D’Après une Idée de : Steven Spielberg, Tom Hanks, Stephen Ambrose
Avec Nicholas Aaron, Damian Lewis, Donnie Wahlberg, Ron Livingston
Pays : Etats-Unis
Nombre d’Episodes : 10
Genre : Guerre
Résumé :
Vivez la Seconde Guerre Mondiale aux côtés de la Easy Company, un groupe de soldats américains. Suivez-les en tant que groupe, ou individuellement, depuis leur formation en 1942, jusqu’à la libération de l’Allemagne Nazie en 1945, en passant par leur parachutage en Normandie le 6 juin 1944.
Avis :
Au cinéma ou à la télévision, la Seconde Guerre mondiale est l’un des conflits les plus retranscrits. Chaque décennie apporte son lot de chef d’œuvres et de pièces maîtresses du septième art. Les années 1990 fournissent d’ailleurs deux des meilleurs films de Spielberg : La liste de Schindler et Il faut sauver le soldat Ryan. En l’occurrence, les références ne sont guère anodines puisque Band of Brothers s’inscrit dans leur droite lignée. Après leur succès retentissant de ce dernier, le cinéaste s’est associé à Tom Hanks en tant que producteur sur la présente série. Une collaboration fructueuse qui, sans surprise, accouche d’une véritable pépite télévisuelle qui n’a rien perdu de sa force.
Band of Brothers marque avant tout un tournant au début du XXIe siècle. À l’époque, le monde des séries était dédaigné, à tout le moins observé avec condescendance par la profession. Si l’on pouvait faire ses premières apparitions sur le petit écran, un retour à ses premières armes était considéré comme un échec, une carrière sur le déclin qui aurait toutes les difficultés à se relancer. Ce fut sans doute vrai des années 1970 jusqu’au terme des années 1990. Mais l’ambition de la présente série est double : effectuer une reconstitution historique fidèle, prouver que le format de la série possède des qualités indéniables pour fournir de bonnes intrigues. Si cela paraît évident aujourd’hui, ça l’était moins il y a à peine plus de quinze ans.
En des mains moins habiles, il est très facile de sombrer dans le patriotisme et le manichéisme sans autre forme de procès que la défaite des Allemands. Or, le ton choisi se rapproche grandement d’Il faut sauver le soldat Ryan. On ne se contente pas de suivre le parcours semé de batailles de la Easy Compagny. On découvre ses personnages, leur quotidien entre deux affrontements et leur progression sur le front. Bien entendu, la série reprend les codes du film de guerre, mais, comme son homologue cinématographique, elle y apporte une touche d’humanité qui lui confère toute sa force dramatique. La recherche historique et le concours des parachutistes de l’époque contribuent à un réalisme exacerbé sur tous les plans.
À ce titre, les véritables intervenants témoignent brièvement avant chaque épisode. Un choix qui évite le pathos pour se baser sur des paroles simples prononcées par des hommes et non des héros. C’est en cela que Band of Brothers marque le spectateur : ne pas sombrer dans la témérité ou l’esprit de sacrifice inconsidéré. Malgré un point de vue limité du conflit, la succession de réalisateurs différents aux commandes offre un renouvellement inattendu. Les positions de force divergent en fonction des zones de combat, des avantages géographiques et des effectifs sur place. L’exemple le plus frappant reste la bataille des Ardennes et le statu quo à Bastogne.
L’on vit également d’autres grandes pages de la Seconde Guerre mondiale telles que le débarquement (vécu du ciel et non des plages de Normandie), l’opération Market Garden ou la découverte des camps de concentration. À ce titre, l’épisode 9 marque le point d’orgue de la série avec une tension dramatique proprement époustouflante. On aurait pu craindre quelques détournements mineurs de l’histoire, notamment sur le fait que les « libérateurs » ne pouvaient pas faire sortir les déportés des camps. Or, tout est retranscrit avec justesse, ainsi que le désarroi ou la fatalité des civils allemands. Là encore, on découvre une référence flagrante à La liste de Schindler.
Si les affrontements se révèlent d’une rare violence (mortier, infanterie lourde…), l’intrigue s’attarde sur un panel de portraits hétéroclites. Les protagonistes sont nombreux, parfois trop furtifs pour qu’ils influent sur l’histoire elle-même. Pour autant, chaque section est mise sur le devant de la scène sans complaisance, exposant les failles, les doutes et les peurs non de soldats, mais d’hommes. Un traitement soigné, particulièrement sensible à la conception de la guerre et appréhendé différemment selon le vécu de chaque individu. Le contraste est aussi présent avec le camp ennemi qui, même si on le voit plus souvent au travers d’un viseur, tend à le dédiaboliser. Non pour une quelconque justification ou apologie du IIIe Reich, mais pour évoquer un contexte plus complexe qu’il n’y paraissait. Preuve en est avec des rencontres fortuites entre soldat et prisonnier de guerre au tout début.
Au final, Band of Brothers se montre à la hauteur de ses ambitions. Par un traitement sensible et réaliste, l’intrigue accorde une importance fondamentale aux personnages, plus qu’à leurs actes. En occultant toute forme d’héroïsme ou d’esprit patriotique, la série effectue une reconstitution historique soignée, portée par des acteurs exceptionnels (Damian Lewis, Donnie Wahlberg et Neal McDonough en tête). En proposant une vision pragmatique de faits et d’événements connus à travers les livres et les films, Band of Brothers joue la carte de la sobriété et de la modestie. Pour autant, l’intrigue ne délaisse pas la brutalité des combats avec des joutes immersives au possible. Tout en se montrant référentielle et originale, une série audacieuse qui prône un discours pertinent sur les notions de devoir et d’humanité en période trouble.
N.B. À noter, les débuts remarqués de Michael Fassbender, Tom Hardy, ainsi que la présence de James McAvoy et Simon Pegg.
Note : 17/20
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Par Dante