Résumé :
Megiddo, 2006. Sur le lieu biblique de l’Apocalypse, une équipe d’archéologues est sauvagement assassinée. Le trésor de leur découverte, la Lance qui perça jadis le flanc du Christ au Golgotha, a disparu… Judith Guillemarche, spécialiste de la chrétienté et conseillère spéciale auprès du Vatican, est mandatée par le nouveau pape Leonardo Spinelli di Rosace pour faire la lumière sur cette affaire. De la bibliothèque d’Alexandrie au monastère de Sainte-Catherine, des souks du Caire aux arcanes du Vatican, Judith découvre le projet insensé qui se dissimule derrière l’opération de Meggido. Membres d’une organisation secrète, des généticiens en rupture de ban tentent, grâce aux prodiges de la technologie contemporaine, de réaliser l’impensable : ils veulent ressusciter le Messie…
Avis :
Entre deux opus des aventures de l’Orchidée noire, saga historique, Arnaud Delalande s’est attelé au thriller ésotérique. Pas vraiment une nouveauté pour l’auteur étant donné que La lance de la destinée met en scène pour la deuxième fois Judith Guillemarche, héroïne de Notre-Dame sous la terre. On peut donc considérer qu’il n’est pas à son coup d’essai et marche en terrain connu, enfin presque. Ce genre à part entière est un exercice très codé. Aussi, il convient de disposer d’une intrigue solide, d’une documentation fournie et d’un sens du rythme sans faille pour emporter l’adhésion. Les ingrédients sont-ils réunis dans le cas présent ?
D’emblée, l’on sent l’influence « post-Da Vinci Code » pour ce qui est du thème principal : mettre à mal les fondements de la religion chrétienne. Ici, pas question de descendance (quoique…) de Jésus et Marie-Madeleine. L’on se penche plutôt sur une relique sacrée : la lance de Longinus, celle-là même qui a percé le flanc du Christ. À cela, on ajoute une course-poursuite contemporaine contre un mystérieux groupuscule et l’on obtient un matériau de base intéressant à exploiter. Pourtant, l’aventure se révèle en demi-teinte, presque décevante au vu des tenants avancés.
Si le prologue s’avère immersif et adéquat, la chronologie n’est pas forcément des plus judicieuses. La plupart du temps, le récit se déroule en 2006, mais certains passages font un bond en arrière conséquent. Une remarque qui ne serait pas préjudiciable dans le cas où cela apporterait des explications ou un éclairage nouveau sur un problème donné. Là, on a l’impression qu’il s’agit d’un remplissage (à l’enrobage toutefois séduisant) destiné à atteindre un nombre précis de caractères. Un artifice qui ralentit et casse le rythme plus qu’il ne le sert.
Cet écueil se ressent également dans les moments clés. Lorsqu’on lit des passages à l’importance certaine, le soufflet retombe assez rapidement aux vues de nos attentes. Le fait de combiner histoire et science n’est pas nouveau, mais le mélange a surtout déjà mieux pris ailleurs. De la génétique, oui. Une relique sacrée, oui. Mais la finalité (aucun spoiler étant donné que vous trouverez cet élément sur la quatrième de couverture) de s’en servir pour ressusciter le messie à base d’un peu de sang demeure alambiquée et peu crédible. Au lieu de vulgariser l’idée pour le profane, on se retrouve avec des explications absconses que seuls les généticiens (ou les étudiants dans ce domaine) seront capables de décrypter pour en constater la faisabilité.
Malheureusement, l’on constate que l’auteur hésite entre un fil narratif tendu (les meurtres, l’enquête…) et une approche plus contemplative. Il s’attarde sur des questions d’éthique, théologique et, plus globalement, à la portée philosophique au détriment de son histoire. Là encore, les propos tenus sont intelligents, mais font office de remplissage pour un roman qui n’est déjà pas très long (340 pages en format poche). L’intrigue ressemble aux montagnes russes en faisant se succéder des moments passionnants à des séquences nettement plus dispensables.
Pourtant, La lance de la destinée n’est pas forcément mauvais. Le style de l’auteur est plaisant à suivre. Il retranscrit parfaitement l’atmosphère des lieux, qu’il s’agisse des couloirs austères du Vatican ou de la chaleur moite du Caire. Le cadre est varié et offre un terrain de jeu somme tout entraînant. Le constat reste un peu plus mitigé quant à l’écriture des personnages, assez peu marquant au demeurant. Judith, son acolyte ou même le pape, on ne parvient pas à s’y attacher. D’ailleurs, l’on sent des liens tissés dans le roman précédent, ce qui peut décontenancer lorsqu’on ne l’a pas lu.
À l’image de la série produite par M6 (directement inspiré du présent ouvrage), La lance de la destinée promet monts et merveilles, mais se révèle finalement très moyen. En partant d’un postulat très intéressant, on se rend compte que l’intrigue est percluse de longueurs et de passages pas forcément justifiés. Malgré la qualité d’écriture, l’auteur parvient difficilement à mettre en avant ses thèmes. À savoir, les questions d’éthique de la génétique ne trouvent pas d’écho. La faute à une société secrète aux motivations pas crédibles pour un sou et des explications vaseuses. Un roman en dents de scie bien écrit, mais qui souffre de gros problèmes de rythme.
Note : 12/20
Par Dante