avril 20, 2024

Vianney – Vianney

Avis :

Dans le domaine de la musique, il y a des choses auxquelles il ne faut pas trop toucher si on ne veut pas se prendre une volée de bois vert. Il faut dire que penser différemment de la masse signifie qu’on a une certaine déviance et que l’on n’est pas normal. La preuve en est faite quand on s’en prend à un succès populaire ou à un groupe qui possède une solide fan base qui considère qu’il ne faut pas toucher à ses icones. Bref, le principe de tous les goûts sont dans la nature ne semble plus exister. C’est dommage et est révélateur d’une société qui se contente de ce qu’on lui balance entre les dents sans jamais faire d’effort pour chercher autre chose que les succès populaires ou les blockbusters au cinéma. Et pour qu’un peu quelqu’un décide de sortir de sa zone de confort, alors c’est forcément de la merde. Le bousculement du public, créer un émoi, une véritable émotion n’est plus permis, il faut être formaté. Cela est d’autant plus prégnant dans la musique où l’on aime classer les gens en fonction de leurs goûts musicaux. Tu aimes le rap, t’es une racaille. Tu aimes le métal, tu es sataniste. Tu aimes l’électro, tu es un drogué. Tu aimes Vianney, ça va tu es normal.

Cette façon de poser des étiquettes sur le front des styles est fort discutable et insupportable dans un pays qui se dit culturel et ouvert. Et le cas Vianney est assez intéressant car il est symptomatique de notre époque. Inoffensif dans son fond, succès populaire, hyper médiatisation et bonne trogne de premier de la classe innocent, Vianney semble avoir trouvé les clés du bonheur ainsi que celles des cœurs d’une certaine population française. Du coup, on s’est penchés sur son cas et notamment sur son dernier album en date, certifié triple disque de platine. C’est assez énorme pour interpeller et se dire que finalement, derrière cet abattage médiatique, il y a forcément quelque chose de bien. On rappelle simplement que Jul vend autant si ce n’est plus d’albums… M’enfin, avec des arguments comme « Vianney, il est trop chouqui », ou encore « J’adore Vianney, en plus il est trop beau », pour sûr que l’on ne peut lutter devant autant d’éloges et de grâce. Mais penchons-nous plutôt sur sa musique.

Le skeud débute avec Sans le Dire et on se doute bien qu’il s’agit-là d’un texte sur l’amour et sur une relation entre le chanteur et une nana. Une bonne guitare sèche, un chant maîtrisé, un final qui s’emballe un peu (pas trop, faudrait pas faire du rock, ça se vend moins), bref, on peut se dire que ce n’est pas si mal. Sauf qu’après plusieurs écoutes, on déchiffre les paroles, et là, ça fait un peu froid dans le dos. Non pas que ce soit mal écrit, mais c’est d’une simplicité à faire pâlir des élèves de collège un peu doués. En fait, ce titre pose les bases de l’album, à savoir des textes très égocentriques, avec beaucoup de première personne et des histoires d’amour qui ne touche pas forcément puisqu’elles sont très personnelles. Et on s’en fout un peu des histoires des autres. Et c’est le principal reproche que l’on pourrait faire à cet album, c’est que c’est très excluant et qu’en plus de cela, ça ne touche pas. Alors certes, avec un joli brin de voix, une petite gratte et des moments mélancoliques, le chanteur emballe le cœur des demoiselles et ça floue tout le monde. Tout ça sans parler de Je m’en Vais, Tombe la Neige (une horreur), Moi Aimer Toi, J’m’en Fous ou encore Oublie-Moi. Que des thématiques qui parlent de l’amour, sans jamais poser de questions, sans jamais perturber, sans jamais interroger sur notre condition. En fait, Vianney, c’est creux.

Et c’est d’autant plus étrange que lorsque l’on s’intéresse un peu à la vie du chanteur, on va voir qu’il est catholique pratiquant, qu’il aide les sans-abris et qu’il possède de vraies valeurs. Des valeurs qu’il ne met pas dans ses chansons, ou très peu, comme s’il ne voulait pas bousculer les codes de la nouvelle chanson française qui se contente de bien peu de chose. On pourra à la rigueur estimer un peu L’Homme et l’Ame en l’honneur du curé assassiné il y a quelque temps, mais là aussi, c’est un morceau sur onze titres. Alors que nous reste-t-il de Vianney pour que les vrais mélomanes puissent s’y accrocher et y trouver un quelconque intérêt ? Pas grand-chose. Ne sortant jamais de sa zone de confort, le jeune guitariste propose onze morceaux basés sur les mêmes accords, y apportant quelques modifications en fonction du rythme qu’il veut insuffler et parsème çà et là quelques violons pour rajouter désespérément une émotion qui peine à venir. Le pire dans tout cela, c’est lorsqu’il essaye de se prendre pour Brel en roulant les « r » dans le titre Le Fils à Papa, une piste interminable qui donne envie de se suicider sur la fin. Il manque vraiment une vie dans tout ça, il manque de l’ampleur, une interprétation forte et une émotion sincère. Et quand il part sur des trémolos avec sa voix, c’est plus risible qu’autre chose.

Alors on sait qu’avec ce papier, on va s’attirer les foudres des fans de Vianney, mais on est honnête et on ne se focalise que sur sa musique et pas sur la personne qui doit être très sympathique et qui possède des valeurs en perdition de nos jours (même si l’on sait que ce qui nous perdra tous, c’est la religion et que Vianney est un fervent catholique pratiquant). Cependant, au niveau musical, c’est un peu la douche froide et il semblerait que l’artiste passe au travers des mailles du filet car il est humble, alors qu’il fait la même chose que Christophe Maé, ne s’appuyant que sur trois accords pour faire ses morceaux, et ce dernier s’attire constamment les moqueries des gens. Bref, ce dernier album de Vianney pourrait bien être l’esbroufe de la variété française, et on aimerait voir le chanteur sortir de son carcan pour proposer autre chose, des textes plus intelligents et moins égocentriques ou encore une instrumentalisation plus nerveuse ou moins sage.

  1. Sans le Dire
  2. Je m’en Vais
  3. Dumbo
  4. Tombe la Neige
  5. Moi Aimer Toi
  6. Le Fils à Papa
  7. J’m’en Fous
  8. Oublie-Moi
  9. Quand je Serai Père
  10. L’Homme et l’Ame
  11. Le Galopin

Note : 07/20

[youtube]https://www.youtube.com/watch?v=m_9RYQnPu34[/youtube]

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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