avril 25, 2024

Metro Paris 2033 T.01 – Rive Gauche – Pierre Bordage

Auteur : Pierre Bordage

Editeur : Le Livre de Poche

Genre : Science-Fiction

Résumé :

En 2033, les humains ont été chassés de la surface, désormais inhabitable.
À Paris, les survivants se sont réfugiés dans les profondeurs du métropolitain. Des communautés sont installées au niveau de certaines stations de Rive Gauche, plus ou moins en contact, souvent en conflit ; la surface est crainte parce qu’irradiée ; Rive Droite est un lieu maudit.
Dans les méandres des boyaux de Paris, à défaut de lumière, les émotions sont plus vives, les rancœurs plus tenaces, les haines plus exacerbées.

Avis :

Que l’on officie dans le récit post-apocalyptique ou tout autre sous-genre de la science-fiction, il est particulièrement difficile d’insuffler une tonalité innovante dans un style aux fondamentaux marqués. Au cours des années 2000, Dmitri Gloukhovski entremêle des qualités littéraires évidentes avec un univers oppressant, voire claustrophobique. En l’espace de trois livres, l’auteur russe donne vie à une œuvre sombre et nihiliste sur le devenir de l’humanité après une catastrophe nucléaire. Depuis, cette saga a suscité de nombreuses vocations avec le projet « Univers Métro 2033 » qui comprend plus d’une vingtaine de romans, issus d’écrivains amateurs ou professionnels.

Avec Vers la lumière et Vers les ténèbres, le diptyque d’Andreï Diakov s’immisçait dans le métro de Saint-Pétersbourg. Rive Gauche constitue la première incursion française dans ce monde ravagé par un conflit nucléaire à l’échelle mondiale. En l’occurrence, Pierre Bordage ancre son histoire dans le métro de Paris. Contrairement à son modèle russe, le présent ouvrage se distingue par la période de l’action. En effet, on se situe plusieurs décennies, voire des centaines d’années après le cataclysme. Bien que l’on reste évasif, cela tient aux mutations subies par une frange de la population pour s’acclimater à leur environnement de vie. Ce qui leur vaut d’être ostracisés par leur pair, à tout le moins méprisés.

Les bonds de l’évolution se distinguent aussi par ces créatures qui hantent les tunnels, même si le bestiaire ne constitue pas la principale menace pour les métrolites. En effet, ceux-ci ont beau s’organiser et former une sorte d’écosystème souterrain, les travers de l’homme sont plus vivaces que jamais. Malgré les fondations branlantes d’un nouvel ordre sociétal, l’absence de perspectives et d’espoir conduit à une violence peu commune. La loi du Talion renvoie aux comportements les plus archaïques, notamment à l’égard de la gent féminine. On remarquera toutefois une certaine redondance dans les dangers que doivent affronter les protagonistes, en particulier les femmes.

La grande majorité des hommes qui errent dans les boyaux du métro escomptent simplement violer, dépouiller et, parfois, retirer quelques organes en vue de les revendre au marché noir. Seuls le rapport de force et les intervenants varient. Quant aux concours de circonstances, ils s’avèrent plus ou moins vraisemblables. Assurément la faiblesse du récit qui tend à s’ancrer dans une routine narrative, car ces élans bestiaux s’alternent avec des actes consentis dispensables. Sans que cela paraisse rédhibitoire à la suite des évènements, il en ressort des longueurs ou des atermoiements qui atténuent le sentiment d’immersion du lecteur.

En revanche, la hiérarchie avancée par le pasteur et Élévation s’avère judicieuse. Comme évoqué précédemment, on distingue des luttes de pouvoir, des conflits d’intérêts et des convoitises au gré des stations. Ce qui rend d’autant plus imprévisible le comportement des différents intervenants. On apprécie également cette cohérence géographique, soutenue par une exploitation des espaces variée et bien amenée. On songe, entre autres, à l’appréhension de ces vastes stations qui se connectent les unes aux autres par des tunnels ou des boyaux plus ou moins praticables. À ce titre, certaines séquences se plaisent à jouer sur l’exiguïté du lieu ou l’obscurité environnante.

Au final, Rive gauche est un premier tome convaincant. Avancé comme une trilogie, l’ouvrage de Pierre Bordage assimile parfaitement les qualités et les particularités de Metro 2033. On y retrouve ce cadre hostile, ces ténèbres permanentes, ainsi qu’une tonalité horrifique. Cette dernière tient alors aux scènes explicites où la bestialité des hommes s’exprime avec aveuglement. Ce qui semble faire écho aux tunnels obscurs du sous-sol parisien. On regrette simplement un manque de variation dans les menaces et les péripéties qui atténuent l’effort pour donner vie à ce monde grouillant d’êtres hagards, veules et concupiscents. L’auteur des Guerriers du silence inaugure un cycle sombre, empreint de pessimisme, de souffrance et de désolation.

Note : 14/20

Par Dante

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