De : Gus Van Sant
Avec River Phoenix, Keanu Reeves, James Russo, William Richert
Année : 1992
Pays : Etats-Unis
Genre : Drame
Résumé :
Mike et Scott vivent parmi les marginaux de Portland, partageant leur solitude, les drogues et les hommes ou femmes à qui ils se vendent. Mike est introverti, homo et souffre de crises de narcolepsie. Enfant abandonné, il est obsédé par l’idée de retrouver sa mère. Scott, lui, est le fils du maire de la ville, un homme qu’il déteste et qui cherche à lui imposer un avenir tout tracé. Mike ne cache pas son amour à Scott, qui se refuse pourtant à lui. Ensemble, ils prennent la route pour retrouver la mère de Mike. Le voyage les mène en Idaho, puis au-delà, bouleversant leurs valeurs mutuelles…
Avis :
Gus Van Sant est un réalisateur qu’on ne présente plus aujourd’hui, même si ces derniers films ont tendance à moins convaincre. Mais avant d’être le réalisateur connu et reconnu qu’il est, il a bien fallu que Gus Van Sant commence quelque part et on peut dire que sa carrière commence vraiment ici. Après avoir passé les années 80 à se faire la main en réalisant beaucoup de courts-métrages, Gus Van Sant a réalisé son premier film en 1988, l’inconnu « Junior« . C’est avec son second film que le metteur en scène commence à se faire remarquer. Et enfin, après « Drugstore Cowboy« , deux ans plus tard, Gus Van Sant confirme les remarques faites quelques années plus tôt et il s’installe définitivement avec son troisième métrage, le culte « My Own Private Idaho« .
Réunissant River Phoenix et Keanu Reeves à l’écran, avec ce troisième film, Gus Van Sant nous entraîne dans un film qui peint le portrait d’une jeunesse égarée. Au menu, drogues, homosexualité, liberté, recherche de soi, narcolepsie, prostitution et quelques voyages à moto. Touchant mais inégal, joli mais vieillissant, « My Own Private Idaho » demeure un moment de cinéma intéressant qui reste très marqué par son époque.
Mike et Scott sont deux amis qui vivent en marge de la société. Se prostituant aux hommes et aux femmes qui veulent bien payer, les deux jeunes hommes vivent au jour le jour. Mike est un enfant abandonné qui n’a qu’une obsession, retrouver sa mère. Scott, lui, est fils de bonne famille, il est même le fils du maire de Portland, mais il a bien du mal à supporter ce milieu. Les deux garçons, un jour, décident de partir à la recherche de la mère de Mike…
Excentricité et naïveté, espoir et désespoir, original et parfois expérimental, « My Own Private Idaho » est assurément un film de Gus Van Sant, ça se voit et ça se ressent à tout instant. Pour son troisième long-métrage, le réalisateur américain a décidé de poser sa caméra au plus près d’une jeunesse oubliée et surtout une jeunesse qui se cherche.
Tenant des sujets forts, Gus Van Sant nous entraîne dans un film qui dresse un portrait qu’on n’a pas vraiment l’habitude de voir. Un portrait profond, injuste, cruel parfois et souvent touchant. Pour donner vie à ce portrait, ou plutôt ses portraits, le cinéaste s’est entouré d’excellents acteurs, River Phoenix et Keanu Reeves et le moins que l’on puisse dire, c’est que les deux comédiens assurent une grande partie de l’intérêt qu’on porte au film. Car oui, si « My Own Private Idaho » a de très bons sujets (prostitution, survie, marginalité, politique, homosexualité, addiction, confiance, famille, amitié, amour), si le réalisateur pose un regard aussi dur que tendre sur ses jeunes gens, si le film en lui-même nous touchera par la recherche de soi qu’il offre, par son côté road trip, ou encore par la dimension sociale et surtout l’impasse qu’il décrit avec caractère, il est vrai que le film de Gus Van Sant reste assez complexe d’accès, dans le sens où le réalisateur débordant d’idées offre un film hybride.
Un film qui a tendance à partir dans tous les sens et bien souvent, on peut s’y sentir perdu. De plus, tout n’est pas forcément bien amené et sur tout l’ensemble le film apparaît assez décousu. Gus Van Sant veut parler de tellement de choses en même temps, il a une telle envie de brosser ces portraits, il a une telle envie de parler de ces gens et il a une telle envie de cinéma, qu’il finit parfois par nous perdre. Toutes ces envies font dans un sens la richesse et l’originalité de « My Own Private Idaho« , mais de l’autre, elles font aussi ses faiblesses et ses défauts. Même si l’on est souvent pris et touché par cette histoire, parfois on se demande où le réalisateur veut en venir et quand il nous rattrape, il a tendance à nous perdre, créant des longueurs, s’attardant sur des éléments, des descriptions qui ne sont pas forcément nécessaires et comme le film a quelque peu vieilli, l’un dans l’autre, « My Own Private Idaho » fascine, intéresse et ennuie parfois.
« My Own Private Idaho« , comme je le disais, c’est un casting passionnant. C’est un casting qui est capable de nous faire oublier les faiblesses de ce scénario ou de la mise en scène. Ici, on retrouve un River Phoenix incroyable, qui crève littéralement l’écran. Beau, puissant, absolu, l’acteur emporte ce rôle à bras le corps et l’on ne peut qu’être touché. Face lui, on trouve un tout jeune Keanu Reeves ô combien talentueux qui tient un rôle assez trouble et ambigu finalement. On pourra aussi compter sur William Richert qui trouve un rôle assez fascinant et ça fait toujours plaisir de voir à l’écran Udo Kier.
« My Own Private Idaho » est donc un film intéressant. Intéressant dans son fond et le portrait qu’il fait de cette jeunesse paumée, tout comme il est aussi intéressant dans sa forme, qui oscille entre cinéma « normal » et film expérimental. Et si le film a des longueurs, s’il a vieilli et qu’il respire les années 90 à plein nez et enfin, s’il a ses défauts, sur l’ensemble, on passe un bon moment de cinéma et je ne regrette en aucun cas de m’y être arrêté.
Note : 13/20
Par Cinéted