novembre 5, 2024

Ronin

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Auteur : Frank Miller

Editeur : Urban Comics

Genre : SF

Résumé :

Un samouraï tombé en disgrâce, le Ronin, obtient une chance de venger son maître lorsqu’il est transporté du 13e siècle au 21e dans une New York futuriste et rongée par la corruption. Là, il y retrouve son ennemi juré, également réincarné, le démon Agat.

Avis :

Dans le monde du comics, il y a deux sortes d’artistes. Ceux qui ont une plume grandiloquente et qui arrivent à revisiter les classiques du genre, réinventant une mythologie déjà préinstallée et ceux qui possèdent le don du dessin, celui de sublimer le moindre trait, de rendre vivant un dessin fixe. Et puis, au milieu de tous ces talents, il y en a qui se démarquent complètement par leur démarche punk et leur envie de bousculer les codes. Alan Moore est certainement le plus connu de tous, mais il faut aussi compter sur Frank Miller, auteur qui a aussi compté aussi bien pour le comics que pour le cinéma. Sin City, 300, The Dark Knight, ses œuvres se sont vues adapter au cinoche avec plus ou moins de succès, mais il n’en reste pas moins un autodidacte surprenant et véritablement talentueux. Mais l’homme possède aussi quelques séries moins connues, qui lui ont pourtant permis d’accéder au rang qu’on lui connait aujourd’hui.

Ronin

En 1976, alors que le comics stagne, DC décide de se tourner vers la France, qui édite alors Métal Hurlant. N’arrivant pas à trouver le talent nécessaire et la qualité de papier adéquat, les américains nous envient ces histoires, surtout de par le dessin. C’est alors que Frank Miller arrive avec une histoire qui risque fort de bousculer les codes du comics. Ronin est une œuvre à part dans la littérature de petites bulles car il part d’un postulat inédit et propose une histoire déjantée qui tient pourtant la route. Le pitch est d’ailleurs complètement allumé, narrant les aventures d’un ronin qui veut venger son maître, tué par le démon Agat. Seulement, il se retrouve propulser au XXIème siècle dans le corps d’un handicapé ayant le pouvoir de télékinésie. Il va alors s’échapper de la base où il était enfermé pour vagabonder dans un New-York décrépi à la recherche d’Agat, qui lui s’est réincarné dans le corps du chef de Vierge, un biocircuit vivant et quasiment autonome.

La première chose qui frappe quand on ouvre ce comics, c’est le dessin. Bien loin des standards auxquels nous sommes habitués, Ronin reste dans la plus pure tradition de Frank Miller. C’est-à-dire un dessin parfois épuré, parfois fouillis, pas forcément bien foutu mais fourmillant de détails et de références. Ceux ayant lu The Dark Knight Returns ne seront pas déroutés, car on est dans la même approche graphique, avec beaucoup de crayonnés, quelques passages un peu plus précis, notamment les scènes apportant un nouveau climax, mais surtout des moments qui croisent grandiloquence et simplicité. Les planches alternent entre le bon et le moins bon, mais ce que l’on va plus retenir, c’est le découpage très cinématographique de Ronin. En effet, les livres composant l’histoire sont pensés comme un film avec des découpages précis, donnant un rythme nerveux lors des scènes de combat, un côté sensuel lors des scènes plus sexuelles et un côté plus verbeux, plus lent, lors des dialogues. Ce découpage fait que l’on ne s’ennuie pas et finalement, malgré la colorisation un peu dépassée et des dessins parfois rebutants, on reste dans quelque chose de bon et de subversif.

Subversif car l’auteur va brasser des thèmes qui sont encore terriblement d’actualité aujourd’hui. Malgré une liberté de ton totale, Ronin n’hésite pas à rentrer dans le lard, à déranger, abordant des thèmes comme le racisme, la déchéance d’humanité ou encore une perte totale de respect. On sent que Frank Miller a une vision désespérée du futur et qu’il voit l’humanité comme une espèce dangereuse et sans aucun avenir. La preuve avec Vierge, ce système à l’IA surdéveloppée, qui commence à penser par elle-même et fomenter une guerre pour conquérir l’espèce humaine. Là aussi, l’auteur interpelle sur les risques de la technologie et la dérive des hommes voulant jouer à Dieu. Cette super puissance et son développement sont symbolisés par de grandes planches montrant l’évolution de la structure au sein de la ville. Mais finalement, le plus intéressant dans tout ça, c’est bien cette contextualisation entre le Japon médiéval et le futur, qui sont des époques éloignées dans le temps mais pas tant que ça dans les mentalités. C’est très malin de la part de l’auteur, lui permettant de construire des planches sur deux époques, remplaçant les ennemis du ronin par des robots et vice-versa. En fait, il arrive à créer une double ambiance propice à des illusions et des jeux mentaux entre deux personnages qui se cherchent mentalement.

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Au final, Ronin de Frank Miller est une œuvre très étonnante et très délicate à aborder. Si au départ, on peut rester dubitatif sur cette histoire de voyage temporel et psychique, il se trouve qu’à la longue, l’histoire est réussie et démontre d’une intelligence hors norme au niveau de l’écriture et du découpage. Il est juste dommage que le tout ait pris un petit coup de vieux d’un point de vue graphique et colorisation, faisant de cet objet quelque chose de difficilement conseillable pour les néophytes.

Note : 15/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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