Titre Original : Nan Fang Che Zhan De Ju Hui
De : Diao Yinan
Avec Hu Ge, Gwei Lun Mei, Liao Fan, Wan Qian
Année : 2019
Pays : Chine
Genre : Thriller
Résumé :
Un chef de gang en quête de rédemption et une prostituée prête à tout pour recouvrer sa liberté se retrouvent au cœur d’une chasse à l’homme. Ensemble, ils décident de jouer une dernière fois avec leur destin.
Avis :
Diao Yinan est l’un des réalisateurs chinois les plus ambitieux du moment. Diao Yinan tourne peu, prenant le temps d’écrire lui-même ses scénarios. Son premier film est sorti en 2003 et depuis, l’homme n’a réalisé que quatre films. Quatre films qui se sont tous fait remarquer d’une façon ou d’une autre. On n’avait plus de nouvelles de Diao Yinan depuis 2014 et son « Black Coal » qui fut une déception.
Après cinq années de silence donc, voici que Diao Yinan revient aux affaires avec un thriller qui s’annonçait sombre et intense, et si ce « … lac aux oies sauvages » est assurément sombre et prenant, il est aussi une petite déception, tant il est parfois bien trop auteuriste, s’aventurant sur les sentiers de la contemplation, dans des connections entre personnages qu’on a bien du mal à cerner. L’ennui en son milieu sera alors au rendez-vous, mais bien heureusement, Diao Yinan rattrape le tir avec un final violent, tendu et tout simplement extraordinaire.
Zhou Zenong est un chef de gang, et un soir, alors qu’il montait en ville avec ses associés pour y voler des motos, il tombe dans un piège. Réussissant à s’en sortir, en fuyant, il tue malencontreusement un policier. Dès lors, Zhou est l’homme à attraper mort ou vif, il y a d’ailleurs une récompense offerte de trois cent mille Yuans pour quiconque donnait des informations pour sa capture. Voyant qu’il pourrait difficilement s’en sortir, Zhou tente un dernier coup avec l’aide de Liu une prostituée, prête à tout pour sortir de sa condition.
Une affiche intrigante, une bande-annonce sombre à souhait et une intrigue qui envoyait du lourd, le nouveau film de Diao Yinan s’annonçait comme un petit bijou de cinéma et finalement, même si la séance fut intense, il est vrai que « Le lac aux oies sauvages » laisse un sentiment mitigé au final. Le souci principal qui s’élève du film de Diao Yinan, c’est son milieu, car si l’ouverture est incroyable et son final puissant, il est vrai qu’entre les deux, le réalisateur s’enlise quelque peu dans des déambulations qui, si elles sont filmées avec une esthétique hors normes, restent confuses et elles arrivent même à nous perdre, tant les tenants et les aboutissants finissent par être floutés. Sur les deux heures de film, on se retrouve avec une bonne moitié qui nous laisse un sentiment mitigé, tant les sentiments contradictoires se bousculent en nous. D’un côté il y a l’ennui et la sensation d’être perdu, mais de l’autre, il y a quelque chose qui nous envoute tout du long, quelque chose qui nous fascine, tant Diao Yinan filme les couleurs de cette nuit avec une beauté incroyable.
Face à l’ennui de ce ventre mou, on mentionnera un sens de l’action remarquable qu’a le réalisateur, tout comme le sens de la violence et de l’horreur. Diao Yinan nous offre de sacrés moments de cinéma qui peuvent nous bousculer et au-delà de cela, il nous entraîne dans un film souvent intense et immersif, et encore plus surprenant, tant son esthétisme y est puissant.
Si souvent « la romance » est ennuyante, il faut mentionner l’incroyable jeu du chat et de la souris qui est mis en place ici. « Le lac aux oies sauvages« , c’est un film qui nous entraîne très souvent dans un labyrinthe fascinant, dans les rues d’une ville chinoise et à travers ces rues et ce qui s’y passe, Diao Yinan en profite pour filmer la vie chinoise loin des grandes villes. De ce film noir très esthétique, il y aura presque un côté documentaire qui s’en dégage, tant le réalisateur laisse une impression d’avoir tout pris sur le vif. On mentionnera aussi la tension palpable que Diao Yinan met en place petit à petit. Une tension qui arrive à s’imposer peu à peu face à l’ennui de son milieu de film, car une fois que le réalisateur nous sort des errances de ses personnages, « Le lac aux oies sauvages » s’impose comme un film marquant et même touchant, de par la peinture qu’il fait de ces deux personnages perdus. Deux personnages superbement tenus par Hu Ge et Gwei Lun Mei qui sont magnifiques et puissants. On regrettera cependant que le film ne développe pas plus de personnages que ces deux-là. C’est bien simple, la ville elle-même est un personnage plus présent et fascinant que tous les petits rôles qui se succèdent les uns à la suite des autres. Après, comme je le disais, le film étant assez confus parfois, les personnages secondaires finissent par en pâtir, car bien souvent, on ne les comprend pas vraiment.
On ressort donc mitigé du nouveau film de Diao Yinan. D’un côté le film est incroyable, visuellement c’est une claque, dans sa tension, le film est quasi parfait et l’on se plait à se laisser prendre dans cette ambiance, dans cette histoire, et il est clair que « Le lac aux oies sauvages » sait se faire marquant, mais face à tous ces bons arguments, il n’en demeure pas moins que bien souvent, on se sent largué par cette histoire et quand le film s’aventure dans les errances de ces deux personnages (ô combien sublimes pourtant), « Le lac aux oies sauvages » traîne beaucoup trop en longueur. Peut-être qu’un second visionnage pourrait rectifier le tir, car malgré l’ennui ressenti, ce n’est pas rédhibitoire et on a envie de s’aventurer de nouveau dans cette histoire, dans ces rues, dans cette nuit colorée… Bref, avec ses défauts et ses qualités, dans tous les cas, « Le lac aux oies sauvages » mérite bien qu’on s’y attarde.
Note : 14/20
Par Cinéted