Auteure : JoAnn Chaney
Editeur : Presses de la Cité
Genre : Thriller
Résumé :
Sept ans après la découverte, sous son garage, de trente-trois cadavres, Jacky Seever, ancien notable de Denver, patiente dans le couloir de la mort. Mais son nom refait la une des journaux lorsque trois femmes de son entourage sont retrouvées mortes, assassinées dans des conditions qui rappellent le modus operandi de Seever, jusque dans certains détails pourtant tenus à l’abri de la presse. L’ancien tandem de flics qui a coffré Seever se reforme en urgence, tandis que le journal local réengage la pétulante Sammie Peterson, pour couvrir l’enquête à laquelle elle avait donné un tour décisif. Malgré leurs souvenirs traumatiques, voilà ces trois-là plongés de force dans une affaire effroyable pas tout à fait inédite. Quant à Gloria, la fragile épouse de Seever, elle est à nouveau harcelée par la presse et la police…
Avis :
Le monde du roman, c’est un peu comme le monde du cinéma, il faut toujours se méfier des acclamations des critiques, surtout quand il s’agit d’un premier roman. Premièrement parce que bien souvent la hype n’a qu’un but commercial afin de vendre un maximum de livres, et ensuite parce que parfois, il en faut peu pour surprendre un public qui n’est pas habitué à lire du thriller ou du polar. Sept Ans de Silence ne fait pas forcément envie de prime abord avec sa couverture austère, mais il faut s’attarder sur le pitch pour trouver quelques accroches assez efficaces et la promesse d’un roman fort, avec un tueur en série qui en copie un autre sept ans plus tard. Premier roman de JoAnn Chaney, porté aux nues par la critique spécialisée, Sept Ans de Silence se devait de tenir de grandes promesses. Le résultat est-il à la hauteur de sa réputation ? Pas vraiment, même si on est loin de la catastrophe.
Pour la petite histoire, Jacky Seever est un tueur psychopathe qui a enterré 31 cadavres dans son vide sanitaire. Arrêté et incarcéré, attendant son injection létale, sept ans plus tard, les meurtres recommencent ave sa même signature, à savoir des doigts en moins chez les victimes. Le duo de flics qui l’avait arrêté alors reprend du service, ainsi que la journaliste qui avait couvert l’affaire à l’époque. Cette enquête va alors permettre de renouer des contacts étranges, de voir l’évolution des personnalités, aussi bien psychiques que professionnelles, et de résoudre une énigme assez obscure. Le pitch de base de ce premier roman est donc très simple et ne sort pas vraiment des sentiers battus pour ceux qui sont rompus à ce genre de lecture. Nous aurons droit à des inimitiés entre les personnages, quelques backgrounds plus ou moins travaillés, des relations conflictuelles et bien entendu, un criminel qui se balade parmi les gens récurrents de l’histoire. Et c’est bien là le premier constat un peu ennuyeux, c’est que tout demeure téléphoné et que l’on grille le suspect à la moitié du livre. Si l’auteure essaye de nous perdre en laissant çà et là des sous-entendus, on se doutera très vite de l’identité du tueur et pour quelle raison il fait cela. C’est clairement le gros point faible du roman.
Fort heureusement, nous allons avoir de très bonnes choses aussi à l’intérieur, et notamment les personnages. Parmi le duo de flics, on s’intéressera davantage à Hoskins, un sanguin qui ne supporte plus vraiment la monstruosité humaine et qui aime régler les affaires avec ses poings. S’occupant de son père atteint de la maladie d’Alzheimer, ayant eu une relation amoureuse avec la journaliste du couvre l’affaire, on sent que l’on a affaire à un homme mal dans sa peau et qui ne sait comment allier sa vie personnelle et sa vie professionnelle. On s’attardera beaucoup moins sur Loren, son coéquipier, complètement barjot et qui rentre dans la peau des criminels pour mieux les comprendre. Egoïste, égocentrique, il s’habille et vit comme le précédent tueur pour comprendre les motivations de ce second couteau. Il va alors froisser ses acolytes, jusqu’à les rendre malades pour les rendre plus efficaces. Enfin, le roman s’attarde aussi énormément sur Sammie, la journaliste qui a perdu son travail et qui voit dans cette nouvelle affaire l’occasion de revenir au Post. Le problème avec ce personnage, c’est qu’il est tout simplement abject dans sa façon de faire. Opportuniste, n’hésitant pas un seul instant à tromper son mari pour avoir des informations, on aura beaucoup de mal à s’accrocher à ce personnage, et cela malgré le fait qu’elle ressente parfois des regrets et des remords. Il existe dans le roman quelques personnages secondaires qui gravitent autour des principaux, mais ils ne sont pas trop importants, excepté Gloria Seever, la femme du tueur, dont on aura les atermoiements intérieurs qui la pousseront à l’inéluctable.
Alors si les personnages ne sont pas très attachants (hormis Hoskins), ils serviront tous à une cause ou un sujet que veut aborder l’auteure. En effet, en parlant de la vie de Hoskins ou de sa fougue, elle parle du travail du flic et de la carapace qu’il faut se construire pour surmonter certaines horreurs. En évoquant le cas de Loren, elle montre à quel point les policiers flirte avec l’horreur, jusqu’à ce qu’elle pénètre en eux. Avec Sammie, elle va aborder le journalisme, les méthodes dégueulasses pour avoir des exclusivités et aussi que tout cela est poussé par les éditeurs et les rédacteurs en chef qui veulent vendre du sensationnalisme. Bref, de nombreux sujets sont évoqués et tout ça demeure assez pertinent, faisant de Sept Ans de Silence un bon page turner. Il manque juste un peu de glauque dans cette histoire, ou un portrait plus malsain du premier tueur, Jacky Seever. Si tout tourne autour de lui et de sa personnalité, on en sait peu, hormis qu’il cachait bien son jeu. Les quelques confrontations dans la prison sont vite éventés, et on se retrouve avec un homme finalement peu charismatique (malgré ce que l’on veut nous faire croire) et tout le roman manque de mordant ou de moments vraiment sales.
Au final, Sept Ans de Silence, le premier roman de JoAnn Chaney, n’est pas une grande réussite comme veulent bien nous le faire croire les critiques américaines. Il s’agit d’un bon roman, qui se lit relativement vite, avec de bonnes thématiques, mais qui manque clairement de force dans son histoire ou dans l’aspect malsain qu’il veut aborder. Tout cela manque de moments forts, de moments glauques et effrayants et avec cette petite dose en plus, nul doute que le roman aurait gagné en qualité.
Note : 14/20
Par AqME