avril 19, 2024

Dédales – Le Chef-d’œuvre qui a Tué son Cinéaste

De : René Manzor

Avec Lambert Wilson, Sylvie Testud ; Frédéric Diefenthal, Michel Duchaussoy

Année : 2003

Pays : France, Belgique

Genre : Policier

Résumé :

Claude est une tueuse schizophrène à personnalités multiples. Le docteur Brennac, psychiatre, et l’inspecteur Matthias mènent une enquête parallèle pour découvrir le mystère qui entoure ses meurtres et la réelle identité de Claude.

Avis :

René Manzor est un cinéaste français qui fut l’un des très beaux espoirx du cinéma de genre français. Il débute dans les années 80. Son premier film, « Le passage« , en 1986 avec Alain Delon, tient une intrigue originale qui installe directement le réalisateur. Par la suite, il fera « 3615 code père Noël« , un thriller dont Hollywood s’inspirera pour faire « Maman, j’ai raté l’avion« . Par la suite, le réalisateur n’assurera pas autant, et s’égarera quelque peu, notamment avec « Un amour de sorcière« .

Pourtant, au début des années 2000, René Manzor fait un très beau retour dans les salles avec un film qui ne cesse de m’obséder depuis que j’ai mis les yeux dessus. Pratiquement inconnu, véritable flop en salle, ce qui précipita René Manzor vers la télévision, « Dédales » est pourtant une bombe, qui lorgne grandement vers le chef-d’œuvre. Thriller parfaitement huilé, mécanique de précision, réinventant et surtout s’appropriant la légende du Minotaure, « Dédales » est une œuvre où chaque détail a son importance, et mieux encore, c’est une œuvre qui ne se livre pas à la première vision. Ainsi, plus on la regarde et plus elle révèle ses secrets et c’est à cause de ça et plus encore, que le film de René Manzor entre assurément dans mes films de chevet, ceux que j’aime regarder encore et encore, et dont presque vingt ans après sa sortie, je ne m’en lasse pas.

Claude est une tueuse en série qui a tué vingt-sept personnes en deux ans. Arrêtée, son cas s’avère extrêmement particulier, car Claude a tous les symptômes de la schizophrénie. Internée dans un hôpital pour malade difficile, les médecins ont trois mois pour statuer sur son cas et découvrir si elle est une simulatrice qui essaie d’échapper à la prison, ou si elle est vraiment malade. Après avoir « épuisé » le Docteur Carl Freud, c’est le Docteur Brennac, médecin « en pause », qui reprend le dossier. En prenant ce dossier, le Docteur Brennac était alors très loin de se douter de la descente aux enfers qu’il allait entreprendre.

La première chose qui vient à l’esprit avec ce film, c’est son écriture et son scénario. « Dédales » est un film qui se déroule sur dans deux timelines, et offre deux enquêtes pour un seul et même personnage. Imaginé par René Manzor, « Dédales » est un film qui d’un côté se passe dans un hôpital psychiatrique, où l’on va suivre, à base d’entretiens, une enquête, celle d’un médecin qui analyse l’une de ses patientes, afin de découvrir si cette dernière est véritablement malade ou juste une simulatrice de génie. Et en parallèle de cela, le film offre une enquête en flashback qui se situe quelques jours avant l’arrestation du personnage de Claude. Précis, d’une richesse folle et d’une grande ambiguïté, René Manzor gère son thriller d’une main de maître, amenant ses deux intrigues à se rencontrer pour livrer une révélation finale assez incroyable.

On restera bluffé par cette histoire, qui en plus de présenter un cas hors norme arrive, comme je le disais plus haut, à s’approprier une légende connue de tous, la légende grecque du Minotaure. Le film de René Manzor se pose lui aussi comme un labyrinthe, dont il faudra s’amuser à découdre sa mécanique pour en trouver sa résolution et ce qui est génial, c’est que toutes, absolument toutes, les solutions sont sur le bout de notre nez et pourtant, on se fait avoir et ça, on le découvre au deuxième visionnage (et tous ceux qui vont suivre après). Car oui, une fois que « Dédales » est découvert, René Manzor fait preuve de génie en nous offrant un tout autre film, lorsqu’on le redécouvre.

Plongée parfaite dans un cerveau malade, « Dédales » distille ses indices, ses révélations, et autres subjectivités, subtilités. Tout est présent à l’écran et c’est assez dingue de voir autant de choses qui nous sont passées sous le nez. On peut même dire que c’est osé, tant si certains indices étaient énormes et mal employés, ils auraient pu casser tout le suspense et les révélations et pourtant…

On ajoutera à cela une réussite totale dans sa réalisation, son montage et son ambiance. « Dédales » est un pur thriller aussi froid que son histoire est glaçante. Là encore, René Manzor utilise parfaitement la légende de Minotaure, nous entraînant à plusieurs stades de son film dans des labyrinthes. L’enquête, ou plutôt les enquêtes, sont de véritables labyrinthes et ces derniers, on les retrouve aussi dans les décors du film. Ainsi, l’hôpital, ses couloirs et ses salles peuvent résonner comme des labyrinthes dont on ne peut s’échapper. En flashbacks, l’enquête emmène dans des labyrinthes, tout comme les cages d’escaliers de l’appartement du tueur ont des allures de labyrinthe, ou plus loin encore, lorsque le film s’aventure dans l’enfance de Claude, là encore, on y trouve des labyrinthes… Bref, René Manzor a parfaitement pensé son film, et sa mise en scène ne cesse d’appuyer et servir son intrigue.

On ajoutera à cela une ambiance des plus sombres, qui prend le temps d’explorer les méandres de son patient pour mieux nous surprendre. Seul le visuel a pris un coup de vieux et le film mériterait une restauration, ce qui malheureusement ne risque pas d’arriver, au vu du four injuste qu’il s’est pris.

« Dédales« , ce sont aussi des acteurs qui sont parfaits en tout point (Et ils adorent ce film, pour en avoir rencontré certains et discuté du film avec eux. Sylvie Testud parle même d’un de ses films préférés dans sa carrière). Si l’on mentionne très volontiers Lambert Wilson, Michel Duchaussoy, ou un très étonnant Frédéric Diefenthal en profiler dépressif et sacrément ravagé, il est vrai que « Dédales« , c’est surtout une Sylvie Testud INCROYABLE dans la peau de cette tueuse en série habitée par toute une mythologie grecque en elle. Grandiose, son interprétation de toutes les facettes de Claude est à tomber par terre. L’actrice passe d’un personnage à l’autre et parfois même sur des plans-séquence, ce qui renforce le trouble de sa maladie ou non.

Très injustement bâché, « Dédales » a précipité la carrière de René Manzor vers autre chose et c’est vraiment dommage, car Manzor est un excellent réalisateur, et son « Dédales » est peut-être la consécration de sa carrière. L’intrigue est folle, la façon de raconter cette histoire est terrible, même encore lorsqu’on revoit le film. Puis le film est tenu par des comédiens incroyables. Bref, plus je revois « Dédales » et plus il s’impose comme un chef-d’œuvre, et derrière ça, plus il me bluffe, car il n’a toujours pas fini, vingt ans plus tard, de me livrer tous ses indices, ses méandres et ses subtilités. INCROYABLE !!!

Note : 20/20

Par Cinéted

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