décembre 11, 2024

Salaam Bombay!

De : Mira Nair

Avec Shafiq Syed, Irrfan Khan, Raghubir Yadav, Anita Kanwar

Année : 1988

Pays : Inde, Angleterre, France

Genre : Drame

Résumé :

Devant une somme de 500 roupies à sa mère, Krishna, un jeune garçon, travaille dans un cirque ambulant. Cependant, les forains sont partis sans lui ; il se retrouve alors à Bombay, où il devient porteur de thé et en hérite le nom : « Chaipu ».

Avis :

Mira Nair est une réalisatrice indienne qui a su se faire une très belle place dans le paysage du cinéma international. Après des documentaires qui s’arrêtaient sur certains problèmes qu’on trouve dans la société indienne, elle passe à la fiction avec « Salaam Bombay !« , film sur lequel on va s’arrêter aujourd’hui. Le film obtiendra La Caméra d’Or au festival de Cannes et ira même jusqu’aux Oscar pour le meilleur film en langue étrangère. Depuis cette première fiction, Mira Nair est donc partagée entre l’Inde et les États-Unis.

Présenté en 1988, « Salaam Bombay ! » est un film qui a fait son effet et qui demeure, plus de trente ans après sa sortie, une œuvre intense, aussi belle et immersive qu’elle est terrible, dramatique et intéressante. Filmant l’errance et la survie d’un petit garçon dans les rues surpeuplées de Bombay, Mira Nair livre un film fort, qui soulève tout un tas de questions intéressantes et importantes qui sont aujourd’hui encore d’actualité. Un premier film réaliste, qui laisse entrevoir déjà une grande réalisatrice qui, entre sourires et larmes, entre drame et vérité, brosse un portrait poignant sans misérabilisme et avec même un soupçon de luminosité.

Krishna, dix ans à peine, est un petit garçon qui travaille dans un cirque itinérant. Or, un matin, il est oublié. Ne sachant où aller, le petit garçon, qui a une dette envers sa famille, décide d’aller à Bombay pour y travailler et récolter les cinq-cents roupies qu’il doit afin de pouvoir rentrer chez lui auprès de sa mère.

À la fin des années 70 et au début des années 80, Mira Nair, alors âgée d’une vingtaine d’années, décide de devenir cinéaste et elle commence par du documentaire. Pour ses premiers films, elle décide de filmer les problèmes des rues, la délinquance, la prostitution, la pauvreté, et la débrouille et c’est le sujet qu’elle choisira alors pour son premier film de fiction. L’Inde, enfin le cinéma indien, est connu à l’époque pour son cinéma Bollywoodien, pour ses films en costumes et ses comédies musicales et ce n’est pas du tout ce que Mira Nair a envie de faire et de montrer. Non, si on devait « classer » le cinéma de Mira Nair, ou du moins ce premier film, alors on pourrait dire de manière assez facile, que la cinéaste peut se poser comme une version féminine de Ken Loach.

« Salaam Bombay !« , c’est l’errance et la survie d’un petit garçon lâché dans les rues de Bombay, et même si l’on pourrait regretter de ne pas vraiment avoir d’intrigue à proprement parlé, c’est aussi dans un autre sens, ce qui va faire le charme et la vérité du film de Mira Nair. « Salaam Bombay !« , c’est une plongée terrible et totalement immersive dans une Inde qu’on connaît peu et qu’on ne voit quasi jamais. Tenu par des acteurs non-professionnels, « Salaam Bombay ! » est une tranche de vie qui sonne si juste, si véridique, qu’on aurait l’impression que Mira Nair n’a fait que suivre ce petit garçon, filmant ce qui peut bien lui arriver. Il y a dans ce film un souci de réalisme qui est poussé très loin. Mais qu’on ne s’y trompe pas, « Salaam Bombay ! » reste une œuvre de cinéma et ne résonne pas comme un documentaire. Non, le film jouit d’une très belle mise en scène, et la réalisatrice, au fin fond de la misère et de la pauvreté, nous réserve aussi de superbes moments, entre innocence, joie et naïveté. Même si c’est souvent sombre, souvent dramatique, et en permanence touchant, la réalisatrice évite le misérabilisme et laisse même entrevoir (du moins pour ses personnages), un peu d’espoir au final, ce qui rend son œuvre encore plus touchante.

Intéressant, « Salaam Bombay ! » l’est aussi à plus d’un titre, car derrière la misère, derrière tous les sujets que le film aborde, les enfants des rues, le travail des enfants, la lutte des classes, le tourisme, la surpopulation, la prostitution, le manque d’éducation, la prise en charge d’enfants par l’état… Bref, le film est très riche. Donc derrière tout ça, il y a cette image de l’Inde qui est aussi sublime que dramatique. « Salaam Bombay !« , c’est aussi un film qui montre l’Inde avec ses traditions, c’est un film qui montre l’opulence de ses rues, de ses quartiers, Mira Nair immerge tellement son film qu’on pourrait presque sentir les odeurs de sa cuisine ou de son thé.

Magnifique pour sa vérité et tragique pour sa vérité, ce premier film signé Mira Nair est tristement une petite merveille. Avec ce film, Mira Nair fascine, bouleverse et révolte. Loin des paillettes et des couleurs de Bollywood, « Salaam Bombay ! » est l’autre côté du miroir, et suivre ce petit garçon, divinement tenu par Shafiq Syed, dans les rues de la ville, dans sa dureté, dans sa survie, mais aussi dans ses moments plus légers, ne laisse pas indifférent. Mira Nair, avec ce premier film, pose d’entrée de jeu une très belle œuvre dans sa filmographie. Bref, « Salaam Bombay ! » est à voir pour sûr !

Note : 18/20

Par Cinéted

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