décembre 13, 2024

Lara Jenkins – Oh Girl

Titre Original : Lara

De : Jan-Ole Gerster

Avec Corinna Harfouch, Tom Schilling, André Jung, Volkmar Kleinert

Année: 2020

Pays: Allemagne

Genre: Drame

Résumé:

Comme tous les autres matins, Lara débute sa journée par une cigarette et une tasse de thé. Aujourd’hui est un jour important : elle a 60 ans et c’est le premier concert de piano donné par son fils Viktor. Elle le soutient depuis ses débuts et se considère comme déterminante dans son succès. Mais Viktor est injoignable depuis des semaines et Lara semble ne pas être conviée à l’événement, contrairement à son ex-mari et sa nouvelle compagne. La journée va alors prendre un tour inattendu.

Avis :

Jan-Ole Gerster est un réalisateur allemand dont le premier film « Oh Boy« , sorti en 2013 fut une véritable surprise aussi bien chez lui, en Allemagne, qu’à l’étranger. Petit film s’inspirant de la nouvelle vague, le réalisateur s’est offert un joli succès que personne n’a vu venir. Le film sera d’ailleurs nommé dans pas mal de festivals et remportera même le prix de la découverte au European Film Award, ainsi que six Lola, dont les meilleurs, film, réalisateur, acteur, second rôle, scénario et musique. Bref les plus importants et ce fut bien mérité.

Depuis ce film, on n’avait plus de nouvelles de Jan-Ole Gerster et il aura fallu attendre huit ans pour découvrir enfin le second métrage du réalisateur. Revenant sur le même principe que son « Oh Boy« , c’est-à-dire raconter l’histoire d’un personnage sur une journée, Jan-Ole Gerster nous entraîne dans un film complexe et presque austère. Un film qui cette fois peint le portait d’une femme dure, que le film ne va faire que révéler au fur et à mesure. Si « Lara Jenkins » manque peut-être d’émotion pour pleinement nous emporter, il demeure un beau geste de cinéma et l’on en ressort avec la sensation d’avoir vu un beau film, tout simplement.

Lara a soixante ans aujourd’hui, mais ce n’est pas pour cela que ce jour est si particulier pour elle. Non, aujourd’hui, c’est surtout le jour où son fils Viktor va donner son premier concert de piano avec des compositions qu’il a lui-même créées. Lara essaie de joindre Viktor pour lui faire part de ses encouragements, mais ce dernier ne répond jamais. D’ailleurs ça fait un petit bout de temps que Lara n’a pas eu son fils et elle n’est pas non plus invitée au concert. Alors qu’elle s’achète sa place elle-même, Lara déambule dans les rues de Berlin et se remet en question…

« Lara Jenkins« , après « Oh Boy » et le portrait de son Niko tenu par le fidèle Tom Schilling, Jan-Ole Gerster est de retour pour un deuxième film et cette fois, le réalisateur allemand va peindre le portrait d’une femme. Très différent de son premier film, « Lara Jenkins » est un film dont le scénario, comme son portrait, sont des plus complexes et cette journée si particulière est loin, très loin, d’être la plus lumineuse qui soit.

« Lara Jenkins« , c’est l’histoire d’un regret et surtout d’une acceptation. Une acceptation de soi, de ses erreurs et de son chemin de vie. Le scénario que met en scène Jan-Ole Gerster est assez dur, car il n’a pas grand-chose dans la description de son personnage pour nous séduire. Lara est un personnage dur, froid, dépressif, aigri, voire même presque agaçante. Mais pourtant, malgré tous ses défauts, on sent d’emblée que Lara est plus que ça, et que finalement, c’est une carapace qu’elle se crée et plus le film va peindre son portrait et plus cette dernière va se révéler être touchante et surtout fragile. Finalement, même si parfois « Lara Jenkins » a tendance à se faire un peu longuet, Jan-Ole Gerster arrive à nous emporter jusqu’au bout et surtout, il arrive à nous tenir.

À travers ce personnage, Jan-Ole Gerster aborde bien sûr l’acceptation de soi, mais il aborde aussi de nombreux thèmes, comme comment une passion peut consumer quelqu’un. Il aborde la persévérance, il aborde la peur de ne pas y arriver et pire encore, l’horreur de ne rien tenter. D’ailleurs, le film nous entraîne dans une ambiance lourde, pleine de regrets et de remords, on regrettera juste un manque d’émotion, comme si le réalisateur s’était retenu pour ne pas tomber dans la facilité d’un pathos.

Heureusement, même si Jan-Ole Gerster nous entraîne dans un beau drame, il a eu l’intelligence de piquer son film de petites doses d’humour qui sont toujours bien placées, au bon endroit, au bon moment. Ça détend, l’espace de quelques secondes ou instants, l’atmosphère et ça fait du bien.

La complexité, on la retrouve dans le jeu de Corinna Harfouch, qui est carrément bluffante dans la peau de cette femme handicapée du sentiment. Cette femme froide et fermée, mais qui finalement se révèle être bien plus fragile, voire même plus détruite qu’on ne l’aurait imaginé. On trouve, dans un joli rôle lui aussi assez complexe, Tom Schilling, qui enchaîne décidément les bons choix. Si on déplorera un manque de personnages vraiment marquants hormis cette femme et son fils, on notera toutefois que l’ensemble fonctionne bien, et même si certains personnages ne sont que de passage, ils demeurent tous bien campés.

« Lara Jenkins« , dans sa mise en scène, est un film très classique et moins ambitieux peut-être que « Oh Boy« , mais il n’en demeure pas moins un joli film visuellement parlant. S’il y a des problèmes de rythme parfois, ça ne lui empêche pas d’être intéressant et d’avoir surtout de très belles envolées, notamment dans sa dernière demie heure, qui est parfaitement soutenue.

Entre défauts et qualités, entre complexité d’un côté et classicisme de l’autre, « Lara Jenkins« , second film pour Jan-Ole Gerster est un film qui mérite qu’on s’y arrête. Alors certes, il faut aimer le cinéma d’auteur, il faut aimer un cinéma qui ne nous offre pas tout, mais ne serait-ce que pour son actrice, la complexité et la beauté de son personnage, « Lara Jenkins » vaut son coup d’œil. Il ne restera pas peut-être dans toutes les mémoires, mais sur l’instant, le geste est beau et la séance fut pleine d’intérêt.

Note : 14/20

Par Cinéted

AqME

Amateur d'horreur, Métalleux dans l'âme, je succombe facilement à des images de chatons.

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