Auteur : Sarah Lotz
Editeur : Fleuve Noir
Genre : Thriller, Horreur
Résumé :
La croisière s’amuse… jusqu’au bout de l’horreur.
Piscine, excursions, soirées spectacles, bar à cocktails, cours de fitness, et même un casino ! Le Rêveur Magnifique portait bien son nom, et promettait une croisière paradisiaque aux heureux touristes embarqués à son bord. Mais le quatrième jour de la traversée, un incendie se déclare en salle des machines, et jette le paquebot à la dérive. Les communications avec l’extérieur sont rompues – aurait-on dérivé jusqu’au triangle des Bermudes ? Un meurtre, une épidémie, puis l’apparition chronique de fantômes dans les couloirs inférieurs achèvent de transformer le rêve en cauchemar.
S’agit-il seulement du délire d’un médium halluciné, dont les prêches galvanisent les passagers ? Ou ces spectres surgis du néant ont-ils une autre origine ? Livrée au hasard et à la panique, la croisière sombre dans le chaos.
Avis :
Ah, l’océan, son immensité, ses croisières qui font rêver, ses paquebots en perdition… S’il est un cadre propice à des intrigues paranormales, c’est bien cet endroit isolé où bon nombre de récits de marins ou de passagers restent encore aujourd’hui inexpliqués. À travers des témoignages historiques et contemporains, on ne compte plus le nombre d’« anomalies » et de faits mystérieux, le plus célèbre d’entre eux étant le Triangle des Bermudes. Si le polar est relativement bien fourni dans le domaine (Croisière maudite, Dernière escale…), le thriller surnaturel est assez peu exploité en littérature. Aussi, un pitch comme celui de Jour quatre ne peut que se rapprocher de films tels que Le vaisseau de l’angoisse, Le bateau de la mort ou Le Triangle du diable. Pour le pire ou le meilleur ?
L’idée ne manque pas de panaches et pourtant, on déchante très vite dans un voyage qui part à vau-l’eau (sans mauvais jeu de mots) dès les premières pages. La faute à une entame pour le moins lénifiante qui nous fait découvrir sous différents angles les premiers couacs de cette croisière qui ne s’amuse pas vraiment. L’intrigue joue la carte du suspense en… faisant du surplace ! Pas le meilleur moyen pour capter l’attention du lecteur en se montrant redondants à plus d’un titre ! Car loin d’effectuer un démarrage poussif, Sarah Lotz démontre qu’elle n’a aucun sens du rythme. Pire que cela, sa prose se révèle d’une navrante simplicité.
Le ton reste neutre, les comportements indifférents et exaspérants face à une situation d’urgence. On préfère conter fleurette ou se pencher sur les problèmes relationnels et amoureux des unes et des autres. La « sordide » affaire de meurtre n’apporte strictement rien au livre et vient alourdir un style binaire, sans âme. Les mots sont débités sans créer l’alchimie qui les fait naître dans l’imaginaire de tout un chacun. Des phrases souvent trop courtes, une surabondance d’articles définis pour introduire chaque paragraphe et des descriptions pour le moins sommaires et dispensables pour le cadre, mais aussi pour les personnages.
Concernant ces derniers, ils se succèdent plus rapidement que ne s’écoule une file d’attente au fast-food du coin. À aucun moment, on n’éprouve la moindre empathie pour l’un ou l’autre. La sensation de dangers explicites ou de menaces latentes reste ici au stade des intentions. Aucun ne sort du lot. Plus grave, ils suscitent à des degrés divers un rare mépris tant ils se montrent exaspérants, pédants et d’une indolence sans borne dans tout ce qu’ils entreprennent. De plus, le nombre de portraits ne facilite guère un traitement honnête sur leur évolution. L’auteure se contente de dépeindre une galerie grossière et surfaite de clichés en puissance.
Pour ne rien arranger, la tendance de Sarah Lotz à se perdre dans des répétitions à n’en plus finir se retrouve également dans les lignes de ses dialogues. Là encore, on sombre dans une rare indigence pour des échanges qui manquent de vie. Ceux-ci s’amusent au jeu des questions/réponses inutiles et se concluent d’une manière aussi impromptue qu’ils sont survenus. Cela en devient tellement récurrent qu’on s’interroge sur la réelle nécessité de certains passages. Et ce ne sont pas les pseudo-délires où l’on entre en contact avec les esprits ou lorsqu’on lit des coupures de presse et des articles de blog qui inversent la donne par la suite.
Tout l’aspect surnaturel est, quant à lui, édulcoré au possible. Rien d’original ou d’oppressant à l’horizon, surtout pour ceux et celles rompus à ce type d’exercice (qu’il s’agisse de littérature, cinéma ou même jeux vidéo). Des couloirs étriqués, des apparitions furtives et autres poncifs s’invitent par-ci par-là sans susciter une angoisse de circonstances. Ajoutons à cela, la manifestation d’un virus et les avaries du vieux rafiot et l’on obtient un pot-pourri (au sens strict du terme) dans lequel le lecteur ne se sent guère concerné. À noter, la magnifique quatrième de couverture qui se targue de donner des éléments clefs de l’histoire pour ôter le peu d’intérêt qu’on pouvait accorder à ce livre.
S’il n’est guère aisé de se faire un nom dans le domaine du thriller, on peut s’étonner de certains succès qui, une fois révélés, laissent cois tant ils se montrent décevants. Jour quatre, c’est tout un tas de promesses qui ne seront jamais tenues. Intrigue prévisible et d’une longueur sans nom, personnages anecdotiques, style d’écriture affligeant, conclusion bâclée (un peu plus que le reste du roman)… Force est de reconnaître que Sarah Lotz s’essaye au huis clos maritime d’une bien piètre manière. Ce qui laissait augurer d’un moment âpre et tendu aboutit à une vaste fumisterie ennuyeuse et énervante. Finalement, la première ligne de l’ouvrage pour résumer les trois premiers jours de la croisière s’applique aussi au quatrième jour et à ceux qui suivent. « Croisière dépourvue d’incidents notables. »
Note : 05/20
Par Dante