Avis :
Il faut toujours se méfier du succès. C’est un fait avéré et que l’on voit de plus en plus avec les émissions de télé réalité, mettant sur le devant de la scène des tâcherons qui n’ont jamais rien fait de remarquable et se faisant détruire en sortant de la sphère célébrité. Mais s’il y a bien quelque chose dont doit se méfier le cinéphile ou le mélomane, c’est du succès immédiat d’un chanteur ou d’un film auprès du public. Parce que le public n’a pas souvent raison, les gouts et les couleurs étant variés mais aussi et surtout, la consommation de masse faisant un travail sublime sur une culture qui est aux prises d’un grand baron : l’argent. C’est ainsi que bien souvent, les grosses productions assommantes récoltent de bonnes entrées et que certains albums de musique se vendent comme des petits pains à cause d’un assommage médiatique et radiophonique à la limite de la lobotomisation. Ellie Goulding fait exactement partie de cette caste d’artistes qui arrivent rapidement à la célébrité, enchainent vite des featuring avec des personnes plus connues (ici Calvin Harris (non, pas celui qui fait des brioches)) et accédant ainsi à une couverture médiatique assez large. Et cela malgré un talent plus que limité. La preuve en est faite avec ce troisième album, Delirium, qui n’a rien de délirant et s’insère dans la branche invisible de l’électro imbuvable qui n’a rien à dire et rien à prouver. Une musique fast-food qui plaira aux amateurs de boîtes de nuit et de coups d’un soir bourrés.
Il faut savoir qu’avant de faire Delirium, Ellie Goulding avait déjà proposé deux autres albums, beaucoup moins électro, la belle étant guitariste à ses heures perdues. Et elle avait clairement annoncé que ce nouvel album serait bien plus pop que les autres. Et de pop, il fallait comprendre électro avec des sonorités d’une banalité affligeante et un tempo similaire à chaque titre. Et ce sera là le plus gros défaut de cet album qui accumule les titres (seize en tout) sans jamais essayer une seule fois d’être original ou de prendre des risques, même dans l’électro en tentant une pulsation plus rapide afin d’aller vers d’autres styles comme le dubstep ou encore dans une house plus underground. Ainsi, dès le départ, le ton est donné, on aura droit à des morceaux mous du genou, sans saveur et surtout, qui ne rentrent pas une seule seconde en tête. Tout, absolument tout est identique, à la même vitesse et rien ne sort cet album d’un marasme ambiant de facilité et d’argent facile. Que ce soit d’Aftertaste à Codes, l’album ne laisse aucune trace derrière lui et semble constamment transparent. C’est bien simple, tout traverse les oreilles sans jamais les accrocher et c’est réellement problématique. En fait, on est en présence d’un album qui serait pour la musique ce qu’un McDo est à la gastronomie.
La chose qui frappe aussi au son de cet album, c’est que l’ensemble est très féminin. Pas de machisme dans ce constat, mais un fait, puisque les paroles sont très ciblées et les thèmes brassés ont peu d’égards auprès de la gente masculine. Il ne faudra pas non plus chercher d’instruments de musique dans cet effort, tout est électro, à base de samples piqués à droite et à gauche sans aucune recherche ou variation. Et ce n’est pas le titre Love Me Like You Do issu de la bonde originale du navrant 50 Shades of Grey qui viendra enjouer l’ensemble, puisque tout est au niveau du film, saturé de rose bonbon, de bons sentiments, de puritanisme exacerbé et de cul faussement assumé. Bref, la pochette est clairement ce qui aura de plus sexy dans l’objet ci-présent. Et c’est à ce moment-là qu’il faut se poser la question d’un tel album et du constat alarmant qui baigne l’électro pop d’aujourd’hui. Alors que pendant un temps, la prise de risque et le changement était le maître mot de l’électro, en faisant un style à part entière, aujourd’hui, on se retrouve face à des choses ineptes, complètement anémiées par un rythme lancinant et une volonté assumée de faire du pognon plutôt que de la musique. En fait, l’électro est à la musique ce que Besson est au cinéma. Alors que faire pour lutter contre ça ? Peut-être éteindre sa radio et chercher des artistes indépendants sur le net. Mais cela demande un effort.
Au final, Delirium, le dernier album d’Ellie Goulding, est clairement une catastrophe malgré sa générosité à fournir seize titres. Il s’agit d’un disque transparent, où rien ne reste en tête et dont le son a déjà été entendu des milliards de fois. On pourrait se consoler avec une voix intéressante, mais là aussi, c’est une déception, puisque la chanteuse possède un organe banale, là aussi déjà entendu et sans aucune envergure. Bref, un très mauvais album, tout ce qu’il y a de plus commercial et qui plaira certainement aux jeunes adolescentes de 14 ans ou aux nanas qui aiment aller en boîte de nuit et dont la musique est le dernier de leur souci.
- Intro (Delirium)
- Aftertaste
- Something in the Way you Move
- Keep on Dancin’
- On My Mind
- Around U
- Codes
- Holding on for Life
- Love Me Like You Do
- Don’t Need Nobody
- Don’t Panic
- We Can’t Move to This
- Army
- Lost and Found
- Devotion
- Scream It Out
Note: 02/20
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Par AqME