avril 20, 2024

Un(e)secte – Maxime Chattam

Auteur : Maxime Chattam

Editeur : Albin Michel

Genre : Thriller

Résumé :

A Los Angeles, un tueur laisse ses victimes à l’état de squelette en seulement quelques heures. Dans le même temps, à New York, un ravisseur s’attaque à de jeunes gens passionnés par l’apocalypse. Atticus Gore et Kat Kordell sont les seuls à pouvoir comprendre ce qui se passe, mais ils manquent de temps.

Avis :

Si l’on ne présente plus un écrivain tel que Maxime Chattam, on peut toujours admirer la qualité de son œuvre. En l’espace de presque 20 ans (et autant de livres), il est parvenu à tisser un portrait réaliste et peu flatteur de notre société. En marge de la saga Autre-Monde et de prises de risque, comme Le Coma des mortels, ses thrillers sont des histoires divertissantes doublées d’une réflexion pleine de pragmatisme sur notre époque et son devenir. Après Le Signal, formidable récit fantastique, l’auteur de la Trilogie du mal et du Diptyque du temps s’attèle à Un(e)secte, un thriller à la lisière du rationnel. Mais n’est-ce pas ce qui constitue son talent ? Jouer sur l’aspect suggestif et envelopper la narration de mystères pour susciter le doute en se basant sur le fameux « Et si… ».

« Et si tous les insectes du monde se mettaient soudainement à communiquer entre eux ? À s’organiser ? […] » pour paraphraser la quatrième de couverture. Un postulat intéressant qui sous-tend un événement cataclysmique où la nature reprend enfin ses droits. Dit comme cela, il est facile de penser à Zoo de James Patterson et Michael Ledwidge. Le propos initial est similaire puisqu’il met en avant la révolte des animaux. En l’occurrence, une biomasse aux proportions incomparables qui balaye l’humanité : les insectes. Au-delà du jeu de mots intrigant du titre, Un(e)secte augure une ambiance apocalyptique teintée de survivalisme, du moins est-ce là l’idée de base que l’on se fait du sujet.

Cependant, l’histoire reste ancrée dans un thriller « classique », dans le sens où l’on suit une enquête policière aux tenants et aux conséquences inconsidérés. La trame emprunte deux cheminements distincts amenés à se recouper tôt ou tard. Afin d’accentuer le contraste entre les deux points de vue, le clivage se retrouve aussi dans la disparité géographique, aux deux extrêmes des États-Unis : Los Angeles et New York. On pourrait également s’attarder sur la nature des affaires respectives (crime et disparation) ou encore la caractérisation des protagonistes et leur statut pour démontrer une parfaite opposition entre chaque partie du récit.

Il existe en effet de nombreuses divergences à la fois pour mener les investigations et pour apprécier leurs conséquences. Néanmoins, on songe surtout à la complémentarité des facettes d’une pièce de monnaie ou le reflet dans un miroir. Ces comparaisons illustrent parfaitement la structure narrative pour développer l’intrigue et le contexte qui en découle d’une manière homogène et pertinente. Par ailleurs, tout n’est pas que contraire. Auréolée d’une atmosphère glauque à souhait, la découverte du quartier de Skid Row à Los Angeles et The Hole à New York dépeint une misère commune, où les laissés-pour-compte croupissent dans bidonvilles et des taudis. Ces lieux ne sont pas que purs fantasmes puisqu’ils existent réellement.

Et derrière l’enquête, on retrouve un discours assez probant sur le modèle de nos sociétés, accablés par les dettes et esclaves du consumérisme. L’aveuglement des masses, la fragilité du système économique, la cupidité des dirigeants… Ces points évoqués çà et là possèdent une résonnance particulière tant dans le récit que dans la réalité. Si cela ne constitue pas un traitement inédit en soit, le fait que l’homme soit son propre instrument de destruction reste également approprié à bien des égards. Sans sombrer dans des élans moralisateurs, la responsabilité de cet état de fait est mise en exergue par des considérations individuelles et collectives.

Au final, Un(e)secte peut déconcerter de prime abord. L’approche n’est pas forcément celle que l’on attend pour développer un tel sujet, a fortiori lorsque celui-ci aime flirter avec le fantastique, voire la science-fiction. Pour ce dernier point, cela tient surtout à des impossibilités scientifiques observées. De même, les insectes intégrés au modus operandi rappellent Maléfices et ses arachnides. En délaissant l’aspect profilage qui a fait son succès, Maxime Chattam s’essaye à d’autres formes d’investigations tout en restant méticuleux dans la description des techniques professionnelles. Alors qu’un roman tel que La Promesse des ténèbres s’enfonce dans les strates de la civilisation pour dépeindre l’avilissement humain, Un(e)secte démontre que celui-ci existe également à la surface. Au-delà de la souffrance que suggèrent les attaques d’insectes, c’est sans doute ce constat qui demeure le plus sinistre au terme de la lecture…

Note : 16/20

Par Dante

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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