avril 26, 2024

Django

De : Sergio Corbucci

Avec Franco Nero, Loredana Nusciak, José Bodalo, Angel Alverez

Année : 1966

Pays : Espagne, Italie

Genre : Western

Résumé :

Un homme mystérieux arrive dans une petite ville, tirant un cercueil boueux derrière lui. Nommé Django, cet étranger sauve la vie d’une jeune femme et se retrouve ainsi projeté en plein cœur d’une guerre entre des révolutionnaires mexicains et une bande de racistes sadiques menés par un fanatique, le major Jackson. Malgré le chaos ambiant, Django met son plan en action : se venger, en opposant ennemi contre ennemi…

Avis :

Quand on demande à de grands réalisateurs quels sont leurs films préférés, on tombe souvent sur des évidences, mais il y a aussi quelques surprises et des longs-métrages un peu plus obscurs. Il faut dire que généralement, pour faire ce métier, il faut être boulimique de péloches, et c’est clairement le cas de Quentin Tarantino. Bouffeur de films à longueur de journée, il a toujours cité Django comme l’une de ses références, comme un western ultime et l’un de ses films préférés. Il n’est d’ailleurs pas étonnant qu’il ait fait Django Unchained dans sa carrière, rendant bien évidemment hommage au film de Sergio Corbucci. Relativement court, concis et épuré, Django est un western crépusculaire qui va droit au but, mais qui n’oublie jamais ses thèmes de départ, à savoir le racisme et l’appât du gain. Et à sa découverte, on comprend vite pourquoi Tarantino l’aime tant.

Dès le départ, on est plongé au plus près du personnage principal, qui tire derrière lui un cercueil. Comme un ange avec sa croix, il va assister au lynchage en règle d’une jeune femme par des mexicains. Ces derniers se font alors massacrer par des américains, qui ne vont pas sauver la fille, mais plutôt l’accrocher à une croix pour la brûler. Django intervient alors et sauve la demoiselle en détresse. Loin d’être sympathique, le héros (ou plutôt anti-héros) va utiliser la femme comme monnaie d’échange dans un bar miteux, où il va demander à boire et à manger. Jusque-là, on reste toujours proche du personnage, et on va petit à petit apprendre à le cerner. Franco Nero donne ses traits à un personnage taiseux, qui ne se laisse pas faire, et qui ne semble avoir peur de personne.

« Mais la force du récit ne s’arrête pas à un jeu de dupe où Django s’en sortirait avec les mains propres. »

Une tête brûlée qui va devoir faire face à un major raciste, dont le petit jeu est de tirer sur des mexicains qu’il utilise comme des pigeons d’argile. Sergio Corbucci ne fait pas dans la dentelle avec ses protagonistes. Si Django semble sans foi ni loi et utilise tout ce qui lui tombe sur la main, il en va de même avec les antagonistes, qui sont de véritables pourritures. Le major Jackson est le racisme personnifié, avec en plus une pointe d’homme politique qui peut se permettre ce qu’il veut avec son statut et son argent. En très peu de temps, le réalisateur fait passer plusieurs messages, tout en iconisant son héros, lors d’une fusillade dantesque. Et il va en être de même avec l’arrivée des mexicains, qui sont des « amis » de Django. Là aussi, les relations sont ambiguës et Corbucci va traiter d’un autre thème.

Ici, le racisme n’a plus vraiment sa place. Tout simplement parce que Django s’en fout des origines des personnes et il veut juste utiliser les gens pour sa propre personne. Il va alors faire s’opposer le major Jackson avec son ami mexicain lors d’un braquage qui va tourner au pugilat, pour ensuite s’offrir toute la récompense. Mais la force du récit ne s’arrête pas à un jeu de dupe où Django s’en sortirait avec les mains propres. A quelque part, Corbucci va rendre son personnage faillible, notamment à cause de l’appât du gain et de son égoïsme. La loi du plus fort est bien présente, et le héros va le payer cher. Il réside au sein de ce film un certain fatalisme qui fait plaisir à voir et qui sort des carcans des films hollywoodiens. En effet, on ne sait jamais si Django va s’en sortir.

« L’ensemble est très inspiré, avec des cadres superbes et une volonté de mettre en avant les yeux bleus de Franco Nero. « 

De plus, il n’est pas invincible, ce que l’on peut déjà tâter lors d’un combat à mains nues, où il prend de sacrées torgnoles. Le réalisateur insuffle vraiment de la tension au sein de son film, que ce soit dans la destinée de son héros, qui va devoir faire un choix sur la fin, entre l’amour et l’argent, mais aussi au sein de sa mise en scène. L’ensemble est très inspiré, avec des cadres superbes et une volonté de mettre en avant les yeux bleus de Franco Nero. Outre l’iconisation de son personnage principal, on retrouve aussi tout ce qui fait le charme du western spaghetti avec ces gros plans sur les visages lors des morts ou de certains plaisirs sadiques. Tout cela sert bien évidemment le propos recherché par Corbucci qui, avec une faible durée, réussit à créer des personnages forts et des thématiques malines et contemporaines.

Au final, Django est bel et bien un excellent western, aussi bien dans sa mise en scène que dans son propos. Créant une vraie connexion entre le spectateur et le héros, en lui collant aux basques dès le générique de début, Sergio Corbucci va réussir à introduire des thèmes forts comme le racisme, la vénalité et la trahison en très peu de temps et en évitant toute fioriture. On comprend aisément pourquoi ce film est l’un des préférés de Tarantino, tant il respire une virtuosité formelle au sein d’un contexte intelligent et plus complexe qu’il n’y parait. D’autant plus que le film vogue tranquillement vers ses soixante ans d’existence, et il n’a pas pris une ride.

Note : 19/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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Une réflexion sur « Django »

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