Titre Original : Negatibu Happî Chênsô Ejji
De : Takuji Kitamura
Avec Megumi Seki, Haruma Miura, Hayato Ichihara, Itsuji Itao
Année : 2007
Pays : Japon
Genre : Fantastique, Romance
Résumé :
Yosuke, qui vient de perdre un ami dans un accident, lutte pour faire face aux autres problèmes qui l’assaillent: une session d’examens à venir et un premier pas vers le crime. Quant à Eri, combattante mystérieuse, elle lutte sans cesse contre un homme invincible et sa tronçonneuse. Un jour, ces deux personnages maudits par le destin se rencontrent….
Avis :
On a toujours tendance à dire que les asiatiques, et plus particulièrement les japonais, ont un univers bien à eux et certaines parties de leur culture demeurent quasiment insaisissables pour nous. Fort heureusement, l’avènement du manga en France (deuxième pays au monde qui en consomme le plus) fait que cette culture si particulière trouve un écho assez prégnant et certains réalisateurs occidentaux s’en servent pour fournir des films plus accessibles mais sur une base nippone. L’exemple le plus flagrant est certainement Pacific Rim de Guillermo Del Toro qui pompe sur les Kaiju Eiga japonais, avec une sauce toute particulière. Mais ce qui reste immuable dans le cinéma asiatique, c’est cette faculté de pondre n’importe quoi, bravant les interdits pour fournir des métrages qui parfois ne riment à rien, mais qui parfois sont fun et relativement jouissifs. Entre des sauts exponentiels, un humour enfantin ou encore l’exubérance des émotions, le cinéma nippon a ses codes que l’on ne retrouve nulle part ailleurs.
Negative Happy Chainsaw Edge est un film intrigant et un peu mensonger puisqu’il se vend comme un film d’horreur et il tient plus de la comédie romantique fantastique que du gore ou du film de monstre sanguinolent. D’ailleurs, du sang, il n’y en aura pas dans ce film qui se focalise sur deux jeunes en manque de relations et dont la conversation n’est leur fort. Dans ce film, on va donc suivre dans un premier temps un jeune homme qui est en train d’échouer à l’école. Toujours dans la lune, Yosuke semble perdre du temps et peu de personnes font cas de lui ou de son état de deuil. Car le garçon vient de perdre son meilleur ami dans un accident de moto et il n’y a personne pour l’aider à passer ce cap. On retrouve cette perdition chez son colocataire qui est lui aussi un ami commun et sans trop appuyer sur cet aspect morose, le film montre quand même une certaine détresse qui doit être dépassée par soi-même, avec l’aide d’un pair ou dans l’expression d’un art. Assez subtil dans sa démarche, le film se perd quelque peu sur la fin, avec une revanche qui n’en est pas vraiment une, puisque visiblement, pour faire son deuil, il faut faire les mêmes conneries que son camarade, tout en évitant d’y perdre aussi la vie. Le film (ainsi que le personnage principal) se voulant cool, il fallait pondre une compétition ringarde pour surmonter son deuil.
Deuil que l’on retrouve du côté de la jeune fille qui tous les soirs combat un monstre armé d’une tronçonneuse puisque cette dernière a perdu ses parents. Tournure fantastique qui ne sert finalement pas à grand-chose si ce n’est rapprocher deux âmes en peine pour lutter contre une cause commune. Une cause étrange, qui ne trouvera pas d’explications dans la suite du métrage sur les raisons de son apparition, si ce n’est un attrait pour la tristesse excessive des gens. Ce qui aurait mettre du pep’s dans l’histoire va en fait la ralentir, la faute à des ellipses sur les bastons pour mieux mettre en avant la relation entre Eri et Yosuke. Une relation complexe qui dénonce un peu les codes japonais sur les relations humaines, montrant des personnages timorés, bourrés de principes alors que leur attitude laisse penser le contraire. Et si ce point est plutôt intéressant dans son fond, il prend un peu le spectateur en traitre puisque l’éditeur vend son film comme une comédie horrifique et non pas comme une romance fantastique. Il est vrai qu’il y a quelques moments un peu drôles, mais rien de bien folichon.
Malgré tout, le film se rattrape grandement sur son visuel. Dès le départ, les effets spéciaux sont très jolis, même pour l’époque (on ne dirait pas mais le film a presque dix ans déjà) et il y a une réelle recherche de mise en scène. Les mouvements de caméra sont fluides ce qui permet d’avoir une belle lisibilité lors des affrontements et certaines scènes sont spectaculaires, notamment grâce aux acrobaties improbables des protagonistes. Même le design du monstre est léché malgré le fait que l’on ne comprenne pas le coup de la tronçonneuse. Certes, c’est badass, mais il manque vraiment une cohérence dans la création de ce personnage énigmatique. Il descend de la lune, devient plus fort quand la tristesse de son adversaire grandit, montre une tronçonneuse gigantesque et cache son visage derrière une cagoule où ne brille qu’un œil rouge. En dehors de cela, on ne sait rien sur cette entité et cela entache un peu la compréhension de l’ensemble même si on comprend très bien que le message global est de profiter de la vie et des moments joyeux car ils ne sont qu’éphémères. Enfin, le film s’avère beaucoup trop long, accumulant par moments des séquences inutiles comme le concert donné par les trois potes.
Au final, Negative Happy Chainsaw Edge n’est pas un mauvais film, mais il est suffisamment étrange pour mettre sur le bas-côté certains spectateurs. Complètement barré malgré un fond intelligent, difficilement compréhensible malgré une mise en scène fluide, ce film réserve son lot de surprises, bonnes comme mauvaises, sans pour autant réussir à surprendre le spectateur rompu à cet exercice de style qu’est le cinéma asiatique débridé. Bref, un film dans l’exagération, mais qui va au bout de son concept et qui possède un joli capital sympathie.
Note : 11/20
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Par AqME