
Titre Original : One Battle After Another
De : Paul Thomas Anderson
Avec Leonardo DiCaprio, Sean Penn, Benicio Del Toro, Regina Hall
Année : 2025
Pays : Etats-Unis
Genre : Comédie, Action
Résumé :
Ancien révolutionnaire désabusé et paranoïaque, Bob vit en marge de la société, avec sa fille Willa, indépendante et pleine de ressources. Quand son ennemi juré refait surface après 16 ans et que Willa disparaît, Bob remue ciel et terre pour la retrouver, affrontant pour la première fois les conséquences de son passé…
Avis :
Paul Thomas Anderson fait partie de ces cinéastes américains dont chaque film est attendu comme un événement. C’est un auteur à part, l’un des derniers véritables “grands” du cinéma d’auteur américain. De « Boogie Nights » à « Magnolia« , de « There Will Be Blood » à « Phantom Thread« , Anderson n’a cessé de réinventer son art, de creuser l’âme humaine sous des formes différentes, toujours ambitieuses, parfois austères, souvent déstabilisantes. Anderson est un réalisateur libre, qui fait le cinéma dont il a envie, et qu’importe si, parfois, le spectateur reste sur le bas-côté.

J’apprécie énormément le cinéma de Paul Thomas Anderson. Il m’a offert des moments de cinéma incroyables : « Magnolia« , « Boogie Nights« , « There Will Be Blood« , ou encore « Phantom Thread« . Mais c’est aussi un réalisateur capable de me laisser complètement sur le bas-côté, comme avec « The Master« , « Inherent Vice » ou, plus étrangement, le très aimé « Punch-Drunk-Love« , qui m’avait laissé froid comme une pierre.
« Le film est encensé de toutes parts, et à juste titre. »
Trois ans après « Licorice Pizza« , film qui m’avait encore laissé perplexe, j’attendais Une bataille après l’autre avec beaucoup d’impatience. D’un côté, le sujet m’intéressait, même si j’ai le sentiment de voir beaucoup de films ces dernières années qui tournent autour des mêmes thématiques : l’Amérique fracturée, les idéologies qui s’entrechoquent, la perte de repères. De l’autre, ce nouveau film marque surtout le grand retour de Leonardo DiCaprio, acteur que je ne rate jamais. Et quand on apprend que Sean Penn et Regina Hall sont aussi de la partie, il y a de quoi être curieux. Excité, même.
Le film est encensé de toutes parts, et à juste titre. Triste et drôle à la fois, absurde et pourtant profondément lucide, Une bataille après l’autre est un grand moment de cinéma. Un spectacle ambitieux, intense, traversé par une énergie folle. Assurément, ce nouveau Anderson se pose comme l’un des grands films de l’année.
Dans une Amérique en pleine implosion sociale, deux communautés se font face. Les French 75 sont un groupe de citoyens rebelles, issus de tous horizons, qui refusent le nouvel ordre politique imposé. De l’autre, les Aventuriers du club de Noël, une sorte de milice idéologique persuadée de sauver le pays d’une décadence totale. Au centre de tout cela, un homme : Cole Sanders, ancien artificier des French 75, qui vit désormais reclus avec sa fille. Lorsqu’un ancien membre du groupe est arrêté, la traque autour de Cole se resserre…
« Paul Thomas Anderson y déploie une mise en scène d’une richesse folle. »
Dès ses premières minutes, Une bataille après l’autre impressionne. Paul Thomas Anderson y déploie une mise en scène d’une richesse folle. Le film est dense, chargé, complexe, mais jamais confus. Il mélange les genres avec une aisance rare : film politique, drame familial, comédie absurde, film de guerre intime, thriller paranoïaque… tout y passe, et tout se tient.
La mise en scène est à la fois flamboyante et précise, comme toujours chez Anderson. Il joue sur des ruptures de ton audacieuses, passant d’une séquence intimiste à une scène d’action filmée comme un cauchemar fiévreux (ah, cette course-poursuite vers la fin !). Certaines séquences sont littéralement immersives, d’autres, presque hallucinées, flirtent avec l’absurde. On retrouve ce goût du détail si cher au réalisateur. « Une bataille après l’autre« , c’est du plan-séquence impressionnant, un montage parfaitement tenu, et une direction d’acteurs d’une précision chirurgicale. Bref, c’est du grand cinéma.
Mais ce qui rend « Une bataille après l’autre » passionnant, c’est la manière dont le cinéaste articule sa folie visuelle avec le propos politique de son histoire. Le film parle de l’Amérique de Trump, mais aussi de celle qui vient après : une nation éclatée, rongée par la peur et la défiance. Le film interroge la violence du système, la perte de repères, la tentation du repli, mais aussi l’envie désespérée de croire encore à quelque chose. Chez Paul Thomas Anderson, deux camps se font face, se haïssent, se copient presque sans le savoir. Labyrinthes cachés, pièces privées, mots de passe, jeux de pouvoir… tout cela devient une métaphore passionnante de deux mondes où la confiance est un luxe et la vérité, presque une illusion.
« »Une bataille après l’autre« , c’est aussi un casting en or massif ! »
Chaque camp prétend détenir la vérité. Chaque camp justifie ses actes au nom d’un idéal. Et au milieu, il n’y a plus que le chaos. Le scénario de Paul Thomas Anderson évite la facilité du manichéisme. Ici, personne n’est tout blanc ni tout noir. Chaque personnage, même les plus extrêmes, garde une part d’humanité à raconter. C’est cette ambiguïté qui donne à l’intrigue sa tension et son suspense.
« Une bataille après l’autre« , c’est aussi un casting en or massif ! Leonardo DiCaprio est absolument génial. Rarement il aura semblé autant s’amuser à jouer un homme aussi paumé. Sa paranoïa est grandissante, oscillant entre tragédie peureuse et ironie déjantée. On retrouve chez lui quelque chose d’un Jack Nicholson débridé, un peu fou. Face à lui, Sean Penn en fait des caisses, comme souvent ces dernières années, mais ça colle parfaitement à son personnage d’ordure charismatique. Un manipulateur prêt à tout pour laver son honneur. Le film fonctionne beaucoup sur ce duo tristement tordant.
Autour d’eux, le reste du casting est terrible : Chase Infiniti, bouleversante dans le rôle de la fille de DiCaprio, fragile et pleine de colère. Teyana Taylor, impressionnante de puissance dans celui d’une révolutionnaire mystique. Tony Goldwyn est terrifiant de calme dans ses discours. Bref, tous ces personnages existent pleinement. Chacun d’eux a son espace, sa fonction, sa ligne dramatique. Comme souvent chez Anderson, « Une bataille après l’autre » est un film choral où chaque voix apporte quelque chose.

En conclusion de tout cela, « Une bataille après l’autre » est un grand film. Un film dense, puissant, souvent brillant, parfois épuisant, mais toujours passionnant à suivre. Le film nous embarque du début à la fin sans jamais nous perdre. Paul Thomas Anderson démontre encore une fois qu’il reste un cinéaste hors norme, capable de mélanger les genres avec aisance pour raconter une histoire démesurée et intime à la fois. On pourrait dire que parfois, il en fait trop. Et c’est vrai qu’on a vu plusieurs œuvres aborder ces thématiques récemment : la fracture américaine, le complot, le désespoir collectif. Mais peu l’ont fait avec une telle ampleur, une telle maîtrise, une telle folie débridée. Bref, c’était intense, fou, délirant, drôle et touchant. On en redemanderait presque.
Note : 17,5/20
Par Cinéted