avril 18, 2024

Black Christmas

De : Sophia Takal

Avec Imogen Poots, Aleyse Shannon, Lily Donoghue, Brittany O’Grady

Année: 2019

Pays: Etats-Unis, Nouvelle-Zélande

Genre : Horreur

Résumé :

Sur un campus universitaire, lors des vacances de Noël, des filles de la confrérie sont les proies d’un tueur en série.

Avis :

Durant les années 70, le slasher en est encore à ses balbutiements. Si l’on peut considérer Psychose comme la source du genre, La Baie Sanglante de Mario Bava posera aussi des jalons qui seront suivis par de nombreux autres films plus ou moins marquants. D’un commun accord, assez étrange, beaucoup de personnes évoquent Black Christmas de Bob Clark comme le premier slasher de l’histoire du cinéma. Des jeunes filles dans une sororité, des messages angoissants au téléphone et des meurtres mystérieux viendront ponctuer ce film d’horreur interdit aux moins de 18 ans à l’époque. Fort de son succès et de son statut, un remake verra le jour en 2006, reprenant finalement tous les codes du premier, sans jamais réussir à reproduire son ambiance glauque et angoissante. Treize ans plus tard, une nouvelle mouture voit le jour.

Pourquoi refaire, encore une fois, un Black Christmas ? Quel intérêt à produire et filmer un tueur en série qui bute des nanas en pleine période de Noël ? Ce sont là des questions essentielles pour justifier le lancement d’un nouveau remake. Car si le premier se suffisait largement à lui-même, on ne peut qu’y voir un aspect mercantile quant au premier remake de 2006, surfant sur une vague nostalgique de reprises de films d’horreur cultes. Aujourd’hui, ce nouveau Black Christmas veut se poser comme un film moderne post Metoo où des femmes sont prises pour cible par une cabale masculine. On aurait pu y voir un pamphlet purement féministe, une preuve que les femmes peuvent être supérieures aux hommes, mais le film de Sophia Takal va être tout son contraire, plombant son récit avec des personnages insupportables et démontrant, à tort, que finalement, ces frondes SJW desservent les causes défendues.

Nous allons donc suivre Riley, une jeune étudiante qui a un passif compliqué, puisqu’elle a été abusée sexuellement par son ex petit-ami. Ce dernier coule des jours heureux dans sa confrérie et cela rend folle de rage Kris, une SJW acharnée qui fait des pétitions pour renvoyer un prof de lettres qui fait étudier des auteurs soi-disant racistes ou machistes. Alors que Riley et ses trois copines montent un show de Noël pour dénoncer les actes ignobles des hommes, elles reçoivent coup sur coup des textos menaçants. Et lorsque des tueurs masqués font irruption dans leur maison, une course pour survivre se met en place. Mélange de slasher, de home invasion et d’une pointe de fantastique, Black Christmas se mélange les pinceaux, ne sachant finalement que choisir comme direction, se perdant dans un déluge de dénonciations, sans jamais prendre le temps de réfléchir à une solution.

D’un point de vue scénaristique, le film de Sophia Takal est une purge totale. Premièrement parce qu’il refuse obstinément de reprendre les codes du film originel (pourquoi alors nommer son film ainsi si ce n’est pour faire écho à une certaine nostalgie), et deuxièmement, parce qu’il loupe tout ce qu’il entreprend dans son fond. On comprend vite que le film se veut ultra féministe, à la sauce Assassination Nation, mais il en oublie d’apporter une réelle intelligence dans son propos. Ici, tout est manichéen. Les hommes sont des crevures, ils sont tous mis dans le même panier, et les femmes sont toutes des victimes potentielles d’agresseurs fous de sexe. C’est une vision très réductrice, très simpliste et surtout complètement fausse. Ce qui est très dangereux, et même si ce n’est qu’un film, c’est que sur la fin, la réponse à la violence faite aux femmes est… la violence, voire pire, un holocauste. Car oui, le dernier plan du film n’est autre que des hommes qui crament dans une maison, sous le regard d’une poignée de femmes ayant survécus. Truste constat qui reflète finalement les propos extrême que l’on peut retrouver sur les réseaux sociaux aujourd’hui.

A la rigueur, on peut comprendre la colère des femmes. On peut comprendre cette fronde pour plus d’égalité. Mais le film est terriblement mal fait, au point de rendre détestable tous les personnages, surtout féminins. Riley est une victime, elle subit tout le temps et se révèle à la toute fin, mais tombe tout de même amoureuse d’un type gentil, affable et fragile… Kris est certainement le personnage le plus insupportable du métrage. Elle est la caricature emblématique de la SJW qui se plaint tout le temps, qui veut toujours mettre en avant des combats qui ne servent à rien. Virulente, violente, refusant toute réflexion qui va à l’encontre de la sienne, elle est obtus, frôlant constamment la débilité profonde. On comprend vite pourquoi elle est célibataire. Pour les autres personnages, on nage en plein délire inutile, avec la juive qui dit qu’elle est juive pour faire bien (il doit d’ailleurs avoir un truc là-dessus, avec la nana qui se bat avec une menorah à la toute fin), celle qui est en couple mais qui va se séparer de son type parce qu’il boit de la bière, ou encore le méchant pas beau, le violeur qui n’a pas été puni et qui a un sourire en coin qui donne envie de lui mettre des baffes. Bref, tout ce petit monde manque d’épaisseur, de travail et surtout d’un background digne de ce nom.

Et le film est perclus de pistes qui n’aboutiront jamais. Le coup de la patte du chat qui est noire, les meurtres gratos des nanas qui ont deux lignes de texte, le démarrage qui mène à une maman inquiète mais que l’on oublie en cours de route. Le film délaisse ses pistes, délaisse ce qui aurait pu mener le spectateur vers un Whodunit intéressant, pour ne rien tirer de bon. On en est à un stade où on se demande pourquoi des meurtres interviennent alors qu’ils ne sont même pas découverts par les personnages. C’est totalement gratuit en plus de ne servir à rien. Et outre ces éléments qui prouvent la malhonnêteté du projet, on pourra reprocher à Black Christmas d’être bien trop sage dans son visuel. Le film ne fait jamais peur, il n’y a pas de gore et on a cette désagréable sensation de suivre un film à destination des ados.

Difficile donc de passer outre la mise en scène, qui est tout simplement inexistante. Le film baigne dans un jemenfoutisme creux. Aucun plan ne viendra nous surprendre. Aucun plan ne viendra titiller notre rétine. L’ensemble est terne, voire même triste, alors que l’on est pendant les fêtes de Noël. Sophia Takal n’arrive jamais à rendre son film attractif, accumulant les mauvais points sur les meurtres qui sont trop sages, mais aussi sur les jump scare qui ne fonctionneront jamais. Certains aspects lumineux essayeront vainement d’éclairer l’ensemble, comme des guirlandes un peu flashy, mais rien n’y fera, ce sera d’une banalité affligeante. Tout comme les actrices qui se démènent pour exister mais qui en deviennent insupportables, comme Imogen Poots que l’on a rarement vu aussi mauvaise et peu investie.

Au final, Black Christmas est un très mauvais film d’horreur, et même un très mauvais film tout court. Se voulant résolument moderne et tentant d’aborder le mouvement MeToo dans un pseudo pamphlet SJW, Sophia Takal se plante lamentablement. Entre des pistes abandonnées, une réalisation aux fraises, des actrices peu investies et une peur aux abonnées absentes, ce remake ne vaut absolument pas le coup. D’ailleurs, rarement un ratage n’aura été aussi cinglant, surtout quand on connait le matériau de base. Bref, une purge nauséabonde qui arrive à desservir tous les messages qu’elle veut faire passer.

Note : 01/20

Par AqME

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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