avril 20, 2024

Bros

De : Nicholas Stoller

Avec Billy Eichner, Luke MacFarlane, TS Madison, Monica Raymund

Année : 2022

Pays : Etats-Unis

Genre : Comédie, Romance

Résumé :

L’histoire de deux hommes dont la relation pourrait, peut-être, se transformer en une grande histoire d’amour. Peut-être. Il faut dire que ce sont des hommes très occupés.

Avis :

Réalisateur britannique, c’est aux Etats-Unis que Nicholas Stoller a fait la plus grande partie de sa carrière, devenant l’un des nouveaux visages de la comédie US. À son actif, le réalisateur peut se vanter d’avoir mis en scène « Sans Sarah rien ne va !« , et surtout sa suite, le déjanté « American Trip« . On lui doit aussi les sympathiques « Nos pires voisins« , ou encore, et c’est le seul pour l’instant que je n’ai pas vu de lui, « 5 ans de réflexions« .

Pour son nouveau film, Nicholas Stoller débarque avec une comédie romantique, et surtout, il fait quelque chose qu’on n’avait pas encore vu jusqu’à maintenant, puisque « Bros » se pose comme la première comédie romantique grand public qui s’arrête sur une histoire d’amour entre deux hommes. L’idée était aussi intéressante qu’elle pouvait véhiculer beaucoup de craintes, avec l’époque dans laquelle nous sommes, époque où bien souvent les personnages de séries ne sont que revendications et finissent par ne ressembler à personne (coucou Shar et Marvin de la série « Queer as folk » 2022). Heureusement pour nous, « Bros » est plus intelligent que ça, et même s’il emprunte parfois ce chemin, dans son ensemble, « Bros » est une jolie, drôle et touchante comédie romantique, qui tout en s’amusant du genre dont elle est issue, réussit aussi à bousculer les codes pour l’adapter à cette histoire d’amour. Bref, une belle réussite qui a tout compris, ou presque.

Bobby Leiber est un homme de quarante ans qui habite à Manhattan. Bobby est célibataire et il est très bien ainsi. Bobby a une vie bien remplie, entre ses podcasts et ses fonctions de directeur du futur musée de l’histoire LGBT qui devrait ouvrir d’ici quelques mois, enfin s’il arrive à obtenir les fonds qui lui manque. Dans l’intimité, Bobby enchaîne les coups sans lendemain rencontrés sur des applications et cela lui va très bien comme ça. Bref, Bobby est bien dans sa vie, puis un soir, dans un club, il tombe sur Aaron, le cliché du beau gosse, qui a à peu près la même vision que Bobby de la vie, et surtout des couples…

C’est assez dingue le chemin parcouru depuis toutes ces années, afin qu’un film américain comme celui-là puisse voir le jour. Dans mon enfance et mon adolescence, en tant que jeune gay, les premiers personnages homos que je me souvienne avoir vu furent évidemment Zaza dans « La cage aux folles » et surtout Nicolas Beaumont dans la série « Une famille formidable » (série que je regardais en grande partie pour ce personnage, qui me parlait). Bref, s’en est suivi après, « Philadelphia« , les deux séries « Queer as Folk« , « Le secret de Brockback Mountain« , « Weekend« , « Looking » ou encore « Free Fall« .

Pour la plupart de ces films ou séries, il y avait des formats dit grand public, mais souvent ces films nageaient dans le drame, et pour ce qui est de l’amour ou/et de la comédie romantique, les films se faisaient dans de plus petites productions. Puis en 2018 est arrivé « Love Simon » et bien des choses ont changé avec lui. « Love Simon » était le premier film grand public à parler du coming out, avec l’idée derrière ce sujet sérieux, de faire une comédie romantique, qui saurait toucher les cœurs et ce fut le cas.

Quatre ans après le film de Greg Berlanti, voici alors que débarque « Bros » et comme je le disais plus haut, le film de Nicholas Stoller est une belle réussite, car il se pose comme une vraie rom-com, qui s’accapare tous les codes de la comédie romantique de base, tout en les réinventant pour les transformer à la sauce LGBT. Mais attention, si Nicholas Stoller et Billy Eichner transforment ces codes, ils s’en amusent et en profitent au passage pour s’amuser à taper sur les revendications, en caricaturant bien souvent ce qu’on appelle aujourd’hui le wokisme et qu’est-ce que ça fait bien.

« Écrit par Stoller et Eichner, derrière l’histoire d’amour, « Bros » est aussi un film plus riche qu’il en a l’air et surtout plus critique aussi. »

Ainsi, « Bros » est avant tout une histoire d’amour. Une histoire d’amour entre deux hommes d’une quarantaine d’années qui se rencontrent par hasard, et qui vont apprendre à se connaître et possiblement voir un avenir ensemble. Alors bien sûr, dans un sens, le film est assez facile, car il coche toutes les cases, même les plus prévisibles, de la comédie romantique, avec la rencontre, la fulgurance des premiers mois, puis un petit caillou dans la chaussure qui amènera tout ce que vous pouvez imaginer par la suite. Mais là où chez d’autres, on tomberait dans le déjà-vu rébarbatif ici, jamais on n’a ce sentiment-là. Mieux encore, Nicholas Stoller et ses deux acteurs principaux nous entraînent avec romance, drôlerie, critique, voire même satire, et l’on ne voit pas passer le film qui saura autant nous amuser que finalement nous toucher.

Écrit par Stoller et Eichner, derrière l’histoire d’amour, « Bros » est aussi un film plus riche qu’il en a l’air et surtout plus critique aussi. Les deux hommes, avec cynisme et une certaine forme d’audace, s’amusent à gentiment caricaturer le milieu gay, abordant bien souvent le côté futile de ce milieu qui se rencontre sur des applications, qui se juge au physique, qui revendique beaucoup, qui ne cesse de faire la fête, ou encore qui est bien plus attiré par le sexe à plusieurs qu’autre chose (et ce qui est étonnant, c’est que même dans la caricature, c’est assez juste et bien vu, finalement). Puis derrière ça encore, « Bros » arrive aussi à se faire engagé, revenant avec cette idée de musée (puis sur d’autres points aussi) sur l’histoire des luttes LGBT, évoquant Stonewall par exemple, ou encore les luttes au cinéma (d’ailleurs, c’est très drôle comme le film se moque de certaines choses, sans jamais être rabaissant non plus).

Puis enfin, le dernier trait de cette belle écriture, c’est la tendresse et la délicatesse de ces personnages, qui sont le cœur de ce film. Tout en nuances, tout en doutes, Billy et Aaron, dans leur relation, dans leurs sentiments, dans l’évolution de ces derniers, dans leur peur, dans leurs blessures, sont vraiment très touchants, et s’ils sont capables de nous faire bien souvent rire, plus encore, ils sont capables de nous toucher profondément, et quand bien même leur histoire sera facile, finalement, on n’aurait pas voulu qu’elle soit autrement (le final est un cliché de romantisme). Le film parle beaucoup du fait d’être soi-même, de la confiance en soi, ou du jugement et du regard des autres.

À noter que Billy Eichner, qui est l’un des scénaristes, et plus largement, l’idée de ce film vient de lui, est aussi l’acteur principal et il se pose comme une très belle découverte pour ma part, tout comme Luke MacFarlane, qui livre une très belle prestation. À noter aussi de ce casting, les comédiens et comédiennes qui composent le tordant comité du musée, toujours à se chercher des noises en revendiquant, et quelques guest stars, dont une scène avec Debra Messing absolument tordante.

Bref, il en a fallu du chemin pour qu’un grand studio ose sortir une comédie romantique qui met en avant une histoire d’amour entre deux hommes. Amusant, très drôle dans tout ce qu’il entreprend (ou presque, oui parfois, il y a aussi certains traits qui sont lourds, la danse des culs de la famille amie de Billy), et enfin et surtout touchant, peignant une belle histoire d’amour, pleine de nuances, tenue par deux très bons et très beaux acteurs. Bref, j’y suis allé avec des craintes et j’en ressors en tenant un film qui se placera aux côtés de mes comédies romantiques préférées : « Love Actually« , « Il était temps« , « Coup de foudre à Nothing Hill« , ou encore « Nuit blanche à Seattle« .

Note : 16,5/20

Par Cinéted

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