septembre 16, 2024

La Vague – Le Fascisme n’est Jamais Loin

Titre Original : Die Welle

De : Dennis Gansel

Avec Jürgen Vogel, Frederick Lau, Max Riemelt, Jennifer Ulrich

Année : 2008

Pays : Allemagne

Genre : Drame

Résumé :

En Allemagne, aujourd’hui. Dans le cadre d’un atelier, un professeur de lycée propose à ses élèves une expérience visant à leur expliquer le fonctionnement d’un régime totalitaire. Commence alors un jeu de rôle grandeur nature, dont les conséquences vont s’avérer tragiques.

Avis :

Le nazisme et la Seconde Guerre mondiale sont des sujets énormément évoqués au cinéma, et on comprend pourquoi. Que ce soit pour des récits historiques afin de ne pas oublier, ou pour parler de notre époque, avec des idéologies fascistes qui ne disparaissent pas, ces deux sujets ont une importance capitale, et il est logique que des scénaristes s’en emparent, comme devoir de mémoire, ou comme mise en garde pour notre société. C’est en 2008 que sort La Vague, inspiré à la fois d’une histoire vraie et d’un roman, où un professeur va prouver à ses élèves que le fascisme peut refaire surface à n’importe quel moment, en faisant un jeu de rôle qui va échapper à son contrôle. Dennis Gansel va alors mettre ça en images pour faire un film coup de poing, qui résonne comme une mise en garde face à notre société actuelle.

Le pitch de base est très simple. Chaque année, pendant une semaine, dans un lycée allemand, les élèves travaillent sur des ateliers qui ont pour sujet les différents régimes politiques. Rainer est un professeur un peu punk sur les bords, très apprécié, et il tombe sur l’autocratie. Afin de peaufiner cet apprentissage, il va mettre en place un jeu de rôle dans lequel il sera un dictateur, et ses élèves seront ses laquais. Ce qu’il n’avait pas prévu, c’est qu’au fur et à mesure de l’expérience, les élèves vont prendre ça très au sérieux, quitte à sombrer volontiers dans un régime totalitaire où ils ne voient que les bons côtés de la chose, c’est-à-dire appartenir à une communauté qui se serre les coudes face aux autres et aux idées différentes. Un scénario malin qui va montrer plusieurs choses sur l’éducation allemande, mais pas que.

« Une preuve que les idées fascistes se concentrent énormément sur les plus faibles. »

Ce qui est très intéressant dans ce film, c’est son point de départ. Ici, les élèves en ont ras-le-bol qu’on leur rabâche l’histoire du nazisme, étant persuadés que c’est de l’histoire ancienne. Sauf que cette lassitude entraine un oubli, ou tout du moins un fonctionnement sur la mise en place du totalitarisme. Ainsi, en seulement une semaine, en flattant les égos, en mettant en plus un système très importe d’entraide et de reconnaissance, ce professeur va créer une atmosphère propice au fascisme, avec une idée unique. Le fait d’appartenir à une communauté, de se sentir aimé et épaulé alors même que sa propre famille nous renie, se sentir valorisé dans ses compétences, comme le dessin pour créer un logo, tout cela construit une idéologie nazie qui prend de plus en plus de place et entraine alors des dérives totalitaires graves.

Comme le montre très bien Dennis Gansel dans son film, c’est par petite touche que les crises identitaires commencent. Tout d’abord avec la mise en place d’un uniforme et d’un logo. Puis avec une sélection à l’entrée de certains lieux, comme la piscine par exemple. On retrouvera aussi un salut particulier, pour se reconnaître au sein de la communauté. Petit à petit se met en place des gestes et des situations qui excluent les autres, et mettent en évidence que sous la bonhommie de cette communauté se cache en fait un régime autoritaire et fermé. Le film se fait d’autant plus puissant qu’il provient d’un adulte apprécié par les jeunes, et que ce dernier fait figure de manipulateur auprès d’âmes fragiles et malléables. Une preuve que les idées fascistes se concentrent énormément sur les plus faibles, psychologiquement parlant, ou sur des personnes aux situations précaires.

« C’est dans la description des personnages que le film se fait très fort. »

Et c’est dans la description des personnages que le film se fait très fort et d’autant plus marquant. Le professeur, flatté dans son égo en accueillant de plus en plus d’élèves, ne voit pas forcément les changements (même chez lui avec ses nouvelles tenues vestimentaires, puisqu’on passe de t-shirts arborant The Ramones à des chemises blanches) et veut poursuivre cette aventure sur la semaine, même lorsque ça va trop loin. Quant aux élèves, on va avoir un joli panel de personnalités qui trouvent leur intérêt au sein de cette vague. L’un d’entre eux, le plus touchant de tous, trouve enfin une place dans la société, malgré ses idées déviantes et sa dépression visible. S’il parait bizarre aux autres et est un souffre-douleur pour les punks du lycée, il va trouver de l’entraide dans la vague et une vraie place, lui donnant alors une vraie identité.

Le film n’oublie pas pour autant les autres élèves, ceux qui voient en la vague une dérive identitaire grave. Les rivalités vont se faire plus fortes, un combat va se mettre en place, et certains élèves vont dépasser les limites. On aura par exemple le couple qui se déchire entre un jeune homme qui veut rester dans son pays, trouve un certain réconfort dans la vague, et sa petite amie, un peu princesse, qui souhaite fuir en Espagne ses parents un peu trop cool à son goût. On aura droit à des violences physiques, qui remettront en cause l’adhésion à la vague, mais aussi des dégradations publiques, pour afficher son affiliation, ou encore des endoctrinements auprès des plus jeunes, qui y voient le moyen de paraître encore plus cool et de trainer avec des ados plus âgés qu’eux. Bref, le film n’oublie rien et se fait le plus complet possible.

Au final, La Vague est un excellent film qui montre à quel point il est facile de sombrer dans une société autocratique et de redonner des ailes au fascisme. Malgré ses presque vingt ans, le film est toujours autant d’actualité en ce moment, ce qui fait froid dans le dos, démontrant que l’Histoire a son importance, et qu’il ne faut jamais oublier les erreurs du passé pour ne pas les recommencer. Filmé de manière pédagogique, captivant dans sa mise en scène dynamique et réellement important dans son mécanisme, La Vague est un long-métrage important, voire même essentiel.

Note : 17/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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