avril 19, 2024

Les Films de Zombies Nazis

Les grandes et les petites histoires de l’humanité inspirent les scénaristes du septième art et on ne compte même plus les histoires vraies, faits divers et autre biopics sortis au cinéma. Mais s’il y a bien un évènement qui a marqué tous les esprits, c’est la Seconde Guerre Mondiale et la montée horrible du nazisme. Bien entendu, entre certains conflits précis, des destins de soldats courageux ou encore des faits extraordinaires, la Seconde Guerre Mondiale a été décortiquée dans tous les sens, et dans tous les genres. Historique, fantastique, horreur, drame, même comédie, tout a déjà été fait et certains sous-genres sont même devenus des tropes. A ce compte, on peut bien évidemment citer le soldat nazi qui se transforme en zombie increvable, ce qui donnera lieu à des films souvent improbables, mais parfois très intéressants. Retour sur ce trope horrifique si particulier.

L’émergence pendant la guerre

Le cinéma va très vite s’intéresser aux nazis, mais aussi à leur propension à aller vers l’occulte. L’histoire du soleil noir de Thulé, cette recherche d’immortalité de la part d’Hitler, autant de délires qui semblent s’inspirer d’éléments réels, mais qui rentrent parfaitement dans un cinéma uchronique et fantastico-horrifique. Un peu à la manière de Godzilla pour les japonais, qui exorcisaient un peu leur peur du nucléaire, les européens et les américains vont faire pareil avec les nazis, leur prêtant des traits démoniaques pour revenir hanter un monde à la dérive. Le premier à tenter l’expérience est Jean Yarbrough en 1941. Nous sommes en pleine guerre, les nazis sont dominateurs, et les films se doivent de montrer des héros américains déjouant les plans de méchants machiavéliques. Une sorte de film de propagande pour donner de l’espoir à la population.

King of the Zombies est simple dans son approche et réunit tous les ingrédients d’un B-movie de l’époque. Ici, un aviateur se crashe sur une île et tombe dans un manoir où un savant fou expérimente des choses sur un soldat américain capturé quelques temps plus tôt. Le nazisme n’est point trop évoqué, si ce n’est ses accointances avec le communisme (n’oubliant que nous sommes au début des années 40). Deux ans plus tard, une suite (ou pseudo remake) voit le jour avec Revenge of the Zombies de Steve Sekely. Tournant en dérision des expérimentations dangereuses, le film se veut presque être une comédie horrifique, en mettant en avant un scientifique espion qui bosse pour l’Allemagne nazie. Bien évidemment, on devine tous comme cela va finir, afin, encore une fois, de rassurer la population sur la volonté de ses soldats, mais aussi de montrer l’aspect démoniaque des nazis.

Les années 70/80 et la naziploitation

Une fois la Seconde Guerre Mondiale terminée, les films de zombies avec des nazis dedans se sont fait plus discret. D’ailleurs, on remarquera que pour les deux films précités, les zombies ne sont pas nazis, mais c’est le scientifique qui a créé les morts-vivants. On aura quelques soubresauts et tentatives entre les années 50 et 70, comme She Demons, un film indépendant en noir et blanc, ou encore le téléfilm They Saved Hitler’s Brain, souvent décrit comme l’un des pires films de tous les temps, mais là encore, si zombies il y a, ils ne sont que la conséquence d’un scientifique méphitique. Il faudra alors attendre 1966 et The Frozen Dead pour voir une première tentative de faire revenir des soldats nazis à la vie. Mais c’est avec Shock Waves de Ken Wiederhorn (1977) que le trope va prendre toute son ampleur.  

Dans ce film, des touristes en bateau vont faire la rencontre de soldats nazis zombifiés qui prenaient un petit bain. Malgré la présence de Peter Cushing, on reste sur de la série Z pas forcément intéressante. Quatre ans plus tard, la créature revient dans deux films. Le Lac des Morts-Vivants de Jean Rollin et Night of the Zombies de Joel Reed. Si pour le premier film, on est dans une histoire de revanche vingt ans après la guerre, pour le deuxième, des éléments scientifiques se mettent en place, avec notamment la présence d’un gaz qui aurait transformé les soldats nazis en zombie. L’année d’après, en 1982, c’est le célèbre Jesus Franco qui se tâte au genre avec Oasis of the Dead, où l’action prend place dans le désert, avec des chasseurs de trésors. Là, les nazis sont devenus des zombies pour protéger ledit trésor.

Comme on peut le voir, le zombie nazi est principalement utilisé dans un souci de créer un climat de peur et de jouer sur l’aura sombre des nazis. On a peu de mention autour des recherches ésotériques de l’armée allemande, et surtout, il n’y a guère de réminiscence par rapport au conflit qui est passé. Un peu comme un rappel inutile, ces films utilisent l’image du nazi pour approfondir un peu plus la noirceur du méchant, le zombie, en lui donnant des airs encore plus mesquins. Cela suit un délire autour de l’exploitation de l’image nazie dans le cinéma de genre, avec un sous-genre qui ne va faire que décliner par la suite. Il faut dire qu’entre Ilsa la Louve, Horreurs Nazies et consorts, la coupe commence à être pleine. Et des comédies absurdes vont alors sortir, à l’instar de Hard Rock Zombies.

Les Années 2000/2010 : le Regain d’intérêt

Après 1989 et le très étrange The Ginseng King (sorte de remake de L’Histoire Sans Fin version Taïwanaise), le sous-genre va tomber dans l’oubli, jusqu’à la fin des années 2000 et le début des années 2010. Allez savoir pourquoi, le zombie nazi va refaire surface de manière spectaculaire, pour raconter des histoires différentes, aussi bien dans leur ton que dans leur volonté de « choquer » le spectateur. Si l’on excepte Operation Nazi Zombies sorti en 2003 mais filmé en 1999, c’est tout d’abord Horrors of War qui va faire un peu parler de lui en 2006, en surfant sur le monde des films dits Grindhouse. Pour autant, c’est surtout deux ans plus tard que les zombies xénophobes font faire leur grand retour avec deux films radicalement différents, Outpost et son aspect très sérieux, puis Dead Snow et sa comédie gore décomplexée.

Le premier film cité est signé Steve Barker et il raconte comment une escorte de soldats se retrouve dans un bunker où des recherches scientifiques nazies ont eu lieu. Très classique dans sa trame, assez peu convaincant, le long-métrage va pourtant lancer une franchise, avec trois films au compteur, Outpost Black Sun et Outpost Rise of the Spetsnaz, sortis respectivement en 2012 et 2013. Ici, la figure du zombie nazi est exploitée dans son sens le plus strict, c’est-à-dire de créer une peur viscérale avec une menace intemporelle, évoquant des souvenirs douloureux et renvoyant à une peur primaire. Bien évidemment, cela rejoint le côté « culte » et obscur des recherches nazies, et cette angoisse de voir revenir un mouvement xénophobe et raciste. Et la mouvance des partis néo-fascistes n’est pas là pour rassurer. Dans un autre sens, Tommy Wirkola va s’amuser avec cette image nazie.

La deuxième « franchise » à marquer les esprits avec ce trope est Dead Snow. Ici, nous sommes dans une comédie gore, qui sera par la suite utilisée à plusieurs reprises. Le but n’est pas de créer de la peur, mais de montrer que les nazis sont des êtres bêtes et méchants, et qu’il est possible de rire en les tournant en dérision. Le réalisateur norvégien l’a très bien compris et il va aller à fond dans l’outrancier. Le succès est tel qu’une suite verra le jour en 2014, et d’autres comédies horrifiques à base de zombies nazis vont sortir, comme Attack of the Herbals, une comédie horrifique écossaise sortie en 2011. Par la suite, le mythe du soldat zombie nazi va peu à peu décliner. On peut nommer Frankenstein’s Army et ses monstres de foire, mais on sent que l’effet retombe, et les nazis s’envolent vers d’autres cieux.

Désintérêt ou plus d’idées ?

Après la première moitié des années 2010, le trop du zombie nazi ne que très peu réapparaître. Si on peut citer rapidement Zombie Massacre 2 : Reich of the Dead produit par Uwe Boll, on reste dans du bas de gamme et du long-métrage qu’il vaut mieux ne jamais connaître. Pour autant, il y a un petit rebond en 2018 avec Overlord de Julius Avery. Ultra nerveux, laissant à penser à une adaptation du jeu vidéo Wolfenstein, le film va s’amuser avec tous les codes du genre, à savoir le laboratoire de recherches, les zombies indestructibles pour gagner la guerre, et les héros américains qui vont tout faire pour bombarder cet espace. Si le film est très classique, il prend surtout place dans un contexte historique. Ici, le but n’est pas de buter de pauvres hères en rebondissant sur des éléments sombres de notre histoire, mais bien de réécrire l’histoire.

On navigue donc en pleine uchronie, qui va embrasser à bras le corps tous les éléments du genre pour montrer la monstruosité des nazis, et bien évidemment le courage des soldats américains, qui ne sont pas tout blanc dans l’affaire non plus. Le mélange film d’horreur/film de guerre fonctionne bien et permet de réutiliser l’image du zombie nazi que l’on avait perdu depuis un bout de temps. Malheureusement, depuis ce film, c’est le silence radio. Cela vient-il d’un désintérêt des scénaristes, qui estiment que l’époque ne se prête pas à ce genre de « bêtise » ? Ou bien le sujet n’inspire plus, avec ce sentiment que la boucle est bouclée ? Les deux questions se valent, tant il devient complexe de trouver des idées novatrices, autant sur le plan historique qu’horrifique.

Le trope du zombie nazi a donc plusieurs origines. Si au départ, on est plus sur des scientifiques allemands qui transforment des gens en zombie pour faire une nouvelle race de soldats, petit à petit, ce sont les soldats nazis qui sont devenus des morts-vivants, rappel terrifiant d’un conflit pas si lointain. S’amusant de la fascination de l’ésotérisme et de la recherche de l’immortalité par Hitler, les scénaristes ont redoublé d’idées pour tenter de faire des films à la fois horrifiques et comiques. Si on compte beaucoup de nanars dans le lot, permettant alors une sorte de moquerie envers le nazisme, il y a tout de même une paire de petits films sympathiques à côté desquels il serait presque dommage de passer à côté. Bref, aujourd’hui, ce trope n’est plus à la mode, mais peut-être reviendra-t-il envahir nos écrans dans quelques années.

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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