avril 18, 2024

Maid of Sker

Résumé :

Maid of Sker est un « survival-horror » à la première personne qui se déroule en 1898 dans un hôtel isolé et surtout macabre de Grande-Bretagne. D’après l’histoire vraie d’Elizabeth Williams, vous incarnez Thomas Evans, un musicien se battant pour sauver la femme qu’il aime.

Avis :

En parallèle des licences phares du survival-horror, le genre interpelle particulièrement par ses productions indépendantes. On songe, entre autres, à Perception, Observer ou encore Soma pour n’évoquer que quelques exemples. Si les moyens à l’œuvre sont moins impressionnants que leurs concurrents, on décèle néanmoins des idées intéressantes, le tout soutenu par des atmosphères oppressantes. En règle générale, on distingue une constante à privilégier un point de vue à la première personne. Dans la mesure où la technique est maîtrisée, cela renforce le sentiment d’immersion et rend l’incursion d’autant plus éprouvante, comme le laisse suggérer Maid of Sker.

Bienvenue au Pays de Galles…

Le fait de se pencher sur un projet signé Wales Interactive n’est pourtant pas pour rassurer. En effet, le studio est déjà responsable du piètre Don’t Knock Twice, adaptation vidéoludique du film Baba Yaga. Après quelques itérations en FMV et pour la réalité virtuelle, les développeurs gallois reviennent au survival-horror tout en puisant leur inspiration aux racines du folklore de leur pays. Pour autant, ces intentions initiales ne sont pas suffisamment explorées. L’histoire a beau se montrer intéressante, cet aspect joue de prétexte pour mieux exposer les tenants qui s’investissent dans des références autrement plus connues.

L’intrigue se déroule à la fin du XIXe siècle, dans un cadre aussi désolé qu’abandonné. Avec son passé fastueux, son architecture démesurée, sa structure labyrinthique, l’hôtel Sker n’est pas sans rappeler l’Overlook de Shining. Quant au choix d’intégrer une connotation ésotérique servie par un culte étrange, on se rapproche de récits lovecraftiens. Le mélange n’est pas pour déplaire. Il demeure plutôt bien amené dans la déchéance d’une famille prestigieuse. De même, les rituels s’appuient sur la musique pour développer des croyances religieuses qui prennent de l’ampleur au fil des évènements.

Une intrigue intéressante et mystérieuse, mais linéaire

D’un point de vue narratif, il est recommandé de rechercher et consulter les notes manuscrites, les extraits de journaux et autres documents disséminés çà et là. Ils possèdent en effet une importance notable dans la bonne compréhension des faits. Cela est d’autant plus essentiel que les cut-scenes surviennent de manière sporadique et sont vite expédiées, sans compter qu’elles s’inscrivent dans la continuité des éléments précités. Les gramophones, points de sauvegarde similaires aux machines à écrire de Resident Evil, fournissent aussi de précieux renseignements.

Comme évoqué précédemment, on apprécie cette façon de rapprocher le passé de la famille Williams, de son rapport à l’hôtel et d’une connivence avec des forces obscures. Cependant, cet aspect fait montre d’une progression linéaire et offre peu de marge de manœuvre au joueur en matière de choix. Il y a bien cette possibilité d’explorer à sa guise l’hôtel en débloquant les lieux indiqués. Elle n’en reste pas moins balisée. On peut également regretter un final précipité. Cela tient à une décision binaire qui dépend uniquement de vos trouvailles (les partitions de musique et les cylindres) pour contempler une séquence presque bâclée.

Sans un bruit ?

En ce qui concerne le gameplay, Maid of Sker concilie le classique avec de bonnes idées, même si elles sont sous-exploitées. Cela vaut pour l’attention toute particulière à ne pas faire de bruit à proximité d’un ennemi. Par exemple, ne pas renverser d’objets ou retenir sa respiration. Le premier point implique une course effrénée et ne concerne pas tous les éléments du décor. Pour le second point, il demeure essentiel de bien le gérer, sous peine de suffocation. Là encore, l’approche est inventive, mais en pratique, elle se heurte à une intelligence artificielle capricieuse.

Le fait de rendre les ennemis aveugles et sensibles au moindre son n’est pas pour déplaire. Néanmoins, le résultat dissimule des errances de programmation au lieu de receler une tension supplémentaire pour le joueur. D’ailleurs, celui-ci reste vulnérable. Exception faite du modulateur phonique qui nécessite un emploi parcimonieux, on ne dispose d’aucun moyen de défense. Même si la gestion de la lumière et de l’obscurité s’avère correcte, on fait aussi l’impasse sur l’usage d’une lampe-torche. Quant aux mouvements, ils demeurent rigides.

Un parcours tortueux au sein de l’hôtel Sker

À condition de bien se familiariser avec la topographie des environs et de posséder un bon sens de l’orientation, la progression ne présente pas de difficultés majeures. Les plans, ainsi que la disposition des pièces et des corridors, permettent de trouver plusieurs chemins. Ce qui donne également droit à des incursions ponctuelles dans le système de ventilation. Il convient aussi de bien examiner le comportement des ennemis afin d’assimiler les situations à risques et celles où l’on peut passer à proximité sans danger.

Côté énigme, on reste dans un registre classique pour déverrouiller des portes ou des zones inaccessibles. Les clefs avec une effigie particulière sont aisément identifiables. À quelques exceptions prêtes, les « puzzles » ne requièrent qu’un sens de l’observation basique pour parvenir à les déjouer. Quant aux séquences où l’on joue du piano, il n’est nul besoin d’avoir des connaissances en solfège. Pour cet aspect, Maid of Sker se réapproprie les fondamentaux du genre sans fulgurance ni originalité.

Vous envisagez un long séjour parmi nous ?

Pour la durée de vie, il faut prévoir environ 5 heures de jeu pour boucler l’aventure. On distingue plusieurs niveaux de difficulté qui permettent de relever le défi avec des ennemis davantage retors, ainsi qu’un nombre de sauvegardes limité. Idéal pour accroître la tension et renforcer le sentiment d’appréhension à chaque recoin. Cela sans compter sur une mort qui impose de devoir recommencer une partie depuis le début.

Les développeurs ont également pensé aux joueurs qui souhaitent uniquement profiter de l’histoire et de l’ambiance générale avec le mode « tranquille ». Celui-ci s’apparente à un simulateur de marche. La rejouabilité tient donc essentiellement à rehausser le challenge. On peut aussi évoquer plusieurs items et secrets à dénicher dans les recoins de l’hôtel Sker. On a donc droit à un contenu correct, dans la moyenne du genre et des productions indépendantes.

En conclusion…

Au final, Maid of Sker s’avance comme un honnête survival-horror. On aime particulièrement l’atmosphère qui offre une véritable singularité à une histoire qui s’appuie sur de prestigieuses références. Le développement d’un culte qui s’inspire très librement du folklore gallois n’est pas pour déplaire, même s’il avait été appréciable d’approfondir le sujet. Si le jeu de Wales Interactive n’est pas foncièrement effrayant ou oppressant, il distille un parfum glauque qui tient autant à la déliquescence des lieux qu’à l’errance de ses pauvres quidams.

Ces derniers constituent néanmoins l’un des points faibles du titre. La faute à une intelligence artificielle aléatoire, voire capricieuse. Dommage, car l’idée de concentrer le gameplay sur la perception des sons et des bruits est intéressante dans la manière d’appréhender les lieux. Pour peu que l’on ne s’égare pas, la difficulté demeure bien dosée. Dans cette optique, les allers-retours sont réduits au strict minimum si l’on parvient à se repérer dans ce dédale. Il en ressort une incursion horrifique sympathique à la prise de risques modérée et néanmoins appréciable pour se distinguer de projets similaires.

Note : 14/20

Par Dante

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.