mars 28, 2024

Nowhere Boy

De : Sam Taylor-Johnson

Avec Aaron Taylor-Johnson, Kristin Scott Thomas, Anne-Marie Duff, Thomas Brodie-Sangster

Année : 2010

Pays : Angleterre, Canada

Genre : Biopic

Résumé :

John Lennon a grandi dans une famille pleine de secrets. Elevé par sa tante Mimi, il retrouve à l’adolescence sa mère, Julia.
Arrivé en âge de comprendre le mystère qui a déchiré ces deux sœurs, John veut réconcilier sa famille. Une paix fragile s’installe, aussitôt ruinée par une tragédie.
Mais sa mère a légué à John un don précieux : la musique. Un jeune homme tourmenté trouve enfin sa voie.  

Avis :

Si l’on ne présente plus un groupe aussi mythique que les Beatles, leur légende ne cesse de fasciner à travers leur succès planétaire, leur œuvre musicale et l’histoire respective de ses membres. Étant donné la densité de leur carrière, il paraît difficile, voire vain, de développer leur parcours en un seul biopic. À ce jour, les cinéastes qui se sont lancés dans un tel projet se sont focalisés sur une période précise. On songe à Backbeat sur leur passage à Hambourg ou Birth of the Beatles qui s’attarde sur la formation et les premières années d’activité du groupe. Avec Nowhere Boy, Sam Taylor-Johnson se penche sur l’adolescence tourmentée de John Lennon.

Exception faite de biographies, cette partie de la vie de l’artiste reste relativement méconnue du grand public. Là encore, les producteurs préfèrent se focaliser sur ses dernières années d’existence et son assassinat, comme l’atteste Chapitre 27 et The Killing of John Lennon. Le présent métrage s’éloigne donc de l’aura iconique de John Lennon, de son œuvre et de ses engagements pacifistes. La mise en scène s’appuie sur un traitement tout en retenue où la sobriété graphique renvoie au réalisme du récit. En l’occurrence, le spectateur se retrouve plongé dans la seconde moitié des années 1950 dans les quartiers populaires de Liverpool.

Nowhere Boy s’affranchit immédiatement des codes du biopic musical, même si on dénote des éléments inhérents au genre. On songe à ce concours de circonstances qui gravite autour de la passion naissante de la musique. Cependant, celle-ci n’est pas considérée comme un vecteur de la gloire en devenir, mais plutôt un exutoire. Une échappatoire salvatrice qui permet d’anesthésier les souffrances et les traumas de l’enfance, à défaut de les oublier. L’ambition première du film n’est donc pas de mettre en avant un protagoniste anonyme et talentueux, mais de dépeindre une période tourmentée qui a eu un rôle essentiel, sinon fondamental, dans sa carrière.

On se retrouve alors en présence d’un drame familial qui ne sombre guère dans le pathos ou l’auto-apitoiement. Au débordement émotionnel, l’histoire privilégie la nature plus ou moins emportée de son personnage principal, ses errances, son refus d’intégration dans les carcans sociaux qui lui sont prédestinés. Il ne s’agit pas de marginalisation, mais d’une volonté de s’affranchir des attentes de son entourage, de se tourner vers l’anticonformisme. Cette tonalité et cette subtilité dans l’évolution de son caractère évitent d’amalgamer le comportement et les frasques de John à une « simple » crise d’adolescence passagère.

En ce sens, on note aussi des considérations familiales relativement complexes à appréhender, à tout le moins pour établir le rôle et l’importance des intervenants selon leur passif respectif. Cela vaut pour la personnalité versatile de sa mère, ses réactions tour à tour enfantines, puis tendancieuses. Leur rapport est d’autant plus déstabilisant que les notions d’amour et d’affection se heurtent à des gestes et allusions pleins de sous-entendus, d’élans passionnés troublants, presque incestueux, au regard du lien mère/fils qui les unit. En parallèle, l’intégration de flash-back épars en guise d’intermèdes ajoute au mystère de leur relation, des évènements passés qui ont conduit John à vivre chez sa tante et son oncle.

Il est vrai que l’approche laisse quelque peu en retrait la musique elle-même. Comme évoqué précédemment, ce n’est pas le sujet principal tel qu’on le conçoit. Cependant, l’histoire amorce le succès des Beatles à travers la formation des Quarrymen. Prétexte à la rencontre de John Lennon avec Paul McCartney, puis celle de George Harrison, cet aspect de l’intrigue s’avance comme un prologue à la Beatlemania. On aurait simplement apprécié que la bande-son soit davantage mise en avant, même si elle rappelle les grandes tendances de l’époque et le style des Quarrymen, à mi-chemin entre le rock’n roll et le skiffle.

Au final, Nowhere Boy est un métrage ambivalent dans ses intentions. En partant d’un postulat propre au biopic, l’évocation de l’adolescence tumultueuse de John Lennon se rapproche plus du drame intimiste. Ce qui peut paraître surprenant en considérant la notoriété de son personnage principal. Le film de Sam Taylor-Johnson prend à contrepied les attentes du public par cette volonté à ancrer l’un des membres fondateurs des Beatles dans un contexte réaliste, bien éloigné de son futur succès international. Il en ressort une histoire nuancée et intéressante dans sa manière d’aborder les traumatismes familiaux, de s’y confronter à travers la musique.

Note : 14/20

Par Dante

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