avril 28, 2024

Le Quatrième Homme

Titre Original : Kansas City Confidential

De : Phil Karlson

Avec John Payne, Coleen Gray, Preston Foster, Neville Brand

Année : 1952

Pays : Etats-Unis

Genre : Policier

Résumé :

Joe Rolfe, ancien détenu, est soupçonné dans l’attaque d’un fourgon blindé, organisée par un ex-flic, Tim Foster. S’étant mis hors-la-loi, il prend l’identité d’un escroc décédé et infiltre le gang de Foster afin de prouver son innocence…

Avis :

Véritable âge d’or pour le film noir, les années 1950 ont fourni quelques-uns des métrages les plus emblématiques du genre. Quand la ville dort, House by the River, L’Inconnu du Nord-Express, La Soif du mal… De John Huston à Orson Welles, en passant par Fritz Lang ou Alfred Hitchcock, les plus grands cinéastes se sont essayés à ce registre aux codes très marqués. On songe, entre autres, à une atmosphère sans commune mesure et à des intrigues subtiles, voire avant-gardistes pour certaines d’entre elles. Avec Le 4e homme, Phil Karlson propose une incursion quelque peu atypique, sinon marginale dans certains de ses fondamentaux, ne serait-ce qu’à travers son cadre exotique.

Cela vaut aussi pour l’approche où l’on s’oriente davantage vers le film de casse. Un autre style qui possède néanmoins de nombreuses similarités avec le film noir. On songe, entre autres, à des personnages au tempérament marqué, quitte parfois à lorgner du côté de la caricature. Ici, l’organisation d’un hold-up et son exposition s’avancent comme une amorce à l’intrigue. Une sorte de mise en condition pour présenter les protagonistes, ainsi que les enjeux. Si les préparatifs suggèrent de la rigueur et de la patience, le déroulement du vol reste assez furtif à l’écran. L’histoire ne tient pas à susciter le doute quant à sa réussite potentielle. Elle préfère développer ses conséquences à plus ou moins longue échéance.

« La montée en tension se fait sur des critères de jugement et de valeurs . »

Au sortir d’une enquête mouvementée et d’interrogatoires musclés, le véritable attrait du film est de réunir les intervenants dans un contexte différent. En l’occurrence, l’enjeu est de parvenir à se partager le butin sans avoir connaissance de l’identité des autres criminels ; à l’exception du principal instigateur qui orchestre la rencontre. À ce titre, le spectateur profite de la même prescience, car la montée en tension se fait sur des critères de jugement et de valeurs ; qu’ils soient avérés ou biaisés. Cette gestion du suspense s’appuie sur des confrontations tour à tour fortuites ou fomentées. Dès lors, le scénario instaure les bases d’un jeu de suspicions mutuelles.

D’une manière finaude, on assiste à des tentatives de manipulation afin de dévoiler non pas l’identité des comparses, mais leurs intentions premières. Celles-ci tiennent surtout à l’appât du gain, même si pour le personnage principal, elles relèvent de la vengeance, sous couvert d’un sentiment d’auto-justice assez ambivalent. En cela, Joe Rolfe (John Payne) est un individu nuancé et guère vertueux, au regard de son passé ou de ses méthodes pour gérer la situation. Dès lors, le film interpelle sur la frontière entre le crime et la justice où la voix d’Helen Foster (Coleen Gray) s’avance comme la conscience toute symbolique qui taraude son homologue. 

« Le 4e homme est un film noir doté d’une intrigue solide et pleine de finesse. »

Au regard des nombreuses versions du script, on distingue alors plusieurs perspectives quant au sort des protagonistes au terme de l’affaire. Les aboutissants jouent aussi bien sur la notion de réhabilitation, la capacité de s’amender d’un crime passé que sur l’absence d’une morale clairement établie. En prenant connaissance des différents devenirs, il en émane une sorte d’atermoiement qui subsiste à l’écran. En soi, ce n’est pas un défaut, même si ce « flottement » narratif peut décontenancer à certains égards. En cause, un dénouement qui semble précipité par rapport à une mise en place méticuleuse et patiente pour entretenir un suspense de circonstances.

Au final, Le 4e homme est un film noir doté d’une intrigue solide et pleine de finesse. Afin d’étayer son propos, le métrage de Phil Karlson n’hésite pas à emprunter des éléments propres au Whodunit ou au film de casse. La tension ambiante réside dans des confrontations à demi-mot, où la gestuelle et les regards en disent souvent plus qu’une menace explicite. On se plaît à suivre une situation qui ne cesse de se dégrader, où les enjeux initiaux s’orientent vers des considérations morales qui restent parfois dans l’expectative. Malgré le clivage manichéen apparent, il en ressort un traitement intelligent et perspicace qui interpelle sur la notion de justice où la réparation d’un préjudice peut prendre des atours criminels.

Note : 15/20

Par Dante

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