Titre Original : Viking
De : Andrey Kravchuk
Avec Danila Kozlovsky, Igor Petrenko, Svetlana Khodchenkova, Andrey Smolyakov
Année : 2016
Pays : Russie
Genre : Historique
Résumé :
Trois frères se disputent le territoire viking de la Russie Kiévienne. Leur père mort, ils se livrent à une guerre de vengeance sans merci. Le jeune prince Vladimir, forcé à l’exil, se retrouve confronté à son frère Yaropolk, déjà responsable de l’assassinat de son autre frère Oleg. Vladimir décide alors d’affronter le meurtrier de son frère afin de récupérer le commandement de la ville de Kiev : animé par une volonté d’y apporter enfin la paix, il mènera son peuple au « Baptême de Russie ».
Avis :
Quand on évoque le cinéma russe, on pense immédiatement à Andreï Tarkovski. Il faut dire que des films comme Stalker ont marqué leur époque, et on peut même dire que le film est considéré comme culte aujourd’hui. Cependant, ça reste un cinéma difficile d’accès et qui ne s’adresse pas forcément au tout public. Aujourd’hui, le cinéma russe essaye de rentrer dans la case blockbuster en faisant des métrages à gros budget qui surfent sur la mode du moment. On aura eu droit à Guardians, film de super-héros hystérique et bien débile avec des effets spéciaux d’un autre âge. Ou encore Viking, la Naissance d’une Nation, film historique qui nous préoccupe aujourd’hui et qui souhaite profiter du succès de la série Vikings pour tenter d’exister. Le projet est alléchant, le budget conséquent et la fresque s’annonce épique, mais on va vite redescendre de notre canapé devant tant d’absurdités.
Le bordel
Le film raconte l’histoire qui arrive juste avant le fondement de la nation russe. Ainsi donc, une voix off nous explique rapidement l’histoire de trois frères qui se partagent un grand royaume. Tout pourrait aller pour le mieux, mais les trois frères se mènent la guerre et seul le plus jeune, considéré comme un bâtard, peut prétendre au trône et réunir les peuples. Cela ne va pas se faire dans le calme absolu, puisque l’un des bras droits du frère aîné décide de monter une armée pour destituer celui qu’il prétend comme un usurpateur. Au milieu de tout cela, il faut rajouter des guerriers mongols, quelques romains et des enfants illégitimes. Bref, c’est le boxon et à vrai dire, on ne pas y comprendre grand-chose. Et ce sera là un constat qui va donner énormément de tort au film, car tout est confus et le spectateur va se perdre.
Dès le départ, on assiste, impuissant, à une salve de name dropping qui nous laisse circonspect. En effet, on aura les noms des trois frères, mais ils ne seront pas caractérisés physiquement, et entre barbes et fourrures, on aura bien du mal à savoir qui est qui. Le pire, c’est que durant cette longue intro, on ne comprendra pas bien les velléités entre les frangins et ce combat persistant entre eux. Le film dure plus de deux heures, mais il ne prend jamais le temps de s’arrêter pour mieux raconter son histoire. On aura droit à des flashbacks, puis parfois à des sauts dans le temps sans que ce soit notifier et on va rapidement se perdre dans ce montage bordélique et sans aucun sens. Puis, le film essaye de mettre en avant des rites et des coutumes religieuses que l’on ne comprendra pas et qui ne seront jamais expliqués.
Approximations
Alors certes, on peut croire que le film s’adresse aux russes qui doivent avoir des notions historiques sur leur passé, mais même sur ça, on émet des doutes. Il faut dire que si l’on se renseigne quelques minutes sur le sujet, on va voir que Kiev était l’une des villes les plus riches d’Europe au Xème siècle, et que l’on était loin des vikings aux cheveux cracra. De plus, certains éléments « fantastiques » viendront poindre le bout de leur nez, ajoutant une touche de mysticisme sans que cela ne soit remis en question. Pour un film historique, on flirte avec l’hagiographie d’une nation qui n’est pas forcément bâti que sur des roses. Loin de là. Et si ces approximations historiques ne doivent pas entacher notre suivi du film, force est de constater que certains éléments laissent un goût amer en bouche. Comme les personnages, par exemple.
Le film possède un bon rythme, on ne peut lui tronquer cela, mais les personnages sont tous bazardés et n’ont aucun background. Vladimir, le héros, est aussi lisse qu’une limande. Il est aussi charismatique qu’une miss France et surtout, il ne prend aucune décision intelligente. Pire, il suit au doigt et à l’œil l’un de ses conseillers, un vieux roublard qui n’est là que pour survivre afin de ne pas se faire trancher la gorge. Les antagonistes sont transparents au possible, se fondant dans la masse, et n’ayant aucun truc pour les reconnaître. On aura bien un conflit avec les guerriers mongols, mais ce sera vite expédié. De même, les vrais vikings seront présents un temps, présentés comme des barbares sanguinaires, mais ils ne servent pas à grand-chose. Même le berserker, présenté plus que les autres, va mourir dans l’indifférence totale. De ce fait, aucune émotion ne sera au rendez-vous.
Superficialité
Néanmoins, s’il y a bien une chose que l’on ne peut retirer au film, c’est la beauté de sa mise en scène. Si les films russes récents qui tombent dans le genre ne sont pas folichons sur le scénario (Guardians ou The Bride), ils restent assez jolis à regarder. Viking, la Naissance d’une Nation n’échappe pas à cette règle. Certains plans sont vraiment très beaux et on ressent une recherche artistique pour nous imprégner de cette violence et de ces décors enneigés. Les plans larges se succèdent pour nous faire profiter de jolis panoramas et c’est plutôt agréable. Tout comme les séquences de combat qui sont superbes, avec une certaine maîtrise pour que l’ensemble soit bien lisible. Si le film possède un seul bon point, c’est bien sur sa mise en scène, qui est plutôt inspirée. C’est dommage que le reste ne suive pas.
Au final, Viking la Naissance d’une Nation est un film historique mensonger et raté, par-dessus le marché. Le film est bien trop brouillon dans son scénario, à un tel point que l’on ne comprend absolument rien à ce qui se passe. Les personnages ne sont pas suffisamment marqués et travaillés pour susciter de l’émoi ou de l’intérêt. Seule la mise en scène s’avère plaisante, avec de jolis plans et de jolies séquences, mais cela ne suffira pas à nous rattraper dans ce gloubi-boulga indigeste et pénible. Pour l’histoire russe, on repassera, et pour le côté viking, on préfèrera largement la série…
Note : 06/20
Par AqME