Avis :
Parmi les producteurs les plus influents des Etats-Unis, Rick Rubin fait office de super grande star. Ayant une oreille affutée pour repérer les futurs succès en rap et en heavy métal, l’homme possède une discographie vraiment impressionnante. Outre le fait d’avoir produit des groupes comme Rage Against the Machine, Audioslave, Slayer, System of a Down, Red Hot Chili Peppers ou encore Black Sabbath, il est aussi l’homme derrière des artistes plus populaires comme Shakira, Kanye West ou encore Eminem. Ce dernier a eu une phase très difficile dans sa vie, sortant de cure de désintoxication, il a dû réapprendre à rapper, perdant sa voix et son flow. Ceci expliquant donc le titre de son dernier album, Revival, qu’il espère être comme une résurrection, malgré un précédent très réussi. Seulement, sortir un album avec une histoire derrière ne suffit pas à le rendre bon et c’est ce que l’on va apprendre à nos dépends. Car avec Revival, Eminem prouve que l’on ne peut pas toujours être au top, la faute à de trop nombreux featurings aux accents pop (Ed Sheeran, Béyoncé, Alicia Keys), à des reprises plus que douteuses (I Love Rock n’Roll de Joan Jett et Zombie de The Cranberries) et à des instrumentalisations d’une pauvreté alarmante. Bref, Revival, ce n’est pas terrible.
Le skeud débute avec Walk on Water en feat avec Béyoncé. Ce morceau est assez typique du reste de l’album. En fait, le flow du rappeur est toujours intéressant, mais c’est surtout sur la structure même du titre et sa propension à faire un rap old school un peu trop mercantile. On retrouve donc des couplets rappés, une instru au piano relativement simple mais efficace et un refrain chanté par Béyoncé qui force sur les vibratos pour tenter de donner de l’émotion. Alors oui, ça va avec la thématique qui veut expliquer qu’Eminem n’est pas Dieu et qu’il possède des faiblesses, mais globalement, on a la sensation de faire un bond de vingt ans en arrière, avec un hip-hop factice, presque machiste, laissant peu de place à la femme au profit du rap viril. Alors cela peut passer, mais ça reste très classique. Et on retrouvera cela avec les autres featuring, comme par exemple River avec Ed Sheeran qui n’a rien fait de bien depuis son premier album. On retrouve toutes les tares d’un morceau commercial au possible avec la petite guitare sèche, le refrain en chant clair qui va faire frémir les midinettes et le rap en couplet. Bref, rien de bien neuf ou d’intéressant. Alors oui, c’est bien produit, c’est propre, c’est pro, mais ça reste trop conventionnel. Et on ne parle même pas de Like Home avec Alicia Keys qui ressemble à un morceau de girls band. A la rigueur, il reste Need Me avec Pink qui s’avère sympathique, mais c’est loin d’être la panacée.
Ensuite, il y a d’autres choses très gênantes avec cet album, mais ce qui peut horripiler le plus, c’est la reprise de certains samples de groupes de rock et de les transformer à peine pour en faire quelque chose d’opportuniste et qui ne colle pas du tout avec le flow d’Eminem. On peut donc évoquer Remind Me dans lequel le rappeur reprend les riffs de I Love Rock n’Roll de Joan Jett and the Blackhearts et qui tue le refrain en offrant quelque chose d’insipide. On peut aussi parler de In Your Head où cette fois-ci c’est Zombie de The Cranberries qui est repris et même si on sent un flow assez rageur, cela ne colle pas du tout avec les riffs du morceau volé et encore moins avec le refrain. C’est au niveau musical que cela ne colle pas des masses, avec une trop grande distance entre le rap et le rock nerveux. Et c’est étonnant puisque dans le précédent album, des morceaux comme Berserk marchaient du tonnerre, mais là, ça ne prend pas du tout. Enfin, en termes d’instrumentalisation, c’est très pauvre, et encore une fois, très conventionnel. On peut citer Offended qui n’est pas très intéressant ou encore Castle qui ne possède rien de neuf à proposer. Alors évidemment, tout n’est pas à jeter dans cet opus. Certains morceaux sont même plaisants comme Arose qui clôture cet album avec émotion ou encore Framed qui renoue un peu avec l’univers du rappeur, mais c’est bien peu de chose face aux différentes déceptions qu’apporte l’album.
Au final, Revival, le dernier album d’Eminem, est une belle déception même s’il ne mérite pas tant de haine de la part de la presse spécialisée. Si l’album est vraiment imparfait avec des instrus au ras des pâquerettes, des samples rock sabordés ou encore une direction trop pop, il y a quelques petites choses à sauver et il vaut mieux se focaliser là-dessus pour atténuer la déception. Et puis, dix-neuf morceaux, c’est clairement généreux de la part du rappeur, on ne peut pas lui enlever ça.
- Walk on Water feat Béyoncé
- Believe
- Chloraseptic feat PHRESHER
- Untouchable
- River feat Ed Sheeran
- Remind Me Intro
- Remind Me
- Revival Interlude
- Like Home feat Alicia Keys
- Bad Husband feat X Ambassadors
- Tragic Endings feat Skylar Grey
- Framed
- Nowhere Fast feat Kehlani
- Heat
- Offended
- Need Me feat Pink
- In Your Head
- Castle
- Arose
Note: 08/20
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Par AqME