Avis :
Le monde de la musique est perclus de groupes qui tentent par tous les moyens de survivre et de se faire connaître. Si certains pays ont la chance d’avoir un public curieux et ouvert, ce n’est pas forcément le cas partout. Il suffit de jeter une oreille en France pour se rendre compte que les groupes de rock et de métal galèrent à se faire connaître et trouver un label. Pour cela, il faut s’exporter vers l’étranger. Pour autant, certains groupes américains ont du mal à tirer leur épingle du jeu et à se faire un nom. C’est un peu le cas de Innertoil, tout petit groupe de hard rock originaire du Minnesota. Sans label, totalement inconnu de par chez nous (et même aux States si on s’en réfère au nombre d’abonnés sur Youtube et Facebook), les américains essayent pourtant se faire connaître avec leur premier album.
Sorti en 2018 en toute discrétion sur leur bandcamp, Innertoil ne compte pas forcément bousculer les codes du hard pour percer. Dès la première écoute, on ressent tous les accrocs du premier album auto-produit. Le son n’est pas bon, il y a une grosse réverbération lors de l’enregistrement, et jusqu’à l’artwork de la pochette qui laisse franchement à désirer. Néanmoins, cela ne doit pas occulter notre jugement quant à la capacité du groupe à devenir plus connu dans un futur plus ou moins proche (et à l’heure où j’écris ces quelques lignes, un nouveau single vient de sortir, prouvant la ténacité du groupe et sa volonté d’aller de l’avant). Le premier constat que l’on peut faire, c’est de voir qu’il y a peu de morceaux, mais ils sont tous assez longs, dépassant les cinq minutes. Une preuve de refuser un carcan radiophonique et de se poser en outsider.
Cependant, le groupe a-t-il les capacités de nous surprendre ? Pas vraiment. Le premier titre, Their Turn, se pose comme un titre assez énergique, avec un riff addictif, mais qui manque cruellement d’originalité. Guitare et basse se répondent bien, mais le titre devient vite redondant, s’oubliant assez vite. Il manque un petit solo, ou un pont suffisamment percutant pour marquer. De plus, la voix de la chanteuse est bien trop modifiée, rendant une copie pas forcément optimale. C’est dommage, car on sent qu’il y a des choses à en tirer. Defiant Liar va être un peu plus intéressant dans ses riffs. C’est plus percutant et on sent une volonté de faire bouger les nuques. Malheureusement, il réside toujours les mêmes scories, à savoir une production aux fraises et un certain ennui au bout d’un moment.
The Victim va permettre au groupe de changer un peu son fusil d’épaule. Long de plus de six minutes, la formation lorgne du côté d’un hard à tendance bluesy dans son introduction pour ensuite aller vers quelque chose de plus lourd. C’est assez intéressant et cela permet même de voir les qualités techniques des musiciens. Mais, comme toujours, on retombe sur des travers pénibles et sans intérêt. La voix de la chanteuse ne s’envole jamais et n’a pas de tessiture particulière. Pire, elle semble obligée de modifier sa voix avec un logiciel pour chanter un peu juste. Storm on the Horizon est peut-être le pire titre de l’album, avec ses élans country et ses onomatopées ringardes. Le morceau suite une ligne plate et sans relief, ce qui est assez triste. Et que dire de Sick, le plus court morceau de l’album, et qui s’avère très oubliable.
Broken Mirror se veut plus travaillé que le reste. Le groupe essaye de mettre une ambiance malsaine dans ce titre, mais n’y parvient qu’à moitié. S’inspirant un peu de ce qui se faisait dans le Nu-Métal des années 2000, le groupe n’arrive finalement pas à créer quelque chose de consistant. Si le chant est assez aérien et apporte une contrebalance intéressante aux riffs plus lourds, rien ne viendra nous sortir d’une certaine léthargie. Back in the Game renoue avec les références Blues, mais encore une fois, si ça semble maîtrisé d’un point de vue technique, la production vient tout gâcher. Enfin, Suspects & Alibis clôture sans grande surprise un album qui varie les plaisirs, sans pour autant se donner les moyens de surprendre et percuter son auditoire.
Au final, The Enemy Within, le premier album d’Innertoil, contient toutes les scories d’un premier album sans le sou. La production est anémique, ne permettant pas au groupe d’exploiter tout son potentiel. On sent bien que tout le monde en a sous la pédale, mais pour autant, rien ne vient nous charmer ou nous marquer. Il est toujours complexe de faire fi d’une production inexistante, mais bien souvent, cela altère tellement l’enregistrement et le son, qu’il est bien difficile de passer outre. L’exemple ici est flagrant et tout cela manque d’argent. Dommage donc, car Innertoil peut, peut-être, prouver avec le temps qu’il a des choses à dire et à faire entendre.
- Their Turn
- Defiant Liar
- The Victim
- Storm on the Horizon
- Sick
- Broken Mirror
- Back in the Game
- Suspects & Alibis
Note : 10/20
Par AqME