Auteur : Marie Rutkoski
Editeur : Lumen
Genre : Fantasy, Dystopie
Résumé :
Dans un monde en guerre où l’Est affronte l’Ouest, deux adolescents, Kestrel et Arin, tentent de s’entre-aider pour survivre.
Avis :
The Kiss clôt d’une belle manière la trilogie géniale de Marie Rutkoski. Une trilogie qui parle avant tout d’amour et de fraternité, au sein d’un univers médiéval fantasy dans lequel la différence entre le bien et le mal est subtile et bien amenée. Le rythme et l’intensité du récit sont néanmoins plutôt décevants étant donné leur inégalité : certains passages sont bien plus captivants et prenants quand d’autres s’avèrent répétitifs et en perte d’intérêt pour le lecteur.
La fin de ce tome ne surprendra personne et cela ne change rien au plaisir de lecture que l’on ressent malgré tout. Les sentiments qui lient Kestrel et Arin n’ont jamais été aussi intenses et sincères que dans ce tome, émotions que l’on attendait depuis longtemps et qui font du bien, tant aux personnages qu’aux lecteurs. Kestrel montre enfin son vrai visage, même si la vérité est plus complexe à cause de ce qui lui arrive dans le camp de travail dans lequel elle est envoyée à la fin du tome 2. Ce que la jeune femme a vécu là-bas fait partie des scènes les plus horribles de la série. Entre violence psychologique, manipulation, coups et drogues, ceux qui trahissent l’Empire se voient vite oublier tout velléité et toute envie de combattre, jusqu’à leur propre identité.
La Kestrel que l’on connaissait (bornée, forte, rebelle, sensible, déterminée) faiblit pour se transformer en une nouvelle Kestrel, moins renfermée, plus honnête avec elle-même et qui se découvre de nouvelles qualités. Ces contradictions et ces deux personnalités donnent au personnage une force nouvelle qui nous fascine et qui nous donne envie de suivre la jeune femme dans toutes ses démarches pour retrouver la mémoire. De l’autre côté, la souffrance et les doutes d’Arin sont de plus en plus nombreux et il craint de ne jamais retrouver celle qu’il aime. Son courage et sa foi en l’avenir guident chacun de ses pas et englobe tous les paragraphes qui le concernent. Les idéaux d’Arin n’ont pas changé et c’est aussi pour ça que l’on aime ce personnage.
La première partie du roman est fascinante et passionnante. On suit la jeune fille dans ses déboires, ses luttes pour sortir du camp et ses propres combats intérieurs pour ne pas se déclarer vaincue. On découvre une autre facette de sa personnalité et elle nous plaît bien. Dans le même temps, on suit Arin et ses nouveaux alliés dans leurs escarmouches et batailles contre l’Empire Valorien. Ces scènes de combats rapprochés ou non n’enthousiasment pas beaucoup. L’auteure ne s’aventure d’ailleurs pas dans de longues descriptions de ces derniers et préfère s’intéresser à la relation Arin-Roshar qui évolue tout en étant toujours aussi conflictuelle, notamment en ce qui concerne la direction de l’armée et la situation de Kestrel. Les dialogues de Roshar, le nouvel allié de Dacra, font souvent sourire. Il est malin, irrespectueux et n’hésite pas à employer la force et la menace pour obtenir ce qu’il veut. Son ironie, sa drôle de relation avec son tigre et ses liens sa sœur, font de ce personnage quelqu’un d’attachant.
La seconde partie du roman est beaucoup trop répétitive et plutôt peu intéressante dans l’ensemble. Une fois Kestrel libérée et protégée par Arin, les combats s’enchaînent jusqu’à la fin. Entre deux batailles, le lecteur peut suivre des discussions entre Kestrel et Arin ou entre Arin et Roshar. Les premières font trop peu avancer les choses et les secondes semblent surtout meubler. L’intrigue sur Kestrel et Arin stagne un bon moment et le conflit politique avec la Valorie est mis en avant. Les dialogues étayant des tactiques militaires se font légion et ne sont parfois pas tous compréhensibles quand on ne s’intéresse pas déjà à ce domaine. Une scène intéressante nous permet cependant de voir en action les talents militaires de la jeune femme que l’on sait douée en stratégie et c’est appréciable. Effectivement, il était plutôt coutume de la voir en conseillère et non en femme d’action appliquant ses propres stratagèmes.
A ce titre, le coup final porté à l’Empereur n’est pas aussi grandiose que l’on pourrait l’espérer. La stratégie mise en œuvre, bien que dévoilée à la toute fin, déçoit par sa simplicité. D’une personne exceptionnellement talentueuse dans cette catégorie, il aurait été plaisant d’assister à une mise en scène intelligente et pleine de surprise.
Comme le tome 2, le troisième volume nous dévoile toutes les pensées des deux personnages principaux. Ces passages apportent parfois une lourdeur malvenue au récit et ralentissent fortement l’action. De plus, un côté plus spirituel est donné au personnage de Arin qui communique davantage avec ses dieux. Parfois perturbants, ces moments retirent quelque peu de la force innée de ce personnage qui devient moins confiant et bien plus enclin à suivre ses émotions qu’auparavant.
Cette trilogie a été une belle surprise et de très agréables moments de lecture. Kestrel et Arin peuvent se vanter de faire partie de ces héros forts que l’on aime voir évoluer, à l’image de couple emblématique, comme Richard et Kahlan (L’épée de vérité, de Terry Goodkind) ou Joscelin et Phèdre (Kushiel, de Jacqueline Carey).
A la fin des dystopies, la mise en place du « nouveau monde » n’est souvent pas expliquée. Ici, c’est la même chose et c’est bien dommage. Tout est misé sur la mort d’un monde et non sur la naissance de celui d’après. Cependant, de nombreuses pistes nous sont données pour nous imaginer ce qu’il pourrait être et c’est encourageant.
The Kiss est un livre émouvant qui donne la force de se battre et de croire en ses idéaux.
Note : 17,5/20
Par Lildrille