septembre 16, 2024

The Deep House – Un Film Immersif

De : Alexandre Bustillo et Julien Maury

Avec Camille Rowe, James Jagger, Eric Savin

Année : 2021

Pays : France, Belgique

Genre : Horreur

Résumé :

Un jeune couple américain spécialisé dans l’urbex (exploration urbaine) décide d’aller explorer une maison réputée hantée qui a été ensevelie sous un lac artificiel. Mais celle-ci semble se refermer sur eux et le couple se retrouve prisonnier de cet endroit chargé des plus sombres histoires…

Avis :

On le sait, faire des films d’horreur en France n’est pas une sinécure. A chaque fois, les producteurs et distributeurs sont hyper frileux, et on ne sait pas trop d’où cela peut provenir, car il y a réellement un public pour les films de genre. Alors on veut bien entendre que certains films d’horreur français sont des calamités, pour autant, on a un vrai vivier de cinéastes talentueux, qui ont marqué l’histoire du film d’horreur, à l’instar d’Alexandre Aja, Pascal Laugier ou encore, dans une moindre mesure, Xavier Gens. Des réalisateurs qui ont dû s’expatrier aux Etats-Unis pour avoir plus de moyens afin de faire des films de flippe avec du budget, et un minimum de prise de risque. A ce jeu-là, on peut aussi compter sur le duo Alexandre Bustillo et Julien Maury, qui s’évertue à faire des films en France, malgré un petit crochet aux States pour Leatherface.

Après s’être fait connaître via A l’Intérieur, un film gore et malsain, les deux compères ont continué leur petit bonhomme de chemin, malgré les budgets faméliques et des contraintes de tournage pénibles. Souhaitant rester en France, et après une expérience pas forcément agréable aux Etats-Unis, les deux réalisateurs reviennent en 2021 avec The Deep House, et un scénario assez atypique, où la mise en scène s’avèrera un vrai tour de force. L’idée même du film leur est parvenue lors d’une balade, les deux cinéastes évoquant ce qu’ils aimaient le plus dans le cinéma, à savoir les maisons hantées et les films se déroulant sous l’eau. Du coup, ils se sont dits que ce serait sympathique de faire un film de maison hantée sous l’eau. The Deep House devait être un film muet uniquement sous l’eau, mais il a fallu faire des concessions pour que le long-métrage puisse voir le jour.

« D’un point de vue strictement scénaristique, on reste dans quelque chose de téléphoné. »

Ainsi donc, le film débute avec la présentation rapide d’un couple qui possède une chaine Youtube d’urbex. Ils commencent par visiter un ancien asile en Ukraine, et cela pose les bases de la relation, avec un homme un peu tête brûlée et terre à terre, et une femme plus craintive, moins fan d’urbex que son compagnon, mais qui fait ça par amour, et parce qu’elle y prend goût aussi. Dès le départ, le scénario nous montre les rapports entre les deux amoureux, qui font des concessions, mais avec une nana qui cède facilement à la volonté de son homme à faire des vues et des likes, quitte à dépasser les limites. Cependant, on sent un vrai lien entre les deux, et surtout, ils sont « normaux ». C’est-à-dire que l’on n’a pas des clichés sur pattes qui remplissent une fonction, et c’est tant mieux, car le film est centré quasi uniquement sur eux, et il fallait quelque chose de crédible.

En ce sens, le fait de ne pas faire un film uniquement muet sous l’eau permet de donner de l’épaisseur au film, ou tout du moins du fait que l’on ressente de l’empathie pour les personnages, qui vont se retrouver dans une situation pénible. Ne tergiversant pas trop, on va rapidement aller dans la maison, qui se trouve dans un spot tenu secret, dont un seul homme à le secret. Les deux plongeurs vont alors faire la connaissance avec une demeure labyrinthique et qui cache un lourd secret. D’un point de vue strictement scénaristique, on reste dans quelque chose de téléphoné et d’assez limpide (contrairement à l’eau du lac uhuh). Les découvertes montrent une famille de zinzins et on aura les tenants et les aboutissants dans une révélation finale un poil grotesque. Mais cela fait aussi le charme du film, qui joue avec les éléments pour créer la peur.

« L’un des points forts du film reste la mise en scène. »

Comme dans un film d’épouvante, on retrouve des fantômes qui vont poursuivre les protagonistes, des éléments de l’histoire qui se dévoilent au fur et à mesure, laissant entrevoir des fulgurances démoniaques, et quelques moments de flippe qui jouent surtout sur la musique et l’ambiance recherchée. Certes, ce n’est pas original pour un sou, seul le lieu de la maison nous sort de l’ordinaire, mais ça fonctionne, et les deux réalisateurs ne recherchent pas le jumpscare à tout prix. S’il y en a quelques-uns, ils sont disséminés de façon parcimonieuse, et les deux cinéastes évitent de tomber dans les clichés du genre, quitte à avoir un petit ventre mou lors de l’exploration. Le film a beau durer moins d’une heure trente, il possède des moments d’errances un peu pénibles. Cela ne gâche pas forcément l’expérience, puisque l’un des points forts du film reste la mise en scène.

Malgré des contraintes techniques inédites (pour les séquences sous l’eau, les acteurs étaient dans un bassin, alors que les réalisateurs étaient hors de l’eau, et pour communiquer, ce n’était pas facile), on se retrouve dans une mise en scène très immersive, qui fait penser à un jeu vidéo, et plus précisément un survival-horror. Pas étonnant venant de deux cinéastes gamers dans l’âme, mais ils ont réussi à rendre le tout très prégnant, en n’utilisant, en plus, que quatre caméras. On aura alors les deux points de vue des personnages via leur masque de plongée, une caméra manuelle et un drone qui, en règle générale, part explorer les pièces trop sombres. Et avec ce minimalisme, on a la sensation d’être avec les deux personnages, et de découvrir les lieux avec eux. Il est dommage que lorsqu’il y a un peu d’action, on ne voit plus rien.

Au final, The Deep House est un film qui, d’un point de vue factuel, manque sans aucun doute de fond et de sujets plus importants que la quête de la gloire malgré les dangers perçus, mais d’un point de vue formel, on peut dire que le duo propose un film immersif à souhait, et dans lequel on aime se perdre, a contrario des deux protagonistes. Il faut aussi noter deux acteurs intéressants, dont une Camille Rowe qui semble se sentir comme un poisson dans l’eau dans le cinéma de genre. Bref, on peut dire que l’on fait face à une petite réussite, surtout en cette période de vache maigre niveau horreur française.

Note : 14/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

Voir tous les articles de AqME →

Laisser un commentaire

Votre adresse e-mail ne sera pas publiée.

Ce site utilise Akismet pour réduire les indésirables. En savoir plus sur comment les données de vos commentaires sont utilisées.