avril 26, 2024

Les Poupées Brisées – Lise S. Dawn – Un Conte Bien Noir

Auteure : Lise S. Dawn

Editeur : Les Editions des Tourments

Genre : Thriller

Résumé :

Au centre de la pièce se tient une fillette blonde d’à peine six ans, entourée de deux hommes en noir, encore. Elle ne dit rien et semble ne pas comprendre. Une œuvre d’art en devenir et bientôt un crime de plus à mon actif et pourtant, je n’arrive pas à ressentir la peine et la douleur que vont me procurer ce meurtre. Les gens ne changent que par vengeance ou par nécessité. Moi c’était par nécessité mais je crains que ce nouveau moi ne s’attache à l’ancien pour le détruire à petit feu jusqu’à ce qu’il disparaisse enfin, perdu dans les méandres du néant. Non, je vois cette petite fille au centre de la pièce et je n’ai pas mal, je n’ai plus peur. Mon absence de réaction me semble cruelle mais je reste impassible et avance lentement…

Avis :

Du noir et du sang

Les poupées brisées nous embarque dans une histoire glauque et sombre : âmes sensibles s’abstenir ! Pourtant, on se laisse faire avec aisance ; les mystères s’invitent à la lecture, et le caractère de l’héroïne plaît d’emblée ! La plume fluide et incisive, qui ne s’encombre pas de superflus, accélère le rythme tout en décrivant suffisamment les scènes pour nous emplir d’horreur. Les lecteurs amoureux des genres sombres et macabres s’y retrouveront : les scènes déchirantes s’enchaînent et choquent, attirent et perturbent. Le livre constitue clairement une lecture dérangeante, et à la fois appréciable !

Malgré cela, certains passages violents, surtout alors que les victimes sont des enfants, restent difficiles à supporter. La froideur de l’antagoniste, ses côtés psychopathes et machiavéliques entraînent le lecteur dans une aventure noire et sanglante. Le « méchant » de l’histoire – un terme un peu trop gentil pour lui, nous débecte dès les premiers instants à ses côtés. L’envie de le voir disparaître nous aide à comploter auprès de la protagoniste et nous donne envie de poursuivre, pour savoir si et comment il sera puni pour ses terribles méfaits.

Un voyage en enfer, dans notre enfer également intérieur, qui nous questionne sur notre bestialité et notre bonté, sur nos déviances et humanité. A la place de l’héroïne, comment aurions-nous agi ? Aux mains d’un criminel dangereux, qui ne vous veut pas de mal, mais qui en fait aux autres, qu’aurions-nous choisi ?

Trop rapide

Le roman se dévore à grande vitesse, et la fin ne comble pas toutes nos envies. Frustration, injustice, colère… On passe par nombre d’émotions fortes avec ce roman détonnant ! Pourtant, on finit par accepter ce final plutôt logique, même si énervant, vite amené, qui semble bâclé sans recherche fouillée.

Au cours de la lecture, certains passages auraient pu être plus approfondis, notamment pour amener de la réflexion sur les émotions ou les contradictions des personnages, sur leurs évolutions et résiliences, sur leurs envies et passions, sur leurs idées noires et macabres. Cependant, le lecteur s’imagine assez bien les choses : la superficialité des descriptions suffit souvent à nous surprendre ou nous malmener.

On a la sensation que la captive ne tente rien pour s’enfuir ou pour échapper à cette vie froide. Bien que son caractère reste vigoureux, il se délite avec le temps ; son humour sarcastique devient dérangeant et perturbant. On vit une vraie descente aux enfers. Il est ainsi difficile de s’attacher à ce personnage qui abandonne. Le syndrome de Stockholm est mis en avant sans pour autant s’exprimer clairement : plus de détails auraient été bienvenus.

De la poésie

Quelques poèmes amènent davantage d’information à ce propos. Musicaux mais aussi tragiques, ils poussent l’héroïne à nous transmettre ses ressentis, ses douleurs. Comme dans une tragédie grecque, les mots transmettent l’impossible. Cette balance entre prose et vers s’avère intéressante et plutôt réussie, elle apaise nos cœurs torturés par des scènes terrifiantes et nous aide à nous évader, au même titre que la protagoniste essaie de s’échapper psychiquement d’un monde qui la bousille à petit feu.

Une ambivalence sur la forme, qui est le reflet de celle sur le fond : la captive apprécie certains points de son séjour morbide, et en abhorre d’autres. Une double-dimension effrayante qui ne laisse pas indifférent, qui nous laisse penser que nous pourrions nous habituer à un quotidien aussi effroyable et sanguinaire, que notre esprit pourrait rester impassible ou blasé devant de telles scènes de violence crue.

Un conte noir

L’histoire se déroule en Karsovie, un endroit inventé, et pourtant très réaliste, vivace. Les paysages nordiques, l’immense maison, les statues de pierres, les invités bien habillés… On a l’impression d’assister à un conte noir moderne qui cherche davantage à montrer qu’à analyser. Au final, ce n’est pas plus mal car c’est au lecteur de réfléchir plus avant si l’envie l’en prend.

En bref

  • Un conte noir et tragique ;
  • Une héroïne qui balance entre l’envie de partir et celle de rester aux côtés d’un être dépourvu d’humanité ;
  • Un lieu à la fois magique et macabre ;
  • Des scènes de violence difficiles et perturbantes ;
  • Des poèmes touchants ;
  • Un roman qui ne va pas au bout des choses, qui manque d’approfondissement ;
  • Une descente aux enfers poignante.

Note : 13.5/20

Par Lildrille

Lildrille

Passionnée d’imaginaire et d’évasion depuis longtemps, écrire et lire sont mes activités favorites. Dans un monde souvent sombre, m'évader et fournir du rêve sont mes objectifs. Suivez-moi en tant qu'auteure ici : https://www.2passions1dream.com/. Et en tant que chroniqueuse aussi là : https://simplement.pro/u/Lildrille.

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