avril 20, 2024

Les 7 Vies de Léa – Plongée dans les 90’s

D’Après une Idée de : Charlotte Sanson

Avec Raïka Hazanavicius, Khalil Ben Gharbia, Théo Fernandez, Marguerite Thiam

Pays : France

Nombre d’Episodes : 7

Genre : Drame, Fantastique

Résumé :

Léa déteste sa vie… Elle va en vivre 7. Quand elle tombe sur le corps d’Ismaël, un adolescent disparu trente ans plus tôt, Léa retourne en 1991 et se réveille chaque matin dans le corps d’une personne différente. Pourra-t-elle le sauver ?

Avis :

Parfois, il faut oser aller plus loin que son a priori. On a souvent tendance à réduire les productions françaises à des drames pénibles, ou des shows faits pour les adolescents. Et difficile de contredire cette image, tant certaines séries jouent sur ces codes et ont déçu par le passé. On pourrait en citer une pléthore, et quand on regarde l’affiche des 7 Vies de Léa, on aurait tendance à croire à une énième romance contrariée chez une jeune fille de 17 ans. Pourtant, si on s’accroche à son pitch, on va vite se rendre compte du potentiel de la série, à l’image d’un Para//èles sur Disney+. Si romance il y a, elle est perturbée par un élément fantastique malin, qui flirte constamment avec le policier, et une enquête passionnante au sein des années 90. Ainsi, Les 7 Vies de Léa gratte plus loin que les séries pour ados françaises.

Pourtant, la série commence comme tant d’autres, avec une jeune fille de 17 ans mal dans sa peau, malheureuse, qui se tente de se gaver d’ecstasy afin de mettre fin à ses jours. Mais l’alcool et le soleil faisant leur office, elle tombe sans prendre les cachets et découvre alors un cadavre avec un bracelet. Le démarrage, avec la voix off de l’héroïne, présente déjà un personnage complexe, qui trouve ses démons dans la relation tumultueuse avec ses parents et une absence de vision dans le futur. Une jeunesse désenchantée qui ne trouve de réconfort que dans les excès. On va vite se rapprocher de Léa de par son fort caractère, mais aussi de par ses relations qui ont toute une histoire, un background. A commencer par sa meilleure amie, handicapée et gay, qui est un rayon de soleil pour elle.

Jusque-là, point de surprise, notamment aussi dans ses parents, un couple qui ne se parle plus, avec un père mutique, et une mère qui semble cacher quelque chose. Bref, Léa est une ado comme presque tous les ados, et l’élément fantastique va faire son apparition lorsqu’elle s’endort. Et se réveille dans la peau d’Ismaël en 1991, le cadavre qu’elle a retrouvée par hasard. A partir de là, la série prend alors tout son sens et offre deux choses essentielles : une prouesse de la part de tous les acteurs et une enquête temporelle qui va rendre l’ensemble très intéressant à suivre. Car si Léa se réveille dans la peau de la victime le premier soir où elle se couche, une semaine avant sa mort, chaque nuit, elle rentre dans le corps d’un autre personnage, lui permettant alors de mener son enquête.

La gestion des différents protagonistes est assez maline. On retrouvera des éléments distillés à chaque épisode afin de reconstruire un puzzle complexe où tout un chacun a ses raisons pour tuer Ismaël. Ainsi, à travers les corps de toutes les personnes susceptibles d’être impliquées, Léa va tenter de trouver l’assassin et de comprendre les motivations de ce dernier. Mais outre l’enquête qui s’avère plaisante à plus d’un titre, et trouve des échos dans le présent, cela va permettre à Léa de découvrir son corps à elle, et qui elle est vraiment. Ainsi, les passages d’un corps de femme à celui d’un homme sont autant de moments intéressants et plutôt bien joués, avec une certaine pudeur. Oui, il est question de sexualité, mais cela est pris sous un prisme intelligent et loin de tout élément putassier. C’est assez rare pour être souligné.

De plus, ces voyages à travers différents corps vont permettre d’aborder une multitude de sujets importants, et qui sont toujours d’actualité, même avec trente ans de plus. Ainsi donc, la série évoquera la place de la femme dans la société, que ce soit de nos jours avec Léa, ou en 1991 avec sa mère jeune, ou encore une disquaire qui derrière son fort caractère cache une femme brimée. On parlera aussi de l’homosexualité, avec le père de Léa, qui bien évidemment, derrière son mutisme contemporain, fait écho à un passé douloureux dans lequel il ne s’assume pas. L’homosexualité sera aussi vu d’un point de vue féminin, avec la meilleure amie de Léa, qui va oser aborder une autre fille. Les sentiments prennent aussi une place importante dans le récit, avec l’amour naissant entre Léa et Ismaël, alors que ce dernier ne la connait pas.

La série arrive à nous toucher avec une relation temporelle impossible, et pourtant, on y trouve des éléments romantiques bien pensés et bien amenés. D’ailleurs, la fin est assez bouleversante en soi, offrant à Léa un choix cornélien, soit se sacrifier en rendant ses parents heureux, soit en ne touchant à un aucun fil du destin pour rester en vie dans le futur. Un choix culotté qui joue sur les temporalités avec simplicité et logique, sans perdre le spectateur. Ce que Léa entreprend dans le passé influe sur son présent, et c’est très bien fichu. On regrettera juste une paire d’épisodes en trop, avec notamment le personnage de la disquaire qui est assez pénible. Mais ce n’est pas grand-chose et cela permet aussi une plongée dans les rêves de gosses qui veulent devenir des rock stars, et subissent des conséquences désastreuses à cause de la drogue et d’un milieu pourri.

Enfin, Les 7 Vies de Léa est une plongée gracieuse dans les gorges du Verdon, mais surtout dans les années 90. Des années insouciantes, rêveuses, ou tout un chacun peut tenter de réaliser ses rêves, ici, former un groupe de rock qui deviendra connu. Les différents éléments distillés sont plaisants, avec notamment une BO dingue, mais aussi des objets cultes, comme l’apparition furtive d’un Livre dont vous êtes le héros, ou encore de la sortie au cinéma de Terminator 2. La reconstitution est fidèle et fait écho à un passé lointain, mais pas tant que ça.

Quant aux acteurs, ils sont tous très bons. Raïka Hazanavicius joue bien l’adolescente rebelle, et tient bien son personnage. Mais on sera très surpris par les qualités de jeu de jeunes jouant dans les années 90, arrivant à varier leur personnage, en fonction de leur vraie personnalité ou de Léa dans leur corps. Tout cela est très fort et il y a une vraie variété. Avec par exemple le caïd du lycée qui devient tout doux lorsque Léa investit son corps, ou encore la jeune bimbo qui cache une famille proche de Calvaire, avec des chasseurs racistes qui feront vivre l’enfer à Ismaël. Là aussi, l’écriture est intelligente, permettant de ressentir de l’empathie pour un personnage pourtant détestable au début, avec une famille consanguine. Le racisme sera d’ailleurs l’un des éléments clés de l’histoire, avec notamment un jeune homme qui se retrouve piégé dans sa famille.

Au final, Les 7 Vies de Léa est une série recommandable à plus d’un titre. Il faut absolument passer outre ses a priori sur les séries françaises et son côté adolescent, pour se laisser bercer par cette enquête fantastique. Maline et intrigante, la série bénéficie d’une écriture juste et fine, ou tout un chacun trouve sa place afin de compléter un puzzle qui prend place dans les années 90. Assez court (7 épisodes pour 7 jours), la série laisse pourtant la porte ouverte à une deuxième saison, malgré, là aussi, une fin culottée qui se suffit à elle-même. Bref, a-t-on vraiment besoin d’une suite ? Seul l’avenir nous le dira, pour un retour vers le passé.

Note : 16/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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