avril 20, 2024

L’Ile des Péchés Oubliés – A la Pêche aux Péchés

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Titre Original : Isle of Forgotten Sins

De: Edgar G. Ulmer

Avec John Carradine, Gale Sondergaard, Sidney Toler, Rita Quigley

Année : 1943

Pays : Etats-Unis

Genre : Drame

Résumé :

La tenancière d’une pauvre maison close rencontre deux hommes à la recherche d’un trésor caché dans un navire englouti. Elle tente alors de faire partie de l’équipe.

Avis :

L’homme. Un sujet aussi vaste que l’univers et qui peut avoir autant de sujets en son honneur que néfastes. Il faut dire que l’homme est un loup pour l’homme (d’après Thomas Hobbes) et qu’il ne faut pas grand-chose pour mettre à jour toutes les velléités qu’il possède. Et aujourd’hui, il suffit de regarder deux minutes (pas plus sinon on risque la rupture d’anévrisme) de télé-réalité pour rendre un double constat. L’homme qui joue là-dedans est profondément stupide ou méchant et celui qui regarde est profondément voyeuriste, sustentant ses bas instincts face à des gens plus crétins que lui. Sauf que dans les années 40, il était fort complexe de faire ressortir tous les défauts de l’être humain, hormis au cinéma, dans des films qui essayent d’aborder une psychologie approfondie de la nature humaine. Et c’est un peu ce que nous propose Edgar G. Ulmer avec L’Ile des Péchés Oubliés, un film qui a subi les affres du temps mais qui a le mérite de montrer toute la noirceur de l’âme humaine et tous les vices cachés de l’Homme.

Isle-of-Forgotten-Sins-1943

Le film s’attarde sur trois groupes distincts de personnages qui auront chacun leur tour des réactions en rapport avec les sept péchés capitaux. Et c’est là la grande intelligence de son auteur, c’est qu’à aucun moment dans le film il n’y a de référence à proprement parlé sur les péchés capitaux (hormis le titre) et c’est au spectateur de deviner les réactions et les moments de péchés. Ces réactions seront d’ailleurs très vives et évolueront rapidement durant le métrage. Si le film commence dans la luxure avec la maison close qui fait office de bar pour vite partir en vrille avec une grosse bagarre, les deux protagonistes laissant éclater leur colère à propos d’un amour unique, on aura vite fait le tour des péchés d’orgueil et d’avarice. D’ailleurs, le film est tourné comme une histoire de piraterie où deux hommes vont rechercher un trésor dans un bateau échoué. Seulement, le propriétaire de ce bateau compte bien profiter des deux hommes pour récupérer son butin. Encore une fois, c’est savamment écrit car les péchés reviennent rapidement et l’on va pouvoir découvrir toutes les bassesses que peut faire un être humain (les femmes ne sont pas épargnées) pour de l’argent. En ce sens, les mœurs, plus de cinquante ans plus tard, sont toujours les mêmes et les hommes aussi, ce qui fait peur.

Néanmoins, le film aura un principal défaut, qui est l’adage des films d’époque, c’est qu’il est très lent et donc donne une sensation de longueur. Si les quelques moments d’action secouent un peu le tout (avec un réalisateur qui accélère ces scènes pour les rendre plus dynamiques), il y a pas mal de palabres inutiles qui cassent un rythme déjà bien délétère. Et pourtant le film ne dure qu’une heure et quart. Ensuite, le film n’a clairement pas les moyens de ses ambitions. L’exploration sous-marine, même si pour l’époque devait être grandiose, a pris un gros coup de vieux avec des algues faisant la taille de l’homme et il y a une certaine redondance dans ces scènes, qui reviennent de temps à autre afin de pallier au manque d’images. Et puis il y a les acteurs. Si John Carradine est relativement intéressant, il manque clairement un travail plus en détail de chaque personnage. Au niveau des filles, elles se ressemblent toutes et hormis la matriarche, on aura du mal à les distinguer. Ensuite, au niveau des personnages masculins, il manque un ou deux personnages forts et avec un bon background. Ici, si les deux duos d’acteurs sont plutôt bons, il leur manque une dimension dramatique.

Enfin, il y a beaucoup de choses à dire que la galette proposée par Artus Films. Si le travail de restauration est quasi-inexistant, il est dommage d’avoir une image aussi coupée et d’une qualité assez désolante. Certes, il s’agit d’un film rare et vieux, mais l’image est franchement en mauvais état. Ensuite, il y a très peu de bonus, mais là, c’est différent, car hormis une interview d’un connaisseur, il semble difficile de trouver des images d’archive de ce genre de métrage. Enfin, et c’est une chose impardonnable, c’est que la version originale buggue à plusieurs endroits. En effet, certains passages sont en français alors que l’on est en VO, c’est plutôt bizarre, voire même déplaisant.

Sidney-Toler-and-Rick-Vallin-in-Isle-of-Forgotten-Sins

Au final, L’Ile des Péchés Oubliés fait partie de ces films qui ont pris un gros coup dans l’aile. Si le fond est très intéressant et intelligent, allant dans un cynisme pur, la forme reste assez anecdotique et il faudra un gros effort de contextualisation pour pouvoir apprécier pleinement le métrage. Il est juste dommage que la galette d’Artus soit d’une qualité moyenne, ce qui n’est pas dans l’habitude de cet excellent éditeur, que l’on encourage pleinement.

Note : 09/20

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Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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