple, c’est pas mal, et ça flirte avec plein de genres.
On va tout d’abord se taper une introduction avec The Fury, qui pourrait se voir comme un feu de camp avec deux guitares sèchent qui se donnent la réplique. C’est doux et cela montre le talent des musiciens. Mais le démarrage s’opère avec Judah, et c’est là que l’on sent les limites de la production de l’album. Outre l’enregistrement qui n’est pas forcément bon, on va voir que les balances ne sont pas dingues, surtout au niveau de la voix qui est en retrait par rapport aux instruments. On arrive tout de même à distinguer l’envie du groupe de foncer tête baissée dans un Thrash assez velu et puissant, et globalement, on ne passe pas un mauvais moment. C’est nerveux, le groupe tente des breaks et des variations de tempo au sein du titre, ce qui est plutôt intéressant. De plus, ce morceau a le mérite d’être assez court.
Cela permet d’aller à l’essentiel et de ne pas se perdre en cours de route. Malheureusement, ce ne sera pas le cas tout le temps au sein de cet album. Redemption, le morceau suivant, va plutôt aller vers un Heavy assez classique, mais il va dépasser les six minutes, et quand on n’a pas forcément les moyens, ça peut devenir long et répétitif. De plus, ici, le chanteur utilise plutôt sa voix claire, mais elle n’a pas d’impact, et parfois, il fait même des fausses notes, donnant l’impression d’un enregistrement en live, au sein d’un mauvais studio. C’est dommage, car on sent que les musicos en ont sous la pédale. Et ce n’est pas Heresy qui va nous convaincre, partant là aussi dans un titre bien trop long et qui manque cruellement de rondeur et de pertinence. Même le refrain n’est pas assez appuyé.
Ce n’est pas nul, il y a un côté crasseux qui est plutôt intéressant, mais ça reste trop mal enregistré pour totalement nous embarquer. Et c’est d’autant plus dommage qu’il y a un travail intéressant fait autour des riffs de guitares. Fire the Gun of Obstinacy sera mieux, avec un son plus lourd, plus puissant, et surtout un temps d’écoute réduit, permettant au groupe de rendre une copie plus compacte, et donc plus percutante. Mais il a fallu caler une pseudo ballade là-dedans avec On the Eve of a Dream, et ce n’est pas bien. L’ensemble manque de fluidité et parait presque un peu niais. Brother tente l’expérience d’aller sur les platebandes de Pantera sans leur arriver à la cheville. Néanmoins, c’est un morceau assez intéressant dans sa mélodie pataude et bien lourde. Par contre Ten Days sera un titre décevant avec une batterie à la ramasse.
Au final, Within the Fury, le seul et unique album à ce jour des anglais de chez Raptorgeist, montre d’énormes faiblesses dans la production de cet effort. On entend bien que c’est de l’autoproduction et qu’il manque à la formation un budget plus conséquent pour faire la musique qu’ils aiment. En ce sens, difficile de ne pas être indulgent avec ce skeud, qui arpente plusieurs sous-genres du métal avec amour et générosité. Mais cette même générosité est mal employée, usant de titres bien trop longs pour convaincre, et d’un album bien trop long pour marquer les esprits. C’est dommage, on sent qu’il y a du potentiel, mais il n’est pas décemment utilisé…
- The Fury
- Judah
- Redemption
- Heresy
- Fire the Gun of Obstinacy
- On the Eve of a Dream
- Brother
- Ten Days
- We are the Gods
- Arbor Low
- Within
Note : 11/20
Par AqME