Avis :
Quand on évoque le rock français, et plus encore quand il s’agit de hard rock, les noms ne se bousculent pas dans nos mémoires de singe. On pense irrémédiablement à Lofofora, même si ce dernier se range plutôt dans la catégorie Métal, et les petites midinettes n’auront d’yeux que pour BB Brunes, qui est au rock ce que le simili est au cuir. Alors bien évidemment, quand un groupe commence à émerger et à faire un peu parler de lui, on a envie de jeter une oreille pour savoir si ça vaut le coup ou si on reste dans quelque chose de gentillet et d’inoffensif, comme Superbus par exemple. Ou Kyo, mais on peut frôler la dépression à trop écouter ce genre de rock sympathique, mais franchement mou du manche. Redshift entend bien changer ce petit monde qui tourne un peu trop en rond. Car derrière ce nom énigmatique et ces deux rhinocéros qui ne semblent pas vouloir la même chose, on fait face à un groupe français originaire de la région parisienne et qui officie dans un genre peu usité chez nous, le Hard rock pur et dur, celui qui balance des solos dantesques, qui tente de te faire hocher la tête dans tous les sens sans pour autant brailler à tout va ou utiliser des riffs tellement lourds que même l’enceinte semble prête à se déchirer. Mais que vaut vraiment Duality ?
Le skeud démarre assez tranquillement avec Devil’s Game. Si on sent un potentiel de tueur au niveau technique, c’est plus dans la rythmique et dans l’énergie que cela pose un léger problème. Le titre est plutôt bon, il propose un excellent solo, le break de fin est assez intéressant bien que redondant, mais c’est surtout d’un point de vue du chant que cela passe assez mal. Non pas que la voix du chanteur principal soit mauvaise, bien au contraire, mais cela manque de panache, de volonté de taper un peu plus fort à défaut de faire hocher les têtes grâce à une maîtrise parfaite. On retrouvera un peu de ça dans le refrain de Freedom is a Lie ou encore dans le très oubliable Amnesia, un titre un peu plus découpé que les autres, qui s’avère agréable à l’écoute, mais qui là aussi manque de punch. Cette distance qu’il peut y avoir entre la voix et la rythmique est assez bizarre et ne s’explique pas vraiment, car dans d’autres morceaux, cela roule tout seul, mais on y reviendra plus tard. On notera aussi quelques scories étranges entre les instruments et cela est d’autant plus vrai dans le dernier titre, Road of Rock, qui est très réussi, dégage justement une énergie dingue, mais qui n’arrive pas à mettre en osmose la batterie et la guitare. C’est assez fou d’avoir une telle distance entre les deux instruments et on ressent que le batteur ne sait pas suivre un rythme un peu trop rapide et les changements s’entendent énormément.
Fort heureusement, c’est petits couacs s’effacent très rapidement devant le plaisir que l’on prend à écouter ce groupe qui doit tirer ses références de célèbres formations cultes, comme Black Sabbath, Led Zeppelin, Aerosmith ou encore AC/DC. Dès le deuxième morceau, on est dans l’ambiance. Dust in the Rust envoie du lourd au niveau des riffs, et on se sent très rapidement propulsé aux States, dans un vieux motel désertique avec pour seule compagne, une bouteille de Jacks à moitié vide. Le chanteur fait enfin preuve de vitesse dans son chant et n’hésite pas à partir vers quelque chose de plus rugueux. On retrouvera cette ambiance ricaine dans Screaming Louder, avec des riffs impeccables, tirant leur rythmique d’un bon vieux blues rock des familles et ça envoie sévère. Avec un titre comme celui-ci, bénéficiant d’une vraie atmosphère, on a qu’une envie, c’est de bouger la tête en rythme et de se laisser aller à un plaisir auditif puissant. Et que dire du solo qui fait mouche immédiatement. Et des titres de cette qualité, on en a à la pelle dans cet album, comme par exemple Statesman qui est très puissant, Back in the Wild qui rappelle un certain groupe australien ou encore Rhythm of Love qui permet au chanteur de poser un peu plus sa voix. Et on peut aussi parler de War, un très bon moment, avec notamment un pont qui évoque irrémédiablement Rage Against the Machine durant quelques secondes.
Au final, Duality, le premier album de Redshift, groupe français tout frais de hard rock, est une excellente surprise malgré quelques petits défauts inhérents aux premières galettes. On pourra aussi reprocher une production qui n’est pas terrible, mais on espère que le groupe se fera de plus en plus connaître car il le mérite grandement, pour preuve cet album qui contient de longues pistes riches et maîtrisées, avec des solos incroyables, renouant avec un vrai esprit rock, sans chercher le moindre écart commercial. Bref, ce rhino-là, c’est de la bonne !
- Devil’s Game
- Dust in the Rust
- Freedom is a Lie
- Screaming Louder
- Light me Up
- War
- Statesman
- Enter in my World
- Amnesia
- Back in the Wild
- Rhythm of Love
- Get Out of my Way
- Road of Rock
Note : 15/20
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Par AqME