avril 24, 2024

The Coma – Recut

Résumé :

Arpentez de nouveau les couloirs sombres de Sehwa High dans cette version remasterisée de ce classique du jeu d’horreur coréen devenu culte. Vous incarnez Youngho, un étudiant coréen qui se retrouve coincé malgré lui dans les couloirs terrifiants de son lycée.

Avis :

En Corée du Sud, le jeu vidéo se distingue surtout par ses tournois e-sport, notamment sur Starcraft et World of Warcraft. Pour donner une idée de l’ampleur du phénomène, les matchs sont suivis avec autant d’attention que le foot dans nos contrées. C’est dire l’engouement généré autour de cette discipline qui frôle l’obsession. Il n’y a qu’à constater le nombre d’actions réalisées à la minute par les meilleurs joueurs. Dans le domaine vidéoludique, les productions coréennes sont plus discrètes. En général, il s’agit de projets indépendants des gros studios, comme l’atteste Cyphers ou White Day – A Labyrinth Named School. À l’instar de ce dernier, The Coma : Recut s’avance dans le survival horror à la sauce asiatique.

Dans ses premiers instants, le titre de Devespresso Games s’attarde sur l’extrême compétitivité du système scolaire coréen. L’exigence et la pression qui pèsent sur les étudiants, ainsi que leur classement périodique leur demande le meilleur avec une constance difficile à soutenir. De quoi faire pâlir le modèle occidental… Pour les cinéphiles, le sujet et le principe évoquent Death Bell, film horrifique qui lorgnait du côté de Saw et Battle Royale pour étayer son propos sur ces pratiques. Le contexte est assez peu exploité et relativement méconnu en France pour s’y intéresser. Le ton donne lieu à une mise en condition convaincante, voire dépaysante dans les problématiques sociétales que l’intrigue aborde.

On distingue une direction artistique proche des Visual Novels nippons de type Ace Attorney ou School Days. L’usage d’une 2D inspirée pour masquer des moyens modestes évite un aspect désuet trop prononcé. Pour autant, le jeu s’écarte très vite du genre par une narration moins prépondérante et un panel de personnages restreints et, finalement, peu présents au cours de l’aventure. Malgré l’entame et quelques dialogues çà et là, l’accent est clairement mis sur l’isolement et le sentiment de vulnérabilité de Youngho, geek dans l’âme et « looser » aux yeux des élèves les plus populaires. Les poncifs sont de circonstance, mais dépeints avec une évidente légèreté.

À la manière d’un cauchemar éveillé, on se retrouve plongé au cœur du lycée à la nuit tombée. Le cadre change radicalement, tout comme le caractère de certains intervenants. L’objectif est de s’en échapper en déjouant de multiples pièges. On ne dispose d’aucun moyen de défense si ce n’est d’éteindre sa lampe-torche et de trouver une cachette dans un placard ou dans les toilettes. Cela n’a rien de très glorieux et le côté pleutre du personnage est souvent mis en avant, parfois sur le ton de l’humour ou de ses pathétiques tentatives d’approche auprès de la gent féminine. De fait, on reste constamment sur le qui-vive, surtout quand on prend conscience que les irruptions des ennemis sont aléatoires.

Il faut également veiller à ne pas épuiser sa jauge d’endurance en courant. Il existe bien des items pour la régénérer ou encore la préserver pendant un temps imparti, mais il est recommandé de les économiser, et ce, en dépit d’un inventaire avec des emplacements très limités. Tout comme la nécessité de se cacher, le fait d’enquêter dans un lieu désert et inquiétant rappelle Clock Tower, excellent survival horror. Qu’il s’agisse de l’ambiance ou du gameplay, on dénote plusieurs occurrences entre les deux titres. On peut néanmoins regretter un aspect labyrinthique exacerbé sur les trois zones disponibles. Une architecture qui oblige le joueur à effectuer de nombreux allers-retours.

Certes, cela encourage à l’exploration, principalement pour découvrir toutes les notes. Essentiel pour apprécier toutes les subtilités de l’intrigue et celles de la vie scolaire de l’établissement. Toutefois, on se retrouve avec une progression en dent-de-scie qui impose une quête aux objets aussi redondante qu’alambiquée. Pour débloquer une zone, il convient de remplir une demande d’un tiers qui, en retour, exige la remise d’un objet, lui-même doit faire l’objet d’une recherche approfondie pour l’obtenir. Ce système à l’ancienne n’est pas forcément déplaisant, mais on aurait aimé une évolution plus naturelle s’appuyant surtout sur un danger latent et non sur le symptôme de la « maison qui rend fou ».

De même, il n’est pas toujours évident de savoir où se rendre. Certains objectifs sont clairement dépeints avec un point d’interrogation jaune sur la carte, tandis que d’autres nécessitent une fouille plus poussée des classes et autres lieux de vie de l’école. On a souvent l’impression de réitérer les mêmes actions, voire de perdre son temps. Si le jeu n’est pas foncièrement difficile, quelques énigmes ne sont pas très bien agencées. Par exemple, il aurait été plus judicieux de placer la flûte en salle de musique et non dans le laboratoire de biologie. De même, à quel moment pense-t-on chercher la clef du bureau du principal dans l’infirmerie ?

Et les repères géographiques nécessitent une bonne mémorisation quand l’environnement s’affranchit d’une orientation classique, notamment en fin de partie où l’on emprunte des raccourcis pour atteindre des zones inaccessibles. Concrètement, ces éléments concourent à rallonger de manière artificielle la durée de vie. Pour une première incursion, l’aventure, qui ne devrait pas excéder les trois heures, avoisine généralement les cinq heures. Il faut bien sûr prendre en considération les impasses dans lesquelles on s’engouffre ou les attaques inopinées. Mais tout cela tient surtout à une méconnaissance des lieux plutôt qu’à la difficulté. Question rejouabilité, on peut compter sur la recherche des notes et la découverte de quatre fins différentes.

Au final, The Coma : Recut est un survival horror à l’ancienne dans le sens où l’on se sent démuni face au danger. Cette exposition permanente et la fragilité du personnage développent une atmosphère oppressante qui joue de constance pour entretenir la tension. L’intrigue et les perspectives psychologiques alambiquées qui en découlent sont assez efficaces dans leurs mécaniques. Pour autant, on regrette une progression qui manque de cohérence et privilégie les allers-retours à une avancée plus naturelle. Peut-être est-ce là le fondement du titre qui s’appuie sur une perception incertaine de l’environnement. Toujours est-il qu’on a l’impression que le procédé fait office de remplissage pour prolonger l’aventure. En somme, une thématique et une atmosphère intéressantes si vous souhaitez découvrir un croisement entre Death Bell et Clock Tower, mais une mise en pratique bancale et fluctuante dans son évolution.

N.B. Pour ceux et celles qui s’interrogent sur la différence avec The Coma : Cutting Glass, il n’y en a aucune si ce n’est un très léger lifting des graphismes et le travail d’adaptation du gameplay à une manette.

Note : 13/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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