Avis :
Acteur culte de la scène thrash et groove métal depuis les années 80, Sepultura s’est construit une aura puissante tout au long de sa carrière. Et pourtant, le groupe était sur le déclin depuis quelques temps, la faute aux départs des frères Cavalera à dix ans d’intervalle et au remplacement du chanteur pour un américain dont la haine envers le système brésilien est moins prégnant. Vendant moins de disques, changeant entre temps de maison, le groupe avait toutes les cartes en main pour définitivement disparaître. Mais trois ans après le précédent album, qui n’avait pas laissé un souvenir impérissable, le groupe revient avec un nouvel effort doté d’une pochette hideuse et d’une typographie qui laissait présager le pire. Un album qui n’a pas eu les faveurs d’un certain Max Cavalera, réputé pour son franc parler et sa connerie monumentale quand il faut évoquer son ancien groupe avec qui il a eu des différends. Mais qu’importe la vindicte d’un musicien qui n’a pas fait grand-chose depuis Cavalera Conspiracy, l’essentiel, c’est que Sepultura existe toujours malgré le fait que seul le bassiste Paulo Pinto Jr. soit le seul et unique rescapé de la formation de base. Et franchement, quand on écoute ce skeud, on peut vraiment se dire que le groupe a bien fait de persévérer, car Machine Messiah, quatorzième album studio de la formation est une réelle bombe.
Le groupe avait déjà entamé une lente progression vers un son plus groove que thrash avec des sonorités plus douces et un rythme un peu plus lent, permettant des compositions plus complexes et plus longues. C’est ce qu’il se passe avec Machine Messiah, le premier morceau de l’album, qui s’ouvre sur une rythmique lente et puissante, permettant au chanteur de poser sa voix grave afin de mettre en place une ambiance pesante et lourde. Bien entendu, les growls ne tarderont pas à arriver au rythme d’un Andreas Kisser qui semble en pleine forme et très inspiré par cette thématique. Délaissant un temps la politique, le groupe se focalise sur les machines et sur leur influence sur notre vie. Une thématique originale mais tellement vraie qui permet au groupe de sortir un album extrêmement intéressant et riche. Le titre Alethea est un exemple parmi tant d’autres, mais on sent que le guitariste est en pleine forme et que ce soit les riffs ou les solos, tout est réellement parfait dans ce skeud. Alternant à merveille les moments gras avec des moments plus doux, le groupe montre qu’il est très en forme et signe certainement son album le plus abouti depuis l’avènement du nouveau chanteur. On remarquera aussi que la formation propose un titre uniquement instrumental avec Iceberg Dances, qui est d’une grande puissance et montre, si besoin en est, la technicité magistrale des musiciens.
Mais ce n’est pas tout. Sepultura, c’est avant tout un groupe brésilien qui avait trouvé un parfait équilibre entre le métal très occidental et des insertions tribales avec des instruments locaux et typiquement d’Amérique du Sud. Ainsi, le groupe, qui a su garder en chacun de ses membres une partie du Sepultura d’antan, livre quelques titres absolument fabuleux où l’on retrouve la patte qui a fait le succès de la formation. Phantom Self en est un exemple flagrant et demeure certainement le titre le plus abouti de l’album avec ses percussions si caractéristiques. Le groupe fournit aussi un style dans lequel il était moins habitué, un métal assez cinéphile, avec une construction grandiloquente qui monte crescendo à la manière d’une BO de cinéma. Sworn Oath est un gros morceau qui gagne en grandeur à l’aide de violons et d’un orchestre virevoltant derrière les riffs infernaux de Kisser et la batterie omniprésente. Il en ressort quelque chose de fort, de lourd, mais aussi de très poétique et de très beau malgré la violence inhérente au genre. On retrouve cela avec le très agressif Resistant Parasites. Enfin, si certains titres sont plus classiques car plus thrash comme I Am the Enemy ou Vandals Nest, le groupe renoue avec ses premiers amours et prouve qu’il ne s’est pas perdu en route, mais qu’il a simplement évolué.
Au final, Machine Messiah, le quatorzième album de Sepultura, est une véritable tempête dans le domaine du thrash et du groove et apparait presque comme une renaissance. Violent mais doté d’une certaine douceur, rapide mais élégant, évolutif mais respectueux d’un passé qui fait partie de l’histoire du groupe, cet album est résolument le plus réussi de l’ère Derrick Green et montre bien à quel point Max Cavalera n’était pas tout pour ce groupe. L’un des premiers coups de cœur de l’année dans le domaine du métal.
- Machine Messiah
- I Am the Enemy
- Phantom Self
- Alathea
- Iceberg Dances
- Sworn Oath
- Resistant Parasites
- Silent Violence
- Vandals Nest
- Cyber God
- Chosen Skin (Bonus Track)
- Ultraseven No Uta (Bonus track)
Note: 18/20
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Par AqME