avril 24, 2024

Gorgo

De : Eugène Lourié

Avec Bill Travers, William Sylvester, Vincent Winter, Christopher Rhodes

Année : 1961

Pays : Angleterre

Genre : Fantastique

Résumé :

Des chasseurs de trésors capturent un monstre sous-marin, ressemblant à un dinosaure, au large de l’Irlande, et le traînent dans un filet jusqu’à Londres où il est exhibé comme une bête de foire. L’attraction connaît un succès formidable et les spectateurs se bousculent pour découvrir « Gorgo », un monstre de 20 m. Cependant, un scientifique émet une hypothèse qui augure mal de l’avenir : la créature ne serait qu’un bébé qu’un parent beaucoup plus grand pourrait venir chercher…

Avis :

En 1954, Ishiro Honda va réaliser un film de monstre qui montre la peur d’une nouvelle attaque nucléaire au Japon. En transformant la bombe par un monstre gigantesque radioactif, le réalisateur joue sur une nouvelle peur post guerre mondiale et va constituer un monument du septième art. Y voyant certainement une opportunité d’apporter une réponse européenne, Eugène Lourié va, en 1961, proposer Gorgo, où un monstre aquatique va attaquer Londres et faire de nombreuses victimes. Aujourd’hui quasiment oublié de tous, Gorgo est pourtant un film loin d’être désagréable, gentiment désuet, et qui va s’amuser à singer les codes établis par King Kong et Godzilla. Un pot-pourri qui pourrait paraître opportuniste, mais qui va essayer de parler brièvement du conflit entre l’Irlande et l’Angleterre, dans un duel de langues aussi court qu’intéressant.

D’entrée de jeu, le film nous plonge au cœur de la mer, aux côtés de chasseurs de trésor qui explorent une carcasse de bateau. Surgit alors au milieu de la mer un volcan, qui va créer une sorte de tsunami, mettant à mal l’équipage et la côte irlandaise. Peu de temps après cette catastrophe, un monstre marin dévaste la ville côtière. Une équipe décide alors de capturer la bestiole, puis de l’exhiber à Londres, pour attirer le chaland et se faire des thunes. Ici, toute ressemblance avec King Kong est fortuite. On change juste les professions des protagonistes et la nature du monstre, et on se retrouve avec un copié-collé un peu trop voyant. Surtout que, bien entendu, l’attraction ne va pas attirer que les curieux, mais aussi une maman qui veut retrouver sa progéniture. Là, pour l’époque, on y retrouve de l’originalité.

« Ici, toute ressemblance avec King Kong est fortuite. »

Bien évidemment, au lieu de comprendre ce que cherche ce gros lézard, et afin de ne pas perdre une manne financière importante, l’humain va prendre la décision de tirer avec toutes les armes possibles sur la bestiole pour s’en débarrasser. Du coup, on aura droit à de la destruction massive, avec les deux monuments emblématiques de Londres, Big Ben et le Tower Bridge. Afin de donner du crédit à la taille phénoménale de ce monstre, on va voir que détruire des bâtiments est une chose facile, avec de nombreuses maquettes qui feront la joie du type caché dans le costume de Gorgo. Eugène Lourié est un bon artisan, et il va essayer d’en montrer le plus possible, jusqu’à des morts massives à cause des destructions.

Des murs tombent sur les gens, l’armée se retrouve ensevelie sous des gravats, et pour donner du crédit à tout ça, on va avoir droit à des effets assez désuets, mais qui donnent du cachet à l’ensemble. Pour faire tout cela, le réalisateur va utiliser de la superposition de pellicule, ou encore avoir recours à du carton-pâte pour faire croire à de réelles chutes de pierres. Si aujourd’hui, cela semble ridicule et assez laid, pour l’époque, ce devait être une petite révolution. On peut aussi pester sur les fonds peints, notamment lors des phases dans l’eau, avec les plongeurs. On voit que c’est tourné en studio, la faute à une incrustation visible et pas toujours agréable à l’œil. Mais encore une fois, dans son contexte, ces petits bidouillages donnent presque du sens en l’existence de ce film. Il se fait inspirant en la découverte de nouveaux effets spéciaux.

« Gorgo a un côté très attachant dans son aspect désuet. »

Comme on peut le voir, Gorgo a un côté très attachant dans son aspect désuet, mais il loupe le coche sur son fond et ce qu’il veut raconter. Si les japonais avaient de quoi craindre une nouvelle attaque nucléaire, ce n’est pas forcément le cas pour les anglais. D’ailleurs, le monstre provient d’une catastrophe naturelle, et non pas d’un essai nucléaire qui réveille une bestiole. Du coup, Eugène Lourié n’a pas grand-chose à dire. On peut y déceler une tension forte entre l’Irlande et l’Angleterre, avec notamment une langue gaélique volontairement parlée pour ne pas se faire comprendre des anglais. Malheureusement, ça reste une note d’intention qui n’aura aucun impact sur la suite du film. Il faudra alors se rabattre sur l’aspect carnassier de l’humain, qui exploite une bestiole pour se faire de l’argent. Un thème vieux comme le monde, qui marche, mais qui manque d’épaisseur ici.

Il en va de même avec les personnages du film. On va suivre deux chasseurs de trésors qui vont alors exploiter Gorgo. Seulement, avec l’arrivée de la mère, l’un des deux estime qu’il faut libérer la bestiole afin d’éviter un carnage. Sauf que son collègue ne l’entend pas de cette oreille, étant plus vénal, et ne voulant pas perdre sa manne financière. Seulement, le duel vire court et ne sera jamais exploité. Tout comme le personnage du petit garçon, qui s’attache au monstre, qui va fuir avec l’armée pour on ne sait quelle raison, et qui va se faire rattraper par l’un des deux types pour le mettre à l’abri. Certaines situations sont incompréhensibles et manquent de cohérence avec le reste. Par contre, les scènes de panique sont bien réalisées, apportant une belle plus-value au long-métrage.

Au final, Gorgo est un film qui sait se faire attachant dans sa façon d’imiter les autres films de monstres gigantesques. On y retrouve tous les ingrédients d’un King Kong ou d’un Godzilla, notamment dans cette envie de montrer de la destruction massive. Malheureusement, le film anglais manque de profondeur dans son script, et n’arrive pas à jouer sur une peur tangible du peuple autour d’une créature gargantuesque. On évoque rapidement une déesse de la mer, mais c’est à peine évoqué. Bref, Gorgo est un film qui n’est pas désagréable (malgré le costume tout moisi), mais qui ne fait pas le poids face aux mastodontes du genre.

Note : 11/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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