De : Laetitia Masson
Avec Benjamin Biolay, Elodie Bouchez, Judith Chemla, Nicolas Duvauchelle
Année : 2023
Pays : France
Genre : Drame
Résumé :
Dix personnages surpris par un froid glacial en plein été. Des rencontres, de la solitude, de l’espoir, de la peur, de l’amour, une chanson, la lutte des classes, et des rêves. Dix fragments d’humanité qui forment un tableau impressionniste de la France, aujourd’hui. Un hommage aux Nymphéas.
Avis :
Réalisatrice et productrice française, Laetitia Masson est un électron libre dans le paysage du cinéma français. Laetitia Masson commence à réaliser à la toute fin des années 80, avant de réaliser son premier long-métrage, « En avoir (ou pas)« , en 1995. Depuis, discrètement, Laetitia Masson a réalisé par moins de dix films. En parallèle de ça, pour ceux qui aiment les émissions Blow Up sur Arte et YouTube, il faut aussi mentionner que la metteuse en scène prête sa voix à l’émission pour y faire des portraits tout en passion et bons mots.
Après une mini-série pour Arte en 2018 et un futur téléfilm pour la même chaîne, Laetitia Masson s’apprête à faire son retour dans les salles de cinéma, huit ans après « GHB« . Pour ce retour, la réalisatrice revient avec un sujet fort et d’actualité, l’écologie. Ainsi, avec « Un hiver en été« , oscillant entre beaucoup de personnages, Laetitia Masson imagine des débats et des histoires autour de ce qui pourrait être la fin du monde. Ambitieux dans son envie de cinéma, intéressant dans ce qu’il raconte, intéressant à plus d’une reprise dans ses sujets, malheureusement, « Un hiver en été » s’enlise très vite dans un film « auteurisant » qui s’écoute parler et qui, finalement, n’arrivera pas à passionner. Dommage.
« C’est un film qui s’intéresse à un sujet d’actualité et essentiel, l’écologie. »
France, Juin 2022, c’est l’été, et pourtant, depuis des semaines, les températures ne cessent de descendre. Aujourd’hui, il fait moins quinze degrés et tout pousse à croire que ça ne va pas aller en s’améliorant. Serait-ce la fin du monde ? Partout dans le pays, on craint le froid et pourtant, malgré cela, la vie a tout l’air de continuer comme avant. Enfin, du moins les hommes et les Français s’adaptent. Du Nord au Sud, de l’Est à l’Ouest, différents personnages se rencontrent, s’aident ou se rejettent, et quand arrive la nuit, aucun d’eux ne se doutent qu’au lever du soleil, le lendemain matin, leurs vies ne seront plus les mêmes.
Sentiment très partagé à la sortie du nouveau film de Laetitia Masson, car sur le papier, le film rassemble beaucoup d’éléments qui rendent le projet très intéressant. « Un hiver en été« , c’est un film qui s’intéresse à un sujet d’actualité et essentiel, l’écologie, puis derrière ça, le film s’aventure à peindre ce qui pourrait bien ressembler à une période glacière. Avec ce sujet et ce fait qui s’installe dès le début, « Un hiver en été » pose des questions intéressantes. Et si c’était la fin du monde, et derrière ça, qu’est-ce que la fin du monde ? Cette dernière ne se produirait pas d’un seul coup et s’imposerait petit à petit…
« »Un été en hiver » enferme ses personnages dans des problèmes qui ont bien du mal à intéresser ou convaincre. »
Pour étayer son sujet, Laetitia Masson imagine alors une bonne dizaine de personnages qu’elle éparpille aux quatre coins de la France pour aborder les peurs, les craintes, les espoirs, mais aussi ce qui fait la vie de tous les jours. Une phrase de l’époque des gilets jaunes vient en tête, et qui disait « – Ils parlent de la fin du monde et nous on parle de la fin du mois », et le film de Laetitia Masson peut être une définition de cela, car alors que tout a bien l’air de s’écrouler, les personnages vont rester pour beaucoup, voire même tous, centrés sur la vie et leurs problèmes. La démarche est très intéressante, et même assez passionnante dans son ouverture, lorsque le kaléidoscope de personnages nous est présenté.
Mais voilà, comme je le disais, malheureusement, cette idée ne tiendra pas la longueur. Si ça peut au départ se poser comme une critique de ces personnages, sur le reste, la cinéaste ne fait pas grand-chose avec son sujet et très vite, « Un été en hiver » enferme ses personnages dans des problèmes qui ont bien du mal à intéresser ou convaincre. Des histoires d’amour ici et là, et des conversations autour de la technologie ou de la défense du pays, une chanteuse qui erre dans les rues d’un Paris désert avant de partir enregistrer un titre en studio, des conversations autour de l’art… Très vite, le film se perd et l’on a bien du mal à comprendre de quoi « Un hiver en été » veut parler. Ce froid glacial restera toujours présent, mais il sera surtout relayé au second plan, pour apparaître presque comme prétexte scénaristique pour parler d’hommes et de femmes finalement très seuls et qui ne s’écoutent pas.
« L’ensemble s’enfonce dans des discussions et des peintures de personnages qui balancent des banalités. »
Si au détour de quelques conversations, « Un hiver en été » arrivera à relancer la machine de l’intérêt, bien souvent, l’ensemble s’enfonce dans des discussions et des peintures de personnages qui balancent des banalités et surtout qui s’écoutent parler autour de la lutte des classes, autour d’un amour perdu, des complots, ou autour de l’art et c’est long, très long, d’ailleurs, le film tient un aspect contemplatif certes, très beau esthétiquement parlant, mais aussi froid et inintéressant que beaucoup des conversations des personnages. On ajoutera à cela que parfois, le scénario impose des éléments qui arrivent comme ça, et dont on a bien du mal à en saisir le pourquoi. L’exemple le plus criant sera tout ce qui tourne autour du personnage incarné par Nicolas Duvauchelle.
Ce constat et l’ennui ressenti sont d’autant plus dommage car le film de Laetitia Masson a de belles qualités derrière, à commencer par l’ambiance travaillée et coincée. La réalisatrice a parfaitement su transcender son film par la vague glaciale qui recouvre la France et on imagine, l’Europe. On notera aussi le joli travail pour rendre ce film oppressent, notamment dans sa BO. Puis enfin, prises seules, le film tient aussi de très belles scènes qui, comme je le disais, rebooste l’ensemble.
Puis enfin, toujours dans les belles qualités du film, la réalisatrice a su réunir un très beau casting, dont certains d’entre eux sont très bons. Nora Hamzawi, Elodie Bouchez ou Pablo Pauly pour ne citer qu’eux. D’ailleurs, l’intrigue qui tourne autour des personnages incarnés par Pablo Pauly et Laurent Stocker est clairement la plus intéressante, même si elle est loin des problèmes écologiques et fin du monde que le film nous vend. Dans un autre sens, Nicolas Duvauchelle, Benjamin Biolay ou Judith Chemla, en plus d’avoir des personnages assez clichés et détestables, sont assez mauvais.
Il y avait donc de bonnes et belles idées dans le nouveau de Laetitia Masson, mais malheureusement, malgré tout ça, l’ensemble se révèle bien faiblard et surtout peu intéressant. C’est vraiment dommage, car avec une telle idée, un sujet pareil et un casting aussi beau que celui-ci, on attendait bien mieux et surtout bien plus passionnant que ce qui a nous été offert. Dommage, vraiment dommage.
Note : 08/20
Par Cinéted