
Titre Original : Operation Chromite
De : John H. Lee
Avec Liam Neeson, Jung-Jae Lee, Beom-Su Lee, Sean Richard Dulake
Année : 2016
Pays : Corée du Sud
Genre : Guerre
Résumé :
Septembre 1950. La Guerre de Corée fait rage. Pour contrer l’offensive nord-coréenne, le Général MacArthur organise un débarquement sans précédent sur la plage d’Incheon. Sur place, huit soldats infiltrés dans les rangs nord-coréens ont pour mission de voler les plans de bataille afin de déclencher l’attaque. L’Opération Chromite est lancée… Le cours de l’Histoire est sur le point de changer.
Avis :
Si la Seconde Guerre mondiale a laissé exsangue une bonne partie de l’Europe et de l’Occident, le XXe siècle a produit d’autres conflits majeurs à son terme. Parmi ceux-ci, la guerre de Corée a contribué à renforcer l’opposition des blocs de l’Ouest et de l’Est. Elle a ainsi influé sur le paysage géopolitique sur le plan international. Comme d’autres guerres, elle constitue une source d’inspiration pour la culture populaire et, en l’occurrence, pour le cinéma. On songe à Baïonnette au canon de Samuel Fuller, Les Ponts de Toko-Ri de Mark Robson ou Flammes sur l’Asie de Dick Powell. Toutefois, ces métrages sortent en plein contexte, voire quelques années après son terme. Malgré leurs qualités, ils peuvent donc manquer de recul quant aux évènements et à leur portée historique.

Avec Memories of War, on assiste à une production sud-coréenne qui évoque l’opération Chromite, l’une des batailles les plus marquantes de la guerre de Corée. Au regard du pitch initial et de la présentation marketing, on pourrait penser à une intrigue essentiellement focalisée sur la bataille d’Incheon. Toutefois, l’approche contredit cette attente pour s’orienter vers une mission d’infiltration au-delà des lignes ennemies. En l’occurrence, il ne s’agit pas d’exposer des affrontements directs, mais de se concentrer sur les jeux d’espionnage pour préparer l’attaque. La tension prend alors un tour dissemblable, à tout le moins autre que celui d’un film de guerre classique, car le présent métrage s’en affranchit bien vite.
« La narration entremêle des enjeux globaux sur l’avenir d’un pays morcelé »
La première partie rappelle quelques productions emblématiques de l’âge d’or des films de commandos. Bien que les circonstances soient différentes, on songe surtout aux Canons de Navarone et aux Douze salopards. Cela tient à cette cohésion du groupe, à ce sens du devoir qui les unit dans leurs missions. S’il est difficile de se départir de quelques élans patriotiques dans un tel registre, le traitement de l’intrigue demeure bien mené. La narration entremêle des enjeux globaux sur l’avenir d’un pays morcelé et les aspirations des protagonistes. Le discours a beau se montrer manichéen sur les faits, cette considération reste plus nuancée dans la présentation des personnages, en particulier lorsqu’il est question de leur parcours respectif.
Quant au second acte, il s’avère plus nerveux avec le statut de fugitif des soldats infiltrés. Dans des environnements restreints ou extérieurs, les confrontations et les fusillades sont bien orchestrées. Cela se confirme avec l’alternance des points de vue et l’exposition des perspectives offertes en matière de défense, d’attaque ou de repli. Cela vaut aussi pour la séquence de la course-poursuite. L’ensemble se veut donc spectaculaire dans la manière de présenter cette page de l’histoire. Il est vrai que des libertés ont été prises, mais le traitement reste réaliste et n’hésite pas à amorcer quelques passages dramatiques pour développer le fond et varier la dynamique. Cela tient à la relation entre les différents intervenants, aux épreuves qu’ils subissent.
« Il convient aussi d’évoquer la prestation caricaturale de Liam Neeson«
On peut toutefois émettre des réserves sur certains aspects qui, sans se révéler rebutants à la bonne appréciation générale, constituent autant de maladresses évidentes. Comme évoqué auparavant, la place accordée à la bataille d’Incheon est anecdotique, alors qu’elle est censée se dérouler sur 13 jours. Au vu des images de synthèse déployées, on se dit avoir échappé au pire. D’effets pyrotechniques douteux en modélisation hasardeuse des bâtiments et véhicules de guerre, on assiste à un combat sur fond vert impersonnel qui contraste avec le soin apporté aux précédentes séquences, où le réalisme est de circonstance. Il convient aussi d’évoquer la prestation caricaturale de Liam Neeson en général MacArthur et quelques ficelles scénaristiques faciles en fin de parcours.

Au final, Memories of War privilégie surtout la carte du film historique sur fond d’une action effrénée, non de la guerre en elle-même. Sur ce point, le métrage de John H. Lee décevra les amateurs de batailles grandiloquentes. Lors d’un dénouement qui n’échappe guère aux sirènes du sacrifice individuel au profit de la nation, on regrette des carences visuelles évidentes. Cela sans compter la passivité des forces étrangères qui sont davantage dans l’observation que dans l’implication du conflit. Au demeurant, on apprécie la composition stratégique de la mission d’infiltration pour conférer une approche plus subtile au déroulement du conflit, à ses enjeux. En dépit de maladresses formelles, les qualités liées à l’immersion et à une progression nerveuse permettent d’évoquer les prémices d’une bataille décisive de la guerre de Corée, non sans ferveur.
Note : 14/20
Par Dante
