avril 20, 2024

In the Shadow of the Moon

De : Jim Mickle

Avec Boyd Holbrook, Michael C. Hall, Cleopatra Coleman, Bokeem Woddbine

Année: 2019

Pays: Etats-Unis

Genre: Thriller, Science-Fiction

Résumé :

Un policier est obsédé par la traque d’un mystérieux tueur en série dont les crimes défient toutes explications…

Avis :

Jim Mickle est un réalisateur qui est très intéressant. Il fait partie de ces rares auteurs qui ont une véritable patte visuelle et qui essaye à chaque film de surprendre. Il commence sa carrière dans le film de zombie. Enfin, pas exactement, puisque dans Mulberry Street, les gens se transforment en une sorte d’hybride entre le rat et l’humain. Le film est relativement mauvais, mais il en faudra plus pour décourager le jeune cinéaste. Il se lance alors dans le film de vampire avec Stakeland, et c’est une belle surprise. Intelligent, avec des partis pris incisifs, le film est une réussite. Dès lors, sa carrière prend un nouvel essor. Il va s’entourer avec des acteurs plus connus, dont Michael C. Hall (Dexter) et lâche un peu l’horreur pour aller dans le thriller.

Il débute cela avec Cold in July. S’inspirant fortement de la réalisation d’un Winding Refn couplé avec un John Carpenter, le film est un succès véritable, avec des fulgurances d’une rare violence. Il n’en fallait pas plus pour que le profil du bonhomme intéresse Netflix, qui va lui proposer de réaliser In the Shadow of the Moon, un thriller SF qui mélange enquête policière et voyage dans le temps. Un film qui aura du mal à trouver sa voie, et cela malgré une très bonne première partie. Sans être non plus une catastrophe, on voit que Jim Mickle ne transforme pas l’essai et n’arrive pas encore à fournir le film qui le fera vraiment décoller, et cela malgré une belle réalisation et quelques élans agréables.

Tous les neuf ans

L’histoire du film démarre en 2024 avec des bâtiments en ruine, puis très vite, on se retrouve en 1987. Un jeune inspecteur bientôt papa et qui souhaite monter en grade va enquêter sur la mort mystérieuse de plusieurs personnes dont le cerveau a tout simplement fondu. Obnubilé par cette enquête, il va rencontrer une jeune femme métisse qui est à l’origine de ces meurtres. Et manque de pot, il la tue alors qu’elle tente de s’évader. Neuf ans plus tard, alors père célibataire car sa femme meurt en couche, les meurtres recommencent, et le flic, devenu alors plus gradé dans la police, va revivre le même enfer, mais qui coûtera cette fois-ci la vie de son meilleur ami. Et tous les neuf ans, le cycle recommence, avec des meurtres liés et une jeune femme qui apparait. Notre héros va donc être en quête de compréhension envers ces meurtres.

Le pitch est assez alléchant car il s’annonce comme un bon retournement de cerveau. A la manière d’un Predestination des frères Spiering, In the Shadow of the Moon promettait des moments intéressants et une jolie réflexion. Sauf que ce ne sera pas vraiment le cas. En premier lieu, il faut saluer la première partie du film, c’est-à-dire le moment polar et enquête. On est dans quelque chose de très terre à terre, mais qui tient la route. On présente brièvement les personnages, principaux comme secondaires, et on va se prendre au jeu du chat et de la souris, essayant aussi de découvrir les raisons de ces meurtres. Le début est donc ludique, en plus d’être très bien mis en scène. Jim Mickle maîtrise tout l’aspect technique, offrant de beaux tableaux, mais n’oubliant jamais ses premiers amours avec des fulgurances gores bienvenues. Malheureusement, tout cela ne va pas tenir.

La route tourne

Plus on avance dans le temps, plus l’enquête se précise et le film part sur les sentiers sinueux de la SF et du voyage temporel. Le héros va devenir obnubilé par cette affaire, au point de laisser tomber sa fille, et de se faire passer pour fou auprès de sa famille restante. Et l’enquête de piétiner, n’arrivant plus à tenir son suspens. Et c’est bien là toute la maladresse du réalisateur, qui va beaucoup trop loin dans son délire de manipulation dans le temps et de deus ex machina qui sortent d’un chapeau de magicien. Le film devient moins tendu, moins intéressant, et devient un simple divertissement avec un type qui devient fou à force de chercher midi à quatorze heures. Le scénario s’embourbe dans des explications lascives à propos de la lune, et les inserts fantastiques ne fonctionnent jamais vraiment. Il manque du liant entre l’aspect thriller et le côté SF, qui nous vaudra du coup une surexplication à la toute fin du film pour que l’on comprenne certaines choses.

Mais fort heureusement, le film a tout de même des choses à dire. Gravitant continuellement autour Boyd Holbrook (très bon), on va avoir divers thèmes qui seront abordés, comme celui de la paternité. Père célibataire, puis délaissant sa fille pour rechercher celle qu’il accuse d’être à l’origine de tous ses maux (et de la mort de sa femme), ce flic devient l’ombre de lui-même, voire même une sorte de sans-abri marginal. Le film de nous rappeler alors que les enfants sont notre futur et que c’est à nous, parents, de les éduquer pour qu’ils fassent un monde meilleur. En filigrane, on aura aussi un fort texte sur le racisme. Les émeutes raciales sont en constante discussion durant le film. Que ce soit en fond sur une télé, ou lors d’une manifestation, ou même sur les raisons de ces voyages temporels et de ces meurtres, le racisme reste le point d’ancrage du métrage. Le réalisateur livre d’ailleurs une critique sans concession du racisme systémique américain envers la communauté afro-américaine.

Manque d’empathie

Si le fond est plutôt intéressant, le film loupe aussi le coche avec ses personnages. Si Boyd Holbrook est plutôt bon et sympathique, il reste un simple type en perdition qui délaisse sa fille pour une enquête qui n’a que peu d’impact sur la société et le monde. Le twist final ne marchera d’ailleurs qu’à moitié, révélant la nature du tueur, mais on manque tellement d’empathie envers le héros que cela ne nous touchera pas plus que cela. Quant aux personnages secondaires, ils seront au mieux transparents. Michael C. Hall grimace souvent comme qu’il souffrait d’une constipation passagère. Bokeem Woodbine s’en sort pas trop mal, mais il n’est pas indispensable. Quant à Cleopatra Coleman, elle fera ce qu’elle avec ce qu’on lui donne, c’est-à-dire pas grand-chose, si ce n’est courir sans arrêt. Bref, tout cela manque clairement de consistance et faire foirer le final qui se veut beau et touchant.

Au final, In the Shadow of the Moon n’est clairement pas un mauvais film, mais c’est un métrage qui manque de cohésion entre sa première partie et son avancée dans l’histoire. Le début est terriblement accrocheur, avec son côté techno-thriller un peu gore, mais par la suite, les choses se délitent petit à petit, jusqu’à en perdre de l’intérêt. Notamment quand déboule un pseudo bad guy scientifique qui tue des cochons. Bref, Jim Mickle montre qu’il est un petit orfèvre dans la maîtrise technique, mais son scénario manque de mordant et d’empathie pour pleinement nous convaincre.

Note : 12/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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