De : Patrick Brice
Avec Patrick Brice, Mark Duplass
Année : 2014
Pays : Etats-Unis
Genre : Horreur
Résumé :
Un caméraman accepte de se rendre dans une montagne isolée pour un travail bien payé. Mais son employeur est un peu plus étrange que ce à quoi il s’attendait…
Avis :
Mark Duplass est un personnage assez intéressant et incongru dans l’industrie cinématographique américaine. Il commence sa carrière en 2005 autour du film The Puffy Chair pour lequel il sera réalisateur, acteur et producteur. Comédie dramatique indépendante et inédite de par chez nous, l’acteur/réalisateur/producteur va continuer son petit bonhomme de chemin en enfilant les trois casquettes, même si c’est devant la caméra qu’il sera le plus à l’aise. Aujourd’hui, Mark Duplass a joué dans Zero Dark Thirty de Kathryn Bigelow ou encore Scandale de Jay Roach et il s’en va parfois dans la série ou encore dans le bis étrange qui lorgne vers l’horreur indé. Et c’est ainsi que, tout doucement, on en arrive à parler de Creep. Rien à voir avec l’excellent film de Christopher Smith, ce Creep-là est une production Mark Duplass qui permet à son ami Patrick Brice de faire son premier film et de jouer aussi dedans. Found-footage au pitch simpliste, Creep peut attirer par son aspect malin de la mise en scène mais en l’état, il reste un très mauvais film où l’on s’ennuie terriblement.
L’histoire est limpide. Un type arrive dans une maison pour filmer le quotidien d’un client qui va mourir d’une tumeur et dont la femme est enceinte. Il décide alors d’enregistrer sa vie pour son futur fils afin que celui-ci le connaisse un peu. Mais très rapidement, on va se rendre compte que ce type est vraiment bizarre, ayant un comportement enfantin et nous mettant terriblement mal à l’aise sur certaines situations. Bien évidemment, on va avoir plusieurs retournements de situation pour nous expliquer qui est ce type et ce qu’il veut vraiment à ce pauvre caméraman totalement démuni. Creep est un found-footage classique qui ne renouvèle en rien le genre, notamment sur son scénario. C’est relativement plat et le film ne veut rien dénoncer, si ce n’est la solitude de deux pauvres types qui vont se retrouver, se manipuler et se faire peur. Ne jouant quasiment jamais franc-jeu avec nous, Patrick Brice n’arrive pas à rendre cette mésaventure passionnante et s’obstine à filmer durant les trois quarts du film un type étrange qui s’amuse à faire peur en faisant des « bouh ! » ou encore mettant un masque de loup. C’est peu de chose et on sent vite le vide abyssal de l’écriture.
Une écriture qui se retrouve faiblarde sur la caractérisation des personnages. Un exploit de rendre lisse uniquement deux personnages qui se côtoient et se font des câlins dans une roche en forme de cœur. D’un côté, on a le réalisateur qui tombe comme un bleu dans un piège et qui n’a aucune personnalité. De l’autre, on a un psychopathe en puissance que l’on va vite découvrir tant il est bizarre et peut créer le malaise. Pour le reste, on n’aura rien. Pas de background, pas de réelle évolution, pas de message à faire passer pour dénoncer quoi que ce soit. C’est banal et c’est très ennuyeux. Alors le film essaye, parfois de glisser, peut-être, un message très cryptique sur l’homosexualité. En effet, le psychopathe (joué donc par Mark Duplass) est très tactile avec le caméraman, l’enlaçant, l’embrassant et le forçant à rester chez lui. Il lui grave même sur la roche leurs initiales dans un cœur et il lui offre même un pendentif en forme de cœur avec leurs photos à l’intérieur. Mais le problème, c’est que le film n’en fait absolument rien, si ce n’est un rejet par le caméraman, non pas par homophobie, mais par peur d’un type malsain qui sait où il habite et qui semble dangereux. A quoi bon alors créer des relations ambiguës si c’est pour ne rien en faire derrière ?
Relativement plat dans son histoire et son déroulé, très attendu sur son final et dépeignant deux personnages sans aucune épaisseur, la seule chose qui fait sortir Creep de l’embarras, c’est son montage et son choix de narration. Si l’aspect found-footage est, comme quasiment toujours, insupportable, le film gagne des galons sur sa façon d’exposer l’histoire. En premier lieu, on n’a le point de vue du réalisateur qui filme le taré, puis au bout d’un moment, lorsqu’il s’évade de la maison, la caméra se recule et on voit que ce réalisateur nous a montré en fait l’écran de son ordinateur à travers sa caméra pour nous raconter l’histoire et ce qui se passe dans son présent, c’est-à-dire une sorte de harcèlement. Ainsi donc, Creep est un film dans le film. Mais cela va plus loin lorsqu’au bout d’un moment, la caméra se recule une deuxième fois pour nous montrer que cette fois-ci, c’est le psychopathe qui tient l’appareil. En faisant comme ça, on obtient un film dans le film dans le film et c’est peut-être pour cela que Creep a eu son petit succès. Mais cela reste juste de la mise en scène et clairement, ça n’apporte pas grand-chose au fond du problème, l’ennui et le fait qu’il ne se passe rien dans le métrage. Si on est parfois mal à l’aise quant à la folie du type, on reste très circonspect sur une peur totalement absente du métrage et une montée en tension aussi puissante qu’un télésiège à l’arrêt. Et nous de chanter « étoile des neiges »…
Au final, Creep de Patrick Brice est un mauvais film d’horreur et même un mauvais film tout court. Voulant jouer au plus malin avec un montage qui se veut astucieux, le film se plombe tout seul avec un scénario au rabais, des situations banales et une approche que l’on pourrait croire homosexuelle mais qui n’apporte strictement rien au récit. En bref, Creep est un found-footage mal fichu, qui ne fait pas peur et qui, chose étonnante, a droit à une suite. Il faut croire que Mark Duplass se fait chier.
Note : 03/20
Par AqME