octobre 5, 2024

Tekhenu

Fiche technique :

Création : Daniele Tascini, Dávid Turczi

Illustrations : Jakub Fajtanowski, Michał Długaj, Aleksander Zawada

Joueurs : 1 à 4

Durée : 1 à 2h

Type/public : Réflexion/Expert

Mode de jeu : Solo, Compétitif

Age : 14 ans

Mécaniques : Draft de dés, choix d’actions, gestion de ressources

Première parution : 2020

But du jeu :

Vous incarnez un noble de l’Egypte antique, s’attelant à la construction du temple de Amon-Râ. A vous de tirer votre épingle du jeu en priant les bonnes divinités au bon moment en fonction de la lumière qui éclaire la grande Obélisque pour marquer le plus de points !

Règles :

Chaque joueur récupère son matériel, composé d’un plateau individuel (comprenant quatre zones de productions de ressources, une piste de Bâtiments, une piste de Statues, et une Balance penchant soit vers le Pur soit vers le Corrompu), de Colonnes, de Statues, de Bâtiments, ainsi qu’un Or et un Scribe. L’Obélisque est placé sur le plateau avec sa roue, découpée en zones représentant l’orientation de la lumière (zone de Soleil, de Pénombre et d’Obscurité). Les 6 sections de la roue font face aux 6 Actions Divines du jeu. 3 dés sont lancés et placés dans chaque section de l’Obélisque, et en fonction de leur couleur, deviennent Purs, Corrompus ou Interdits.

Les dés ont 6 faces et sont de 5 couleurs : Gris, Marron, Jaune, Blanc, ou Noir. Le Gris est toujours Corrompu. Le Blanc est Pur quand il est dans une section de la zone Soleil, Corrompu quand il est dans la Pénombre, et Interdit quand il est dans l’Obscurité. Les autres couleurs fonctionnent selon le même principe avec des attributions différentes.

Sur leur piste sont posés les marqueurs de Bonheur et de Population. Les tuiles Colonnes sont placées près du plateau, la piste des Cartes est  également remplie. Chacun pioche deux Cartes Décret et en choisit une sans la montrer aux autres. L’on révèle au hasard des Cartes Départ et chaque joueur en drafte deux, déterminant le premier joueur. Enfin, en commençant par celui-ci, tout le monde récupère les gains octroyés par les Cartes Départ et la Carte Destinée de son choix.

Le plateau de jeu. A droite l’Obélisque, et sur son socle pivotant les différents secteurs. En haut à gauche, l’Action Divine Horus. En haut à droite, le Temple. Tout en bas, la piste des cartes, séparée en quatre sections. Juste au dessus, la piste de Bonheur et de Population. En bas à gauche, l’Action Divine Osiris permettant d’augmenter ses productions.

A son tour, le joueur choisit 1 dé Pur ou Corrompu autour de l’Obélisque. Il peut soit produire des ressources correspondant à la couleur du dés, soit effectuer l’Action Divine associée au secteur dans lequel il a pris le dé ; puis il dépose ce dé sur son plateau individuel du bon côté de la balance (côté Pur ou Corrompu) sans en modifier la valeur. Avant d’effectuer son action, il peut dépenser un Jeton Scribe pour modifier le résultat du dé, entre -2 et +2.

Si le joueur produit des ressources, la couleur et la valeur du dé indiquent son gain. Un dé Gris ne peut être utilisé pour cette action, mais un dé Blanc fournit du Calcaire, un Marron du Pain, etc. Le joueur récupère autant de ressources que le résultat du dé, mais tout excédant par rapport à la jauge de production de son plateau individuel est placée sur la Balance, côté Corrompu.

Exemple : Joueur Rose prends un dé Jaune de valeur 5. Sa jauge de production de Papyrus est à 4. Il gagne donc 4 Papyrus, celui qu’il n’a pas pu prendre rejoint le côté Corrompu de sa Balance.

Viennent ensuite, au coeur du jeu, les 6 Actions Divines :

  • Horus permet de construire une Statue en payant le coût indiqué sous la piste des Statues sur le plateau individuel. La valeur du dé indique à quel emplacement il est possible de la mettre, sachant qu’une statue sur un secteur de l’Obélisque octroie un bonus lorsqu’un adversaire effectue l’Action Divine associée au secteur.
  • Râ permet de placer une Colonne dans l’enceinte du Temple. La valeur du dé indique sur quelle tuile va se positionner la Colonne. La case du Temple choisie donne un bonus en Points de Victoire (PV) ou en ressources, des PV sont marqués en fonction des Bâtiments autour du Temple, et un bonus est éventuellement appliqué selon la zone de lumière où a été pris le dé.
  • Hathor permet de placer un Bâtiment autour du Temple et de gagner des ressources selon les symboles disponibles à l’intérieur. Des PV sont marqués selon le nombre de Colonnes que l’on possède à l’intérieur, et le joueur avance son marqueur de Population de la valeur du dé sélectionné.
  • Bastet permet de faire avancer le marqueur de Bonheur de la valeur du dé (sans dépasser celui de Population), et éventuellement de récupérer des Scribes.
  • Thot permet de piocher des cartes sur la piste. Cette piste est découpée en 4 sections, la blanche, la rouge, la verte et la bleue. Le joueur choisit la section qu’il souhaite et récupère un nombre de cartes dépendant de la valeur du dé, mais son marqueur de Bonheur indique à quelles sections il a le droit d’accéder. Les Cartes Bénédiction sont des effets immédiats, les Technologies des Effets Permanents, et les Décrets permettent de marquer des PV en fin de partie.
  • Osiris permet de construire un Bâtiment de type Atelier ou Carrière, en baissant d’un cran le marqueur de Bonheur. La valeur du dé indique la ligne dans laquelle placer le Bâtiment, et en fonction de la Colonne sélectionnée, le joueur gagnera des productions pour certaines ressources.

Au lieu de produire des ressources ou de sélectionner une Action Divine, le joueur peut défausser 2 Scribes pour invoquer Anubis : il prend le dé de son choix, n’importe où sur le plateau (même un Interdit), et effectue l’action de son choix en prenant simplement en compte la valeur du dé. Celui-ci sera ensuite posé au centre de la Balance, au lieu d’un des deux côtés.

Quand le joueur a terminé son action et placé son dé sur la Balance, le joueur suivant procède de même.

Une fois que tous les joueurs ont placé 2 dés sur leur plateau, l’Obélisque effectue une Rotation : il tourne d’un cran en sens horaire. Trois dés sont tirés du sachet et ajoutés à chaque zone de Pénombre. Les dés sont agencés pour respecter leur nouvelle pureté/corruption/interdiction au sein de chaque secteur.

Toutes les 2 Rotations, un Jugement a lieu : l’on compare les sommes de chaque côté des Balances des joueurs, la Pureté en positif et la Corruption en négatif. Le joueur s’approchant le plus du 0 est le nouveau premier joueur, et plus on est loin du 0, plus on jouera tard dans le tour. Les joueurs peuvent dépenser des Jetons Foi pour ajouter 1 au côté qu’ils désirent. Les égalités sont départagées par les Cartes Destinée.

Exemple : Joueur Bleu possède des dés de valeur 1, 2 et 4 du côté Pur, ainsi qu’un 5 côté Corrompu. Sa valeur de Jugement est donc +2. Joueur Rose possède un dé de valeur 6 côté Pur, des dés de valeurs 4 et 5 côté Corrompu, et un dé de valeur 6 au centre grâce à Anubis. Sa valeur de Jugement est -3. Il dépense 3 Jetons Foi côté Pur pour ajouter 3, sa valeur de Jugement passe à 0. Il est le nouveau premier joueur, Joueur Bleu sera donc second.

Un plateau individuel. Aucune statue n’a été construite, mais 8 Bâtiment l’ont été. Les niveau de production sont respectivement de 3 Papyrus, 4 Pain, 2 Calcaire et 2 Marbre. La Balance est équilibrée : d’un côté 5+1 Pur, de l’autre 5 Corrompu + 1 à cause de la ressource produite en excédent. Le dé 5 Blanc a été utilisé suite à une action Anubis, il n’est donc pas sur un côté de la Balance. Au prochain Décompte, le joueur devra dépenser 5 Pain.

Les Jetons Foi encore possédés sont défaussés, les Cartes Destinée sont remises au centre de la table est sont draftées en fonction du nouvel ordre du tour, les bonus qu’elles donnent sont remportés et les dés sur les Balances sont remis dans le sachet.

Tous les 2 Jugements a lieu un Décompte, récompensant les joueurs sur divers aspects de leurs progressions (Piste de Bonheur, Bâtiments, Statues, Colonnes, etc). Ils doivent également dépenser du Pain en fonction des Bâtiments qu’ils ont construits, sous peine de perdre des PV.

Une fois que le deuxième Décompte a eu lieu, la partie s’arrête ! Les joueurs révèlent leurs Cartes Décret, en choisissent 3 qui marqueront des PV additionnels. Suite à ce gain, le joueur obtenant le plus haut total est le vainqueur !

Avis :

Tekhenu est un jeu issu d’auteurs proposant des titres réservés à un public averti, avec des mécaniques demandant réflexion et anticipation. Celui-ci ne déroge pas à la règle et semble costaud en terme de contenu, de matériel et de cogitation. Est-il un bon jeu pour autant ?

La boîte pèse son poids et l’on comprend rapidement pourquoi : le plateau est très grand, en 6 parties ! Faire une partie nécessitera un peu de place et une table relativement conséquente. A l’ouverture, l’on remarque aisément un élément de décor qui sort du lot : le fameux Obélisque ! Sans mauvais jeu de mot, tout le jeu tourne autour de lui. Le souci est qu’il est vraiment imposant et masque la visibilité de ce qui se trouve derrière… Un peu dommage mais il est quand même du plus bel effet ! Le matériel individuel est plutôt classe, avec des Colonnes, des Statues et des Bâtiments en bois ! Le reste est assez classique, avec des tuiles, des jetons, des cartes, etc. La présence de récapitulatifs pour les différentes actions est appréciable, mais on aurait préféré plus de détails et un rappel des différents éléments de fins de tours (Rotation, Jugement, Décompte). Même si c’est écrit au dos de la règle, c’est moins pratique qu’une petite fiche. Quoi qu’il en soit, pour le matériel c’est quasiment un sans faute !

Le Temple, formant un carré de 5 par 5. Autour, des emplacements pour Bâtiments et même pour Statues. Au centre, des cases donnant divers bonus. Le joueur Rose a construit 4 Colonnes, le Bleu 2.

Les illustrations sont plutôt jolies, quelques easter eggs sont disséminés sur le plateau, la signalétique est plutôt claire une fois qu’elle a été comprise, au point qu’il est quasiment possible d’expliquer le jeu juste en se servant de la symbolique autour des secteurs des Actions Divines. De la même façon, un sablier est présent à chaque endroit concerné par les Décomptes, par exemple. Le jeu est donc très clair ! Et l’ambiance de l’Egypte antique est bien retranscrite, le tout est visuellement très attractif !

Le coeur du jeu est son gameplay mêlant plusieurs mécaniques, la principale étant le draft de dés. Il faut bien se rendre compte qu’au total, chaque joueur sélectionnera 16 dés, et que comme souvent dans ce type de jeu, il sera impossible de tout faire. Le choix se doit donc d’être mûrement réfléchi et l’optimisation des actions est plus que souhaitée. Comme toujours en matière de draft, laisser un élément c’est donner la possibilité aux autres de l’utiliser. Surveiller les besoins en dés Purs et Corrompus est également un élément à prendre en compte. En effet, à chaque Jugement il est préférable d’équilibrer sa Balance pour jouer le plus tôt possible, se rendre compte qu’il manque un dé de tel ou tel côté à un adversaire et lui enlever sous le nez peut être un mouvement intéressant.

Au début de la partie, deux Cartes Décret sont distribuées. Elles permettent de sélectionner une orientation de jeu parmi deux, ce qui peut aider à se focaliser sur une manière de scorer. Ce qui n’est pas du luxe quand on voit que tous les aspects sont importants. « Perdre un tour » en récoltant des ressources est souvent indispensable. Chaque Action Divine ayant besoin d’une ressource différente, il est assez facile de voir qui veut faire quoi et d’agir en conséquence. D’une manière générale, il faudra jouer sur un peu tous les tableaux malgré tout… Pouvoir stocker plus de ressources servira pour toutes les actions mais coûtera du Bonheur. Bonheur qui est directement relié aux Cartes auxquelles on peut accéder, et qui coûtera du Papyrus. Les Statues sont utiles pour grapiller des petits bonus quand un autre joueur effectue telle ou telle action mais la première coûte assez cher en Marbre. Construire un Bâtiment autour du Temple coûte du Pain qui est également indispensable si l’on veut éviter de perdre des PV lors des Décomptes… Et c’est sans mentionner les Cartes Bénédiction et Technologie qui peuvent donner une action supplémentaire ou divers bonus sous certaines conditions. Les Cartes Décret sont difficiles à avoir car il faut augmenter son niveau de Bonheur jusqu’au seuil correspondant, donc sa Population (vu que le marqueur Bonheur ne peut dépasser l’autre), et donc ne pas faire trop de Bâtiments de production… Bref, tout un équilibre à trouver un peu de partout ! Et c’est cet enchaînement d’actions, ce cheminement, qui représente le principal attrait du jeu en terme de réflexion.

De plus, à chaque Rotation, l’Obélisque pivote, les zone éclairées changent, les dés qui étaient accessibles avant risquent de ne plus l’être et inversement, il est donc possible d’anticiper certaines actions.

Gros plan sur l’Obélisque. L’on remarque que son socle est séparé en 3 zones de lumière, Soleil et Obscurité occupant 2 secteurs consécutifs. Au sein de chaque zone, la couleur des dés et son état : s’il est Corrompu, Pur ou Interdit. Ici, dans l’Obscurité, Jaune est Interdit et ne pourra être sélectionné pour une action ; Gris est toujours Corrompu ; Noir est Pur. Juste à droite dans la Pénombre, Marron est Pur.

La rejouabilité est assurée par l’aléatoire des dés évidemment et le tirage des cartes. Des dés de couleurs ou de valeurs différentes signifient des actions accessibles différentes, l’adaptabilité des joueurs sera donc mise à rude épreuve ! Et comme dans tout jeu de draft, les interactions concernent  principalement le fait de prendre tel ou tel dé, et donc d’enlever une possibilité mais de laisser les autres. Il y a quand même une course aux points dans la zone d’Osiris, puisqu’à chaque Décompte, le joueur ayant le plus de Bâtiments dans chacune des colonnes remporte les PV. Dans tous les cas, aucune attaque directe contre quiconque.

Si le thème est bien rendu, surtout graphiquement, il est dommage de voir que les Actions Divines, donc liées aux différents dieux, n’ont pas toujours de lien avec leur mécanique ou leur effet. S’il est appréciable de voir Thot, dieu de l’écriture, associé à l’action de piocher des cartes, l’on peut se demander le lien entre l’Action Divine Horus (consistant à ériger des Statues) et la divinité des guérisseurs, ou l’action spéciale Anubis (un dieu funéraire) comme action joker… Un peu dommage car il n’y a aucun lore dans le jeu. Mais ce petit défaut peut être pardonné si l’on se concentre plus sur la mécanique du jeu et moins sur l’enrobage.

Un jeu d’une grande profondeur, doté d’un matériel de qualité, une course aux points de longue haleine où chaque dé(cision) est primordial(e), et où optimisation, réflexion et anticipation sont de rigueur ! Il possède quelques petits défauts qu’on lui pardonne volontiers tant le plaisir de jeu est au rendez-vous !

Note: 17,5/20

Par Flippy Who

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