Auteur : Kazuaki Takano
Editeur : Les Presses de la Cité
Genre : Thriller
Résumé :
Sera-t-il l’avenir de l’humanité… ou la cause de sa destruction ? À trois ans, Akili, né dans une famille de Pygmées, est capable de mettre au point des algorithmes plus rapidement que les meilleurs ordinateurs. Lorsque le président des États-Unis apprend l’existence de ce représentant d’une nouvelle étape dans l’évolution, il nomme Jonathan Yeager, militaire surentraîné et père d’un enfant atteint d’une maladie incurable, à la tête d’une opération commando au cœur de la jungle du Congo. La mission de de cette troupe d’élite internationale ? Éliminer Akili, menace pour l’humanité, avant que ce dernier n’ait atteint son plein potentiel. Mais comment tuer de sang froid un enfant de trois ans, surtout quand l’intelligence de cet enfant représente peut-être le seul espoir pour Yeager de voir vivre son propre fils ? Pendant ce temps, à Tokyo, un jeune chercheur hérite de son père, virologue, deux ordinateurs remplis de calculs…
Avis :
Génocide(s) est un roman au sujet très intéressant et prenant. A la lecture du résumé, on pourrait se croire en plein dans un film d’action haletant, à fort suspens et aux messages marquants. Pourtant, la passion du début laisse vite la place à la longueur et à la lenteur. En effet, tout est beaucoup trop détaillé et cela ralentit l’histoire à un point tel que l’on a envie de sauter certains passages pour poursuivre l’intrigue principale.
Le récit perd ainsi de sa force et finit même par ennuyer, surtout lorsque la fin n’a rien d’exceptionnelle ni d’étonnant et que la violence gratuite est mise aux premières loges. Même si le but de l’auteur est de choquer et de perturber le lecteur, certains passages n’ont pas d’autre utilité que celle d’amener du sang et de la mort dans un univers déjà bien assez macabre et cruel.
Les passages scientifiques, bien qu’intellectuellement captivants, sont extrêmement précis et donc longs, les rendant parfois sensiblement difficiles à comprendre, même pour les initiés. Un non scientifique aura sans doute du mal à tout assimiler du premier coup ou devra alors faire appel à toute sa concentration, voire relire des paragraphes pour les digérer convenablement. L’auteur décrit finement certains procédés médicaux et pharmaceutiques, notamment ceux de la création de médicaments, qui ne sont clairement pas connus de tous. Chaque étape est expliquée : on ne sent davantage dans une encyclopédie que dans un roman par moment. Les curieux y trouveront largement leur compte et seront comblés par toutes les informations fournies.
De plus, au vu de ses recherches approfondies, l’auteur nous fait également découvrir avec force détails l’univers de la politique et ses déviations, le monde des militaires et leurs armes ainsi que la sphère de l’anthropologie. Sans parler de nombre de chapitres philosophiques sur le devenir de l’humanité, la bestialité de l’Homme ou l’évolution animale. Bien que ces différents sujets soient envoûtants pris de manière séparée, ils donnent au roman un rythme étriqué qui perd de son sens et de son unicité.
Par ailleurs, l’histoire n’apporte quasiment plus de mystères. Effectivement, tous les plans des différents partis sont explicités de telle sorte que l’on connaît à la fois les plans des politiciens et à la fois la quasi-totalité des plans des protagonistes. Quelques révélations parviennent malgré tout à nous étonner mais cela reste minime. L’auteur veut faire dans le réaliste et cela se voit. Cette façon de faire ne sert malheureusement pas toujours l’histoire.
On a du mal à s’attacher à beaucoup de personnages tant la cruauté ou la bêtise caractérise certains. Les politiciens, les attachés aux services secrets ainsi que les scientifiques reliés à ces prestations sont lâches, peureux et souvent peu intelligents. L’annonce d’une espèce plus évoluée rend fou ceux qui craignent la chute de l’Homo Sapiens et sa fin inévitable. Rares sont les personnes à voir cela d’un œil positif ou extraordinaire et le pessimisme englobe la majorité des pages du roman. On comprend parfaitement que l’auteur se base sur notre monde, nos cultures et notre grande crainte de mourir et de disparaître. Il reste tout de même dommage que l’autre parti n’ait pas pris plus d’ampleur pour défendre un tout autre point de vue, qui n’est clairement identifiable que dans les dernières pages.
Les soldats envoyés en mission sont certainement ceux que l’on apprécie le plus, notamment Yeager dont le fils est gravement malade. On apprécie ses réflexions et ses actions en temps de guerre, ainsi que ses opinions et ses principes moraux. A travers ses yeux, on perçoit l’horreur des combats et la folie des dirigeants. Kento Kaga, un jeune étudiant en pharmacie, est également une personne attachante. Peu sûr de lui et se questionnant souvent sur son avenir et sa valeur ; ses recherches, sa motivation et son intelligence vont en faire un allié de poids. On le voit évoluer, devenir quelqu’un d’entier et c’est plaisant. Les personnalités des héros sont très travaillées et cela permet de mieux se les imprégner.
Le lien entre tous les protagonistes est le plus grand mystère du roman. Les révélations sur ce point sont intéressantes et ajoutent de la crédibilité au livre dont la véritable force réside dans ses personnages charismatiques. Cependant, tout n’est pas délié sur la fin et certains faits restent encore mystérieux, ce qui enlève en cohérence.
L’univers retranscrit est bien exécuté et nous fait réaliser que l’humanité est dramatiquement en déclin, notamment dans les plus hautes sphères. L’auteur nous donne matières à réfléchir et nous fait réagir. Que ferions-nous si ce cas arrivait un jour ? Aurions-nous aussi peur ?
La lenteur accrue par des détails omniprésents, les scènes de violence gratuites et la fin attendue font perdre à Génocide(s) tout son potentiel prometteur.
Note : 12/20
Par Lildrille