mars 29, 2024

Bande de Filles

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De : Céline Sciamma

Avec Karidja Touré, Assa Sylla, Lindsay Karamoh, Mariétou Touré

Année : 2014

Pays : France

Genre : Drame

Résumé :

Marieme vit ses 16 ans comme une succession d’interdits. La censure du quartier, la loi des garçons, l’impasse de l’école. Sa rencontre avec trois filles affranchies change tout. Elles dansent, elles se battent, elles parlent fort, elles rient de tout. Marieme devient Vic et entre dans la bande, pour vivre sa jeunesse.

Avis :

À trente-six ans, Céline Sciamma est un peu la réalisatrice « star » française de ces dernières années. Il y a huit ans maintenant, elle révélait la talentueuse Adèle Haenel dans son premier film « La naissance des lièvres » et depuis la réalisatrice développe un très beau parcours, notamment en réal, puisque qu’on lui doit un très beau court-métrage appelé « Pauline« . Mais elle va plus loin et s’impose aussi comme une scénariste très demandée. Elle a travaillé sur « Bird People » de Pascale Ferran, planche sur la série « Les revenants » et vient de signer le prochain André Téchiné. Mais aujourd’hui, on va revenir sur « Bande de filles » la petite sensation de l’automne que je viens de découvrir avec un peu de retard.

Le film a fait son petit effet à Cannes, puis son petit succès en salle, et c’est d’ailleurs le film de la réalisatrice qui a le mieux marché en salle. Ayant adoré « Tomboy » et la vision que porte Céline Sciamma sur l’enfance et l’adolescence, j’attendais beaucoup de « Bande de filles » et je dois dire que même si je l’ai trouvé un peu longuet sur la fin, je n’ai pas été déçu. Encore une fois, la réalisatrice peint de très beaux portraits et nous livre un film juste, triste et beau à la fois.

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Marieme est une jeune fille de banlieue qui a seize ans. Plutôt solitaire, elle vit cette période comme une succession d’interdits. Mais un matin, elle va faire la connaisse de « Lady », Adiatou et Fily, trois filles un peu grande gueule, délinquantes sur les bords et surtout qui font tout pour ne pas passer inaperçu. Avec elles, elle se sent bien, elle est entourée, elle peut partager et elle retrouve le sourire. Marieme devient alors Vic, elle fait partie de la bande et elle va découvrir une autre façon de vivre.

Depuis le début de sa carrière, Céline Sciamma offre un cinéma au féminin et avec ce troisième film, elle ne déroge pas à cette règle. Toujours en compagnie d’adolescentes qui se cherchent et se découvrent, la réalisatrice aurait très bien pu se répéter, ou lasser le public, mais ce ne sera pas le cas. Après l’éveil des premiers désirs de Marie et Floriane, après Laure et son mensonge, voici qu’elle nous présente Vic et ses copines.

Pour son nouveau film, la réalisatrice a choisi l’un des sujets les plus complexes de sa jeune carrière. « Bande de filles » parle de jeunes filles de la banlieue parisienne. Alors, à première vue, le sujet parait moins complexe que celui évoqué dans « Tomboy« , mais il n’en est rien, car évoquer le quotidien des banlieues en compagnie de filles si particulières aurait très vite pu tomber dans le caricatural. Et le choix est d’autant plus difficile, car il fallait que la réalisatrice peigne non seulement le portrait avec réalisme, mais aussi à rendre ces filles grandes gueules, vulgaires et pathétiques, attachantes. Difficile mais pas impossible, surtout quand on a la plume de Sciamma.

« Bande de filles » suit le parcours de jeunes femmes qui cherchent à s’affirmer dans un monde brutal. Elles se font remarquer, elles dérangent, elles peuvent agacer par moments, même faire peur, mettre mal à l’aise. Elles parlent fort, elles rigolent fort, elles font un peu ce qu’elles veulent et la réalisatrice va les rendre touchantes, explorant avec justesse le mal-être qui se cache derrière ces attitudes provocantes. Ce qui est très bien avec ce film, c’est que la réalisatrice ne les juge pas. Elle nous les présente, avec leurs défauts, mais aussi leurs qualités.

Le film nous propose une trajectoire de vie. Une trajectoire qui n’est pas simplement une trajectoire pour un personnage et ne résume pas la banlieue en un personnage. Le scénario est juste, simple et vrai. Il se divise en deux parties très distinctes. La première est magique, pleine de rires et de complicités. L’ambiance est géniale et Céline Sciamma démontre encore une fois avec beaucoup d’assurance qu’elle sait composer des images formidables, alors qu’ici, elle filme la banlieue dans tout ce qu’elle a de plus commun. On est pris dans l’ambiance, dans l’énergie, dans la complicité que véhicule cette « Bande de filles« . La réalisatrice n’omet pas les petits délits et quelques clichés. C’est une petite fenêtre qui s’ouvre sur la banlieue et qui met en lumière des personnages qu’on connaît mal, et même si elles peuvent agacer, on finit par les voir autrement. La réalisatrice en profite bien entendu pour aborder ses sujets de prédilection, l’éveil des sentiments, le regard des autres, le chamboulement qu’apporte l’adolescence et bien sûr, l’avenir.

La deuxième partie du film est plus sombre et s’axe sur une trajectoire dramatique. Les choix faits dans la première partie et le regard de la famille font changer le film du tout au tout. La violence et la délinquance sont bien-là. Le quotidien de la banlieue et des cités est parfaitement retranscrit par la réalisatrice, qui encore une fois, ne juge pas ses personnages. Elle nous laisse seul juge de ce qu’elle nous présente. Et c’est d’autant plus convaincant et sincère de sa part. Elle n’est pas là pour faire une leçon de moral ou remettre des compteurs à zéro. Elle essaie de rendre au mieux un quotidien, un contexte, un endroit, un quartier, une population et des personnages. Bien ou mal, elle s’en fout, elle les présente dans tout ce qu’ils ont de plus brute, de plus sincère, d’agaçant ou pas, et c’est très bien vu.

Le seul petit côté agaçant du film, c’est qu’au bout d’un moment, il finit tourner un peu en rond et devient longuet, comme si Céline Sciamma s’était coincée l’espace d’un bon quart d’heure dans cette cité, ne sachant pas trop comment et où emmener son personnage. Elle finira par y arriver, et de façon très touchante, mais il aurait fallu patienter un petit peu.

Depuis son premier film, Céline Sciamma est une découvreuse de talents et a toujours mis en lumière des comédiennes qu’on ne connaissait pas et « Bande de Filles » en est un bel exemple et nous invite à découvrir des jeunes filles bourrées de talents qui sont uniques. Ici, elles sont quatre, Assa Sylla, Lindsay Karamoh, Mariétou Touré et bien sûr Karidja Touré, qui joue Marieme, notre repère. Chacune d’elle, à sa manière, est exceptionnelle. Céline Sciamma les filme comme des diamants bruts, magnifiques et parfaits. Elles sont belles, drôles, touchantes et terriblement naturelles, si bien qu’on a l’impression qu’elles ne jouent pas et que la caméra de la réalisatrice finit par les espionner. Céline Sciamma a vraiment un don pour diriger et rendre ses acteurs le plus naturel possible.

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« Bande de filles » est donc un très beau coup de cœur. C’est un film que j’ai adoré, qui m’a passionné et ému, mais qui ennuie un peu vers la fin, heureusement que la réalisatrice a rattrapé le coup.

Note : 16/20

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Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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Une réflexion sur « Bande de Filles »

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