avril 16, 2024

C.H.U.D.

De : Douglas Cheek

Avec John Heard, Daniel Stern, Christopher Curry, Kim Greist

Année: 1984

Pays: Etats-Unis

Genre: Horreur

Résumé:

Les égouts de New York, transformés clandestinement en décharge de déchets radioactifs, ont donné naissance à une race de mutants monstrueux: les « CHUD » (Cannibale, Humanoïde, Usurpateur, Dévastateur)…

Avis:

Le nucléaire est un sujet qui fascine beaucoup de monde et qui continuera de fasciner tant qu’il y aura des problèmes et des zones d’ombre avec les centrales. Si aujourd’hui, le nucléaire fait encore parler de lui à travers des séries telles que Chernobyl, il ne faut pas oublier que le sujet fait parler depuis les années 50. Car oui, dès le déclenchement de la bombe nucléaire, la peur s’est installée et n’a pas quitté les cinéastes qui ont trouvé des façons détournées pour parler de cela. On pense bien évidemment au Godzilla de 1954, mais on peut aussi évoquer C.H.U.D., un petit film d’horreur bis de Douglas Cheek et datant de 1984. On se doute bien qu’après le scandale de Three Mile Island à la fin des années 70, le nucléaire allait refaire surface à un moment ou à un autre. Et c’est à travers ce petit film sans prétention que l’on va voir que le spectre des déchets et des radiations hante encore les scénaristes et cinéastes.

Le pitch du film est très simple. Des hommes et des femmes disparaissent aux alentours d’un quartier pauvre de New York. Trois hommes vont alors mener l’enquête, le chef de la police dont sa femme est portée disparue, un photographe presse qui s’intéresse aux laissés pour compte qui vivent dans les égouts et un sans-abri qui participe à la soupe populaire et qui voit ses amis disparaître jour après jour. Ce trio va alors découvrir que des monstres vivent dans les égouts et qu’une forte radioactivité réside dans les sous-sols. C’est limpide et on pourrait presque croire à un vieux nanar des années 80, mais C.H.U.D. est bien plus que cela, puisqu’il va utiliser le concept du nucléaire, et du stockage des déchets, pour livrer un film d’horreur à la fois distrayant et ayant du fond. Une chose rare de nos jours, où tous les films d’horreur ne présentent plus que des jumpscares sans fond et sans autre ambition que de faire sursauter le spectateur. Ici, on parle du nucléaire et le grand méchant n’est pas forcément le mutant cannibale, mais l’homme derrière un projet douteux, qui est prêt à mettre en péril des centaines de vies pour protéger un secret bien gardé. Ainsi donc, l’histoire s’avère plus complexe et va lier trois hommes que pourtant tout oppose.

Parmi ces hommes, on trouve un photographe blasé, plutôt égoïste et qui passe pour un gros connard égocentrique au début du métrage. John Heard est assez épatant dans ce rôle dichotomique, où il doit faire des choix pour son boulot, pour sa femme et pour les sujets qu’il traite. Il sera alors amené dans les sous-sols de la ville pour aider des sans-abris qu’il prend en photo pour éclabousser les médias. On va rapidement faire la connaissance du capitaine de la police, un homme intègre, assez énervant au début car très pugnace, mais on va vite comprendre ses motivations et il va devenir très touchant, s’alliant avec un sans-abri pour aider les pauvres dans les égouts. Là encore, Christopher Curry est exceptionnel dans ce rôle d’homme brisé qui tente malgré tout de sauver la ville. Enfin, on va suivre le Révérend, un sans-abri qui fait la soupe populaire et qui veut aider son prochain. Daniel Stern est relativement bon dans ce rôle et il s’agit du personnage le plus intéressant dans son combat contre les hautes sphères qui vont essayer de le faire taire. Trois personnages qui sont épaulés par des seconds rôles convaincants et un grand méchant qui va vriller sur la fin.

Mais plus globalement, ce qui est réussi dans C.H.U.D. c’est la mise en place des éléments et de l’horreur. Une horreur insidieuse, qui prend d’abord la forme de monstres cannibales pour devenir ensuite encore plus réel avec un humain tout ce qu’il y a de plus normal et des manipulations gouvernementales. Douglas Cheek s’intéresse d’abord à ses personnages, prend son temps pour les construire, les faire évoluer et nous faire ressentir de l’empathie. C’est ce qui manque cruellement aujourd’hui aux films d’horreur, une construction intelligente et une bonne distillation de l’horreur qui permet de rebondir dans le scénario. En présentant ces personnages et en les faisant graviter autour des monstres, le réalisateur assure un lien solide entre eux et le spectateur. Et cela permet par la suite de créer une ambiance anxiogène plus efficace lorsque nos héros vont se balader dans les égouts. On craint pour eux, et chaque dédale devient menaçant. Alors certes, c’est fait trois bouts de ficelle et on voit les affres du temps sur le film, mais globalement, ça marche et on a qu’une envie, c’est que ces trois personnages s’en sortent. Le petit bémol viendra alors des monstres qui possèdent un design assez moche et qui manque de vivacité. C’est assez rigide, on voit le manque de moyen et certains passages sont assez ridicules, notamment lorsque la femme du photographe coupe la tête qui s’allonge du cannibale. Le film a ses limites, Douglas Cheek le sait, et il fait tout son possible pour rendre son film viscéral, ce qui est une bonne chose.

Au final, C.H.U.D. est un très bon petit film d’horreur qui essaye de présenter des personnages crédibles et cohérents dans une histoire qui a quelque chose à raconter. Le film fait donc la nique au nucléaire et à tous ces secrets d’état qui empoisonnent la vie des nobles gens, tout en n’oubliant pas de créer une atmosphère pesante et glauque dans des égouts suintants et puants. Bien que le film souffre d’une image assez laide et d’un côté artisanal qui a mal vieilli, il reste toujours aussi plaisant à regarder et prouve que même avec un budget riquiqui, on peut raconter des histoires qui font peur et qui ont du fond, ce que bon nombre de réalisateurs ont oublié aujourd’hui…

Note: 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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