Titre Original : Boxcar Bertha
De : Martin Scorsese
Avec Barbara Hershey, David Carradine, Barry Primus, Bernie Casey
Année: 1973
Pays: Etats-Unis
Genre: Drame, Thriller
Résumé:
Pendant la Grande Dépression dans l’Arkansas, Bertha Thompson, une jeune fille assiste à la mort accidentelle de son père, provoquée par un employeur tyrannique. Seule, sans toit ni travail, elle se retrouve sur les routes et utilise les wagons des trains de marchandises pour se déplacer (d’où son futur surnom de « Boxcar Bertha », Fourgon à bestiaux). Elle fait la connaissance de Bill Shelly, un syndicaliste qui va lui transmettre sa révolte. Tous deux deviennent des pilleurs de trains confirmés.
Avis:
Il aura donc fallu six ans à Martin Scorsese pour qu’il revienne sur les écrans avec ce deuxième film. Après un premier film intéressant, « Who’s That Knocking at My Door« , on aurait pu s’attendre à revoir Martin Scorsese repartir dans un nouveau tournage, mais ce dernier se laisse alors convaincre d’être assistant-réalisateur sur un film qui sera tourné pendant l’été 1969, au festival de Woodstock. Le film sera un documentaire sur le festival, sur sa préparation, avant, pendant et après. Et c’est une fois ce documentaire fini que le producteur Roger Corman, qui avait déjà repéré le jeune réalisateur, lui propose le projet.
Très différent de son premier film, « Bertha Boxcar » est un film plus tout public qui est quelque peu oublié dans la longue filmographie du réalisateur, à tort.
À la fin des années vingt, pendant la grande dépression, quelque part dans l’Arkansas, Bertha Thompson est une jeune fille comme les autres. Sa vie est paisible, mais à la mort de son père, elle se retrouve à la rue. Pour essayer de s’en sortir, Bertha erre et se déplace dans les wagons de train de marchandises afin de peut-être trouver un petit job. Un jour, elle fait la connaissance de Bill Shelly, un syndicaliste révolté. Très vite, les deux jeunes gens s’entendent et ensemble, ils vont se mettre, malgré eux, à braquer des trains de marchandises.
Le premier film de Martin Scorsese était une expérience assez troublante. On avait très envie de voir la suite du programme et avec quoi le réalisateur allait-il bien pouvoir revenir. Et c’est avec plaisir qu’on découvre ce petit film qui suit deux marginaux dans les Etats-Unis des années 30. « Bertha Boxcar » est un film original, très violent et recherché, qui peut faire penser à des films tels que « Bonnie & Clyde » d’Arthur Penn, ou « La balade sauvage » le premier film de Terrence Malick, tant les trois films empruntent les mêmes routes. Et pourtant, malgré les multiples ressemblances, « Bertha Boxcar » est un film diablement différent et surtout, il contient déjà en son sein tout ce qui va faire le cinéma de Martin Scorsese.
Le scénario, de première approche, a l’air assez simple, on se dit qu’on va suivre le parcours de deux marginaux devenus braqueurs dans ce qui serait un road-movie. Mais très vite, on va se rendre compte qu’ils ne sont qu’un prétexte pour aborder et décrire la violence de la société américaine de cette époque. Si l’on suit le parcours triste et dur de ces deux personnages avec beaucoup d’intérêt, ce sont les évènements qui vont croiser leur route qui seront presque plus importants qu’eux. Car grâce à eux que Martin Scorsese en profite pour parler de la haine raciale, des conflits sociaux, du syndicalisme et de la vision qu’il a de la liberté, de la police, de l’injustice, de la prostitution, du communisme. De la rébellion aussi contre un certain ordre établi et enfin, dans les grandes lignes, du malaise de ces années-là. Le réalisateur ne mâche pas ses scènes, et même si certaines ont quelque peu vieilli visuellement, le propos est bien présent. Le scénario est donc bien plus riche et important que le film ne le laisse penser et l’on peut dire qu’il a été une belle surprise, car « Bertha Boxcar » est bien différent de ce à quoi on s’attendait.
« Bertha Boxcar » est violent dans la société qu’il dépeint, il est violent dans son propos et la mise en scène de Scorsese va dans ce sens et le film sera parcouru de violents affrontements entre les forces de police et les braqueurs. Le film est aussi très bon à suivre de ce côté, car il est encore bourré de trouvailles, d’ingéniosité, et surtout d’inventivité. La dernière fusillade avec la caméra qui suit les corps qui tombent est terrible. Puis il y a cette dernière scène qui colle des frissons.
En fait, les seuls moments de douceur dans ce film, c’est le sourire éclatant et presque toujours plein d’optimisme de Barbara Hershey qui trouve un très joli rôle. L’actrice, malgré les malheurs que son personnage va endurer, est pleine de vie et toujours pétillante et c’est grâce à elle et son insouciance que Martin Scorsese évite de tomber dans un film bien plus sombre. On retrouvera aussi dans ce film le regretté David Carradine, Bernie Casey ou Barry Primus.
Bien entendu, le film de Scorsese n’a pas que des qualités, il a parfois des baisses de régime, des moments plus lents, où l’on peut sentir des longueurs, mais franchement c’est si peu comparé à tout le reste. Avec « Bertha Boxcar« , Martin Scorsese démontre encore le talent qu’on avait pu remarquer dans son premier film et offre un film bien plus intelligent et rude qu’il n’en a l’air. Avec ce film, il démontre qu’il a plus d’ambition et compte bien faire un autre genre de cinéma, plus réaliste et évocateur et cela quitte à déranger ou choquer.
Note : 15/20
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Par Cinéted