
Editeur : Gallimard
Genre : Policier
Résumé :
Parce qu’une jeune Norvégienne a été sauvagement jetée d’une falaise à l’autre bout du monde en Australie, l’inspecteur Harry Hole de la police d’Oslo est envoyé sur place par une hiérarchie soucieuse de l’évincer. Ce qui n’aurait dû être que routine diplomatique va se transformer en traque impitoyable au fur et à mesure de meurtres féroces qu’Harry Hole refuse d’ignorer. Autre hémisphère, autres méthodes… Associé à un inspecteur aborigène étrange, bousculé par une culture neuve assise sur une terre ancestrale, Hole, en proie à ses propres démons, va plonger au cœur du bush millénaire. L’Australie, pays de démesure, véritable nation en devenir où les contradictions engendrent le fantastique comme l’indicible, lui apportera, jusqu’au chaos final, l’espoir et l’angoisse, l’amour et la mort : la pire des aventures.
Avis :
Quand on crapahute dans le monde littéraire du roman policier, il y a des noms qui ressortent plus que d’autres, et qui trustent bien souvent les têtes de gondole. On pense à Michel Bussi, Camilla Lackberg, Michael Connelly ou encore Jo Nesbo, et bien souvent, d’un avis plus ou moins commun, ces romans, aussi sympathiques soient-ils, restent des ouvrages peu surprenants, et qui se contentent de rester dans un carcan confortable. Mais s’ils se vendent aussi bien, c’est aussi parce qu’ils recèlent des ressorts scénaristiques malins et intéressants. Quid du premier roman de Jo Nesbo, L’Homme Chauve-Souris ? Alors que ce dernier se destinait à une carrière entre courtier et chanteur dans un groupe pop, on lui propose d’écrire un roman, tandis qu’il voyage en Australie pour six mois, et c’est en à peine cinq semaines qu’il boucle l’intrigue. Est-ce un bon signe ?
L’histoire nous plonge directement à Sydney, auprès d’un détective norvégien qui se nomme Harry Hole. Ce dernier est envoyé là-bas pour enquêter sur le meurtre d’Inger Holter, une starlette de la télévision qui a été retrouvée au bas d’une falaise. Sur place, il va devoir composer avec un acolyte farfelu, un aborigène qui va lui raconter toutes les us et coutumes du peuple australien, mais aussi les croyances et les légendes du peuple aborigène. Petit à petit, Harry va découvrir un pays hétéroclite, cosmopolite et son enquête va piétiner entre fausses pistes, drogués, prostituées, monde de la nuit et une équipe qui semble incapable de voir les évidences là où elles se trouvent. Bref, on va apprendre à connaître Harry Hole petit à petit, au gré des pièces d’un puzzle qui se forme au fur et à mesure des pages.
Très clairement, il n’y a rien de bien neuf au sein de ce roman, même s’il a été écrit en 1997. Ici, un meurtre, qui laisse pressentir la présence d’un serial killer, un détective un peu ravagé qui se retrouve en terre inconnue pour une raison précise, une équipe qui ne semble pas trop impliquée et une histoire d’amour qui va forcément mal se terminer. Tous les ingrédients du polar de base sont là, et rien ne viendra nous sortir d’une certaine torpeur. Le récit est long à démarrer. Jo Nesbo s’évertue à nous raconter l’histoire du peuple australien, ainsi que celle des aborigènes, tout en arborant fièrement des légendes qu’il a dû lire de-ci de-là. On reste dans l’attente que l’enquête débute, mais visiblement, l’auteur préfère articuler ses phases autour de Harry Hole, de son amour naissant pour Birgitta et de sa relation ambiguë avec Andrew, son partenaire.
Alors oui, on découvre des méthodes peu orthodoxes, notamment lorsqu’il faut extorquer des informations auprès d’un dealer réputé, ou encore avec un maquereau qui connait bien le milieu de la nuit, mais tout cela reste dans un environnement connu. Rien ne vient nous sortir d’un modèle attendu, et surtout, on a l’impression que l’enquête n’avance pas, et que certaines pistes sont balancées au hasard. A titre d’exemple, on peut parler du moment où l’équipe lance à brûle-pourpoint qu’il s’agirait peut-être d’un serial-killer alors qu’il n’y a qu’un cadavre. L’ensemble manque de cohérence, ou tout du moins de liant entre les différentes pistes évoquées. Et puis il y a un léger problème avec les personnages, qui sont à peine esquissés, et ne remplissent que certaines fonctions. On pense à l’asiatique qui gère les ordinateurs, ou encore le capitaine de l’équipe, un australien un peu bourru à l’humour assez particulier.
De ce fait, L’Homme Chauve-Souris, dans son intrigue et son ensemble, reste assez quelconque et ne recèle d’aucune surprise (si ce n’est d’en apprendre pas mal sur les mythes et légendes aborigènes). Fort heureusement, petit à petit, c’est son personnage principal qui prend de l’ampleur et se découvre au fil des pages. On découvre alors un homme qui pourrait paraître quelconque, mais possède un passif assez lourd, oscillant entre alcoolisme, bavure policière, magouille et histoire d’amour contrariée. Jo Nesbo arrive à construire, petit à petit, un personnage qui se révèle assez attachant, même s’il peut paraître un peu excessif dans ses dérives, se laissant dévorer par ses démons à la moindre contrariété. Il aurait été plus malin de le rendre plus nuancé, mais cela se retrouve-t-il peut-être dans les autres romans.
Au final, L’Homme Chauve-Souris est un premier roman assez basique et qui demeure assez simple dans sa structure. Et s’il ne faut pas oublier qu’il s’agit d’un premier effort écrit en à peine cinq semaines, il n’en demeure pas moins qu’il a du mal à sortir du tout-venant, et qu’il ne vieillit pas forcément bien. La lecture reste tout même plaisante et cette première enquête présente un personnage principal intéressant, au passé lugubre, et qui promet un bon développement dans ses prochaines aventures.
Note : 13/20
Par AqME