Auteur : Vanessa Diffenbaugh
Editeur : Pocket
Genre : Romance
Résumé :
Un bouquet de soucis : chagrin. De chardons : misanthropie. De basilic : haine…
Ainsi se résume, dans le langage des fleurs, la vie de Victoria jusqu’à ses 18 ans. De foyer en orphelinat, la jeune fille a grandi comme une plante sèche, destinée à ne jamais éclore… Jusqu’au printemps de l’âge adulte. S’exprimant par bouquets, dont elle connait tous les secrets messages, la jeune fille apprendra à s’ouvrir aux autres et à chasser ses vieux démons. Et d’un coin de mauvaise herbe, se faire un jardin…
Avis :
Le langage des fleurs n’est plus beaucoup utilisé de nos jours mais, pourtant, il le fut grandement à une autre époque. L’époque victorienne, connue pour plein d’autres choses, comme la révolution industrielle, les crimes de Jack l’Eventreur ou les vêtements dont s’inspire le mouvement Steampunk, fut une période où s’échanger des fleurs voulait véritablement dire quelque chose. Une fleur, un message, un mot, une signification. Lavande, méfiance ; tournesol, orgueil ; rose jaune, infidélité, jalousie ; dahlia, reconnaissance … Les fleurs représentaient plus qu’une simple décoration et qu’un simple ornement. Ce livre, bien que le sujet principal de l’intrigue ne soit pas cela, remet au goût du jour cette langue du passé qui s’était perdue en chemin mais qui remonte petit à petit à la surface. Comme nombre de langages, selon les dictionnaires, une fleur peut avoir plusieurs significations. Son sens caché, de prime abord inspiré de la forme, de la couleur et de l’odeur de la plante, a évolué pour se transformer ou s’étayer davantage. La fin du roman présente d’ailleurs un dictionnaire court mais plutôt complet.
Victoria est le personnage principal de ce livre. Le roman alterne, par chapitre, entre son passé et son présent. Son passé d’enfant en foyer qui ne parvient jamais à rester dans une famille d’accueil et son présent de femme, cherchant du travail, se cherchant elle-même et désirant avancer. On apprend très vite que Victoria a été une enfant très difficile, au caractère bien trempé et qui a appris à se méfier des êtres humains. Son amour pour les fleurs a été développé grâce à l’aide d’une de ses mères adoptives, Elizabeth, qui l’a aimé comme sa propre fille. Ce nouveau langage a été pour elle une révélation, un moyen de communiquer et de partager. Mais, alors que Victoria est une adulte ne répondant plus aux critères d’adoption, ces deux femmes ne se voient plus depuis longtemps déjà. L’alternance entre passé et présent finit par nous apprendre ce qui s’est passé de manière subtile et intense.
On assiste, dans les passages au présent, au cheminement de Victoria pour se retrouver, retrouver sa mère adoptive perdue et se pardonner elle-même de toutes les erreurs commises. On la voit évoluer, rencontrer l’amour et devenir une femme accomplie même si ses peurs la guettent de toutes parts et que les fleurs restent pour elle de meilleures amies que les êtres humains. Faire des bouquets la transforme, la transfigure, la fait revivre.
Le caractère de Victoria peut grandement agacer : la jeune femme ne cesse de fuir dès que sa vie prend un tour nouveau, fait du mal à ceux qui l’aiment et ne semble pas réaliser que s’excuser, ne pas mentir et parler peuvent être les clés du bonheur. La jeune femme est entourée de personnes qui l’aiment, qui lui veulent du bien et qui sont prêts à beaucoup pour elle. Le fait qu’elle ne le réalise pas est frustrant, même si cela peut être compréhensible étant donné son passé tumultueux et solitaire en partie. Les erreurs qu’elle commet semblent toujours être pardonnées et cela ne paraît pas très réel. Il est évident que l’intrigue ne tourne pas autour de la cohérence du récit mais plutôt autour de la relation mère-fille, entre Victoria et Elizabeth, notamment.
L’alternance entre le passé et le présent est bien faite et permet d’en apprendre plus sur Elizabeth et Victoria. Tantôt touchants, tantôt tristes ou amers, ces souvenirs sont essentiels pour la compréhension du lecteur et permettent de mieux apprécier la résolution du roman.
Il n’est pas simple de s’attacher à Victoria et à son caractère. Le côté psychologique de la jeune femme n’est pas assez développé ni assez exploité. On subit, comme ses proches, ses actions déconcertantes qui ne sont jamais critiquées ou réellement évoquées tant par le narrateur que par les autres personnages. Cela paraît bien trop simple et facile. Un passé douloureux ne justifie pas toutes les mauvaises actions futures. Les autres personnages manquent également de profondeur et on en apprend bien peu sur eux : Grant, Renata, etc. Ce qui est dommage et aurait pu amener plus de réalisme.
Le roman est tout de même très agréable à lire, prenant, et est poétique grâce au langage des fleurs mais également à cause du fait qu’il soit intemporel. On ne sait pas à quelle époque on se trouve, peu d’indice sont donnés à ce sujet. L’histoire apparaît comme hors du temps, comme si ce qui se passe pouvait s’appliquer à tout moment. La relation mère-fille est bien imagée et bien décrite. On retrouve cette complexité, cet amour qui pardonne, qui oublie et qui laisse faire le temps. La fin du roman est belle et laisse espérer que Victoria changera pour enfin accepter l’amour des autres, et pas seulement celui des fleurs.
Note : 14/20
Par Lildrille