avril 20, 2024

La Baie Sanglante

Titre Original : Reazione a catena

De : Mario Bava

Avec Claudine Auger, Luigi Pistilli, Claudio Camaso, Anna Maria Rosati

Année : 1971

Pays : Italie

Genre : Horreur

Résumé :

La Baie est un magnifique domaine, convoité par tous. La propriétaire, une vieille comtesse paralytique, refuse de vendre car elle ne veut pas le voir transformé en station balnéaire. Ventura, un architecte sans scrupule, met au point une machination criminelle pour s’emparer du site. Pendant ce temps, quatre jeunes gens entrent par effraction dans une villa du domaine, jusqu’à ce que l’une des filles découvre un cadavre flottant dans la Baie…

Avis :

Si le cinéma d’horreur existe depuis les rudiments du septième art, comme avec l’expressionisme allemand et son Nosferatu ou encore tous les monstres de la Hammer, certains films ont plus marqué que d’autres car ils ont balisés des sous-genres, changeant les codes et donnant donc de nouvelles façons de créer la peur. Si les monstres ou les freaks peuvent être considérés comme un sous-genre du cinéma d’horreur, il en existe une multitude d’autres comme le torture-porn, le home invasion, le film de fantôme et bien entendu le slasher. Ce dernier sous-genre est apparu entre les années 60 et les années 70. Se jouant comme un thriller au début et empruntant beaucoup au giallo, le slasher va mettre en scène un tueur énigmatique et brutal dont l’identité sera révélée à la fin du métrage. Plus gore que le giallo, plus frontal et parfois plus sadique, le slasher a connu son heure de gloire durant les années 2000 grâce au Scream de Wes Craven qui engendra une panacée de petits frères.

Si certains s’accordent à dire que le premier slasher est Black Christmas de Bob Clarke car c’est un film américain (ou canadien), il faut savoir qu’il est postérieur à un autre film qui posait déjà les bases de ce sous-genre. La Baie Sanglante de Mario Bava date de 1971 et sort en 1973 en Italie et met en scène une jolie baie qui attise les convoitises. Alors qu’une série de meurtres se perpétue, une guerre fait rage entre habitants, héritiers d’une comtesse et agent immobilier. Si le film lorgne du côté du thriller au départ, il va vite prendre les atours du slasher, avec des meurtres en pagaille et une violence frontale qui fait encore froid dans le dos aujourd’hui. Car on peut dire ce que l’on veut, La Baie Sanglante reste un classique du genre qui inspirera bien entendu Wes Craven, mais aussi Dario Argento ou encore Tim Burton.

La première chose qui marque dans ce film, c’est la violence inhérente qui surgit dès le départ. En effet, on assiste au meurtre d’une vieille dame qui agonise devant un homme qui semble satisfait de la souffrance de ce pauvre hère. Baignant dans une ambiance glauque et lugubre, le film va alors montrer dans un montage hyper cut le meurtre de cet homme à grands coups de couteau. Et c’est assez étrange comme sensation car le film ne semble pas si violent, notamment dans des moments bucoliques où l’on voit certains personnages vagabonder dans la baie, et d’un coup, le réalisateur impose une vision gore avec un montage très scandé, très coupé, passant d’un état presque léthargie à un saut de stupeur devant la frontalité du métrage. C’est d’ailleurs l’une des forces de ce métrage qui va opposer des moments éthérés à des moments sanglants et parfois malsains. Cette opposition marche parfaitement sur le spectateur qui sera surpris du résultat et de l’aisance avec laquelle Mario Bava nous promène.

Quand on parle du montage, on va aussi retrouver une mise en scène très particulière dont s’inspirera certainement John Carpenter pour son film Halloween. En fait, le film de Bava aime mettre le spectateur dans la peau du tueur et filme très souvent à la première personne. Ainsi, on s’implique dans la peau de ce voyeur psychopathe qui va tuer tous les habitants de la baie. Cette façon de filmer sera alternée avec des moments plus classiques, plaçant alors le spectateur dans une position étrange, entre le voyeur et le spectateur, à la fois acteur des méfaits et voyeur de la cruauté du tueur. Et si le film a un peu vieilli, notamment sur les réactions des personnages où la façon de mettre en scène certains protagonistes comme le collectionneur d’insectes ou le pêcheur, le film demeure très efficace de ce côté-là, n’hésitant pas à planter des couleurs chaudes au beau milieu d’un massacre, n’oubliant jamais de mêler la sensualité à la violence. Un passage décrit parfaitement ce ressenti lorsque le tueur perfore deux amoureux en train de faire l’amour et que ces derniers ont comme un orgasme lors que leur mort.

Enfin, le dernier point assez intéressant dans ce film qui reste un classique du genre, c’est que malgré tout, Mario Bava fait passer un message relativement intelligent. En fait, à travers tous ses personnages, qui demeurent simples mais bien présentés, le réalisateur va montrer tous les vices de l’être humain. Si la vénalité est le premier truc qui vient dans le film, avec cet agent immobilier qui veut récupérer la baie quitte à faire des morts ou un couple qui serait les héritiers légitimes, on y retrouve aussi la cruauté, la manipulation, l’abus de faiblesse ou encore l’infidélité. Le film, sans en faire des tonnes, met en avant toutes ces thématiques, qui vont être complètement détruites à la fin par ce qui symbolise au mieux l’innocence. Ainsi, si cette fin peut paraître un peu grossière, voire carrément drôle et hors de propos, elle reflète l’idéologie finale du métrage, à savoir que malgré tout le mal qui règne sur la baie, l’innocence finit toujours par gagner.

Au final, La Baie Sanglante est un film très intéressant, bourré de symboliques et qui pose les bases du slasher moderne alors que l’on n’est en 1971. Mario Bava signe un excellent film qui est à la fois violent, bucolique et sensoriel. Un film qui joue autant avec le spectateur qu’avec ses personnages grâce à une mise en scène ingénieuse, inspirée et un rythme parfaitement dosé. Bref, un excellent film qui mérite bien sa réputation de film culte.

Note : 18/20

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Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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